• La Grecque Margaritis Schinas, issu du parti « Nouvelle Démocratie » qui défend en Grèce les privilèges dont jouit l’Eglise orthodoxe, est devenue « commissaire à la défense du mode de vie européen ». Cette dénomination, pour le moins ambiguë, permet d’éviter le terme « d’identité européenne »,

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  • La tête à l’envers

    Mariage en Chine

    Hier, un des thèmes de l’émission dominicale « C politique » (France 5) était : « Décrocher un portrait du Président de la République dans une mairie mérite-t-il un procès pour "vol en réunion" ? Depuis plusieurs mois, de jeunes activistes écologistes pénètrent dans les mairies, un peu partout en France, pour dénoncer, selon eux, l’inaction climatique d’Emmanuel Macron et le fossé entre ses paroles et ses actes… ».

    Ces portraits dérobés ont été planqués, puis ressortis lors d’une manifestation (non violente), portés par des activistes, les exposant face aux caméras, le président posant inconfortablement la tête en bas, mais sans être décapité comme certains « gilets jaunes » l’auraient souhaité.

    Deux jeunes femmes appartenant à cette mouvance étaient invitées sur le plateau et protestaient contre « l’inaction climatique » de Macron. Comme leur interlocuteur leur faisait remarquer que Macron en faisait plutôt plus que bien d’autres chefs d’Etat en la matière, elles l’ont admis, mais ont répliqué que ce n’était pas assez. Je veux bien le croire, mais à aucun moment le journaliste leur a demandé : à votre avis que doit-il faire en pratique ? En tenant compte que le pays doit continuer à fonctionner, l’électricité à être produite, même en l’absence de vent et de soleil, sans laquelle la civilisation actuelle s’effondrerait, les prestations sociales et les subventions aux associations (dont celles qui s’occupent d’écologie) à être versées etc…En tenant compte que la France est un petit pays et l’Europe qu’une péninsule de l’Eurasie, face à des mastodontes, grands pollueurs devant l’Eternel, comme les Amériques, la Chine, la Russie ou l’Inde, en tenant compte que même si la France cessait toute activité, il n’est pas sûr que la température du globe baisserait seulement d’un dixième de degré. C’est décourageant mais cela ne doit en aucunement justifier de ne rien faire du tout.

    Le vol dans les mairies est un acte illégal, ce que ces jeunes femmes admettent car elles prônent la désobéissance civile. Et l’une d’entre elle est même devenue : « formatrice à la désobéissance civile » (sic). J’ignore si cette activité enrichissante est rémunérée ou pas, mais on ne pourra pas dire que l’écologie ne crée pas d’emplois.

    Nous sommes en démocratie, même si certains le conteste, comme Mélenchon dont il faut charitablement pardonner les déclarations car on peut comprendre qu’un admirateur de Castro ou de Maduro ait un peu perdu ses repères en matière de démocratie. Nous sommes dans un pays où existe la liberté d’expression, où l’on peut manifester (et nous avons droit au moins à une manifestation hebdomadaire depuis des mois), faire grève (et les Français ne manquent pas une occasion de la faire) et voter à l’occasion pour exprimer sa réprobation, approuver la désobéissance civile, dont on ne sait jamais où elle peut s’arrêter, est un chemin qui peut mener au chaos, ce qui serait contre-productif en matière d’écologie.  L'étonnant est qu'un économiste également invité pour commenter l'émission (c'est fou ce que nous avons d'économistes), sans doute pour ne pas déplaire à ces dames, s'est empressé d'approuver cette désobéissance aux lois de la République. Il est coauteur d'un ouvrage traitant des origines du populisme.


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  • En mars 2018, François Delfraissy, président du Conseil consultatif national d’éthique (CCNE), déclarait que « chacun a sa vision de l’éthique » et ne pas savoir – ce que l’on peut comprendre - ce qu’était « le bien et le mal ». Déclaration curieuse pour quelqu’un qui préside une instance dont la vocation est justement de se référer à l’éthique pour donner ses avis. On ne voit donc pas à quoi sert exactement le CCNE dont on pourrait ne pas suivre les conclusions qui ne reflètent que les avis de ses membres, chacun se référant à sa propre éthique. Le président du CCNE ajoutait : « Parfois c’est la science qui avance très vite et la société qui est en retard, parfois la société avance plus vite. Entre les innovations de la science et celles de la société, il n’y a pas de bien et de mal. Il y a un équilibre à trouver qui doit s’inscrire dans la notion de progrès (phrase soulignée par mes soins) /…/ On a une société qui évolue, il y a donc une série de valeurs qui peuvent évoluer. La notion de valeur est relative. Il n’y a pas de valeur absolue. »[1]

    Donc, le président du CCNE n’a aucune idée précise du bien, du mal, de l’éthique et des valeurs, notions à l’évidence relatives, mouvantes et évolutives (ce qui n’est pas faux), mais par contre, il sait ce qu’est le progrès. Et en fonction de quels critères notre président peut-il déterminer que tel état est un progrès par rapport à l’état précédent ? Et un progrès pour qui ? puisque l’éthique est individuelle. Il remplace donc la notion d’éthique (et celle du bien et du mal) par « c’est mieux » ou c’est moins bien », mais en vertu de quoi et pour qui ? Est-ce qu’un mieux pour une catégorie d’individus est un mieux pour une autre catégorie ou pour l’ensemble de la société ?

    En fait ce CCNE ne fait qu’entériner ce qui se produit tout seul dans la marmite bouillonnante de la société (surtout occidentale) remuée par les possibilités croissantes (et parfois dangereuses) apportées par la Science.

     

    [1] Valeurs actuelles, mars 2018, cité par Jérôme Fourquet dans « L’Archipel français »


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  • La piscine à voile et à vapeur

    Cette fois c’est dans une piscine du XIe arrondissement de Paris que dimanche dernier cinq musulmanes se sont jetées à l’eau tout habillées, en costume de nonne (appelé burkini), ce qui n’est ni bien commode pour nager, ni bien propre (la piscine a d’ailleurs fermé ses portes à la suite de ce baptême collectif).

    Elles étaient soutenues par d'autres militantes féministes en maillots une ou deux pièces, et des hommes membres du collectif créé pour l'occasion,

    On ne sait pas si elles ont sauté à l’eau pour calmer leurs ardeurs républicaines ou si elles ont été poussées collectivement par leur époux dont elles sont la propriété, sans avoir eu, dans les deux cas, le temps de se déshabiller.

    Il semble cependant que ces baigneuses tenaient à rester habillées des pieds à la tête, considérant que la réglementation des piscines était raciste et islamophobe. Elles se sont proclamées militantes musulmanes et féministes, ce qui est tout de même un lourd oxymore à porter, et on comprend la nécessité de les soutenir, à tel point que des personnes transgenres sont venus également à la rescousse. On sait combien l’islam les apprécie, et on peut donc se demander s’il n’aurait pas été plus opportun pour ces personnes transgenres de changer de cerveau plutôt que de sexe.

    Illustration de Ingres : "Bain turc"

    Source : Le Point


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  • « Fake news » au carré

    Il est certain qu’avec la meute en réseau, la vérité a de plus en plus du plomb dans l’aile. Certes, le mensonge en politique est de tous les temps notamment pour justifier une action douteuse, et ce mensonge a été officialisé sous le terme admis de propagande. Néanmoins la vérité existait en soi et constituait un étalon auquel des gens honnêtes et renseignés pouvaient se référer.

    Aujourd’hui cet étalon lui-même est remis en question. On parle de vérité relative, de vérité alternative, de vérité personnelle : « c’est ma vérité et elle vaut bien la vôtre ». Et puis nous avons les fausses nouvelles, les « fake news » et la vérité disparaît sous leur avalanche drainée par les réseaux. Cette désinformation vient alimenter la fabrication de complots qui permettent à leur tour la naissance d’autres fausses informations.

    Récemment j’ai été confronté à ce que l'on pourrait nommer une fake news au carré, c’est à dire à une information considérée comme montée de toutes pièces, accompagnée de ce fait d’un parfum de complot, mais qui se révèle en définitive exacte. Ce fut le cas de la remarque irrespectueuse d’un internaute brésilien qui comparait le physique et l’âge de Mme Macron avec ceux de Mme Bolsonaro, remarque relayée avec satisfaction par le Président brésilien. Rapidement, cette information fut considérée comme fausse,* provenant soi-disant de comptes bidons, sous-entendu que cette information n’étant pas à l’avantage de Mr Bolsonaro aurait été monté de toutes pièces peut-être à partir de l’Elysée pour déconsidérer le président brésilien. Il s’avère en définitive que la grossièreté bolsonarienne est authentique puisque le porte-parole du gouvernement brésilien a signalé par la suite le retrait du commentaire vulgaire de Jair Bolsonaro, ce qui prouve bien son existence préalable.

    Ce concept de fake news au carré consistera désormais à transformer une vérité en mensonge, ce qui permet de faire douter de la vérité elle-même, celle-ci ayant pris pour un temps les oripeaux du bobard.

    Illustration de Salvador Dali : « L’image disparaît ». Ce tableau recèle deux vérités : le portrait de profil de l’homme moustachu et celle de la femme lisant une lettre (référence au tableau de Vermeer). Ces deux vérités sont imbriquées, l’une n’existe pas sans l’autre ; elles sont relatives. L’image globale a deux significations alternatives et l’on peut opter pour l’une ou l’autre par choix personnel mais le choix d’une image fait disparaître l’autre. L'image, comme la vérité, dépend de celui qui la regarde.

    * Le blog "le Salon beige" qui a affirmé la fausseté de l'information, ulcéré par la passivité des médias, a laissé son texte en l'état en ajoutant au milieu cet addendum :

    "Addendum : Finalement, le compte utilisé serait bien un compte authentique de Jair Bolsonaro et c’est l’AFP qui aurait diffusé une fausse nouvelle, reprise par de nombreux médias comme BFM (cité ci-dessus) et donc également par le Salon beige. Nous vous prions de nous excuser d’avoir fait confiance à l’AFP (sic!). Nous aurions dû être plus prudent car le Salon beige dénonce suffisamment souvent cette tendance dans les médias à reproduire les dépêches AFP au mot près sans apporter de plus-value. Cette mésaventure n’en est qu’un exemple de plus et montre à quel point les médias institutionnels manquent de fiabilité. Voici les explications de Libération"


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    A quoi sert l'ONU ?

    A une époque où les frictions se multiplient dans le monde, où la Corée du Nord envoie ses pétards pour amuser son jeune dictateur, où les musulmans ne perdent pas une occasion de s'étriper entre croyants et de se suicider en groupe, histoire d'avoir de la compagnie au paradis, tout en propageant les bienfaits de leur religion de paix, et ceux escomptés de la fission nucléaire, où la Chine et les USA se disputent des parts de marché en montrant leurs muscles et leurs taxes, où l'Afrique qui croulent sous les richesses naturelles, va de viols en massacres, s'appauvrit au profit des dirigeants accrochés à leur fauteuil, et se vide de sa jeunesse en faisant de la méditerranée un cimetière marin, que fait l'ONU ?

    L’ONU se mêle le moins possible de ce qui devrait la regarder (en dehors de l’OMS pour la santé) et le plus possible de ce qui ne la regarde pas, comme de rectifier l'histoire de la Palestine en essayant d'effacer l'empreinte millénaire des juifs dans la région au profit des musulmans infiniment plus nombreux. Mais tout cela est accessoire.

    Elle vient de montrer l'importance de son rôle dans le monde en accueillant comme il se doit la présumée autiste à peine sortie de l'enfance, mais donneuse de leçons au service du climat, après sa traversée héroïque de l'Atlantique en voilier, et son arrivée triomphale à New-York sous les applaudissements. L’ONU a accueilli Greta Thunberg avec les honneurs : une flotille de 17 voiliers - un pour chacun des 17 objectifs du développement durable fixés par l’ONU à l’horizon 2030 - a accompagné son voilier pour la dernière ligne droite avant son arrivée à Manhattan. Des dizaines de journalistes et quelque 300 personnes l'ont vu miraculeusement accoster, après avoir recueilli pieusement son dernier tweet :   “Terre ! Les lumières de Long Island et de New York devant nous”.

    Ajoutons cependant que le « machin » sert tout de même à nourrir beaucoup de monde.

    Illustration : François Boucher : "St Pierre tentant de marcher sur l'eau"


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  • Les ONG ne représentent aucunement la société civile« Greenpeace comme WWF, Oxfam France ou le Secours catholique dénoncent une mise à l'écart (du G7) : l'Élysée a accordé 25 accréditations aux ONG contre 100 les autres années » (la presse).

    J’ignore les raisons exactes qui ont conduit l’exécutif à écarter 75% des ONG (essentiellement environnementales) de la réunion des 7 chefs d’Etat qui vont entrer en conclave, et dont il ne sortira très probablement aucune fumée blanche. Je suppose que la crainte des manifestations hostiles et les obligations de la sécurité y sont pour quelque chose. Ces réunions de chefs d’Etat agissent comme des abcès de fixation qui attirent tous les mécontentements et les groupes violents. La réunion qui s’était déroulée à Gênes reste dans la mémoire de tous les ministres de l’intérieur.

    Au vu des conditions de participation de la société civile qui nous sont imposées par l’Élysée, le Réseau action climat a décidé de ne pas participer au G7 ce week-end… Cette décision est une atteinte à la liberté d’expression de la société civile que nous refusons pour ce sommet et pour les suivants”a expliqué la représentante du RAC qui fédère 32 associations nationales et locales (dont la ligue pour la protection des oiseaux).

    Ce que je remarque dans cette déclaration est que ces ONG se considèrent comme les représentantes de la société civile et même qu'elles sont la société civile. Or les ONG écologiques (quel que soit leur bien-fondé) ne représentent et ne sont qu’elles-mêmes. Ce sont des groupes de pression organisés pour la défense de leur point de vue qui n’est pas obligatoirement celui de l’ensemble de la société civile. Les ONG fonctionnent en fait comme des partis politiques, et en général comme des partis d’opposition, mais sans chercher à prendre le pouvoir (pas folles). Elles ne seront évidemment jamais satisfaites des actions gouvernementales. Cette insatisfaction est d’ailleurs leur raison d’être. On ne peut dénier leur rôle de contre-pouvoir, tout en demandant au pouvoir de les subventionner.

    La société civile s’exprime avant tout par les élections, même si le mode électoral introduit des biais dans la représentativité, mais quels que soient ces biais (en dehors des manipulations électorales), il se dégage toujours une majorité plus représentative que les ONG ou les groupes de pression. Les Verts ayant obtenu 13% des voix aux dernières élections européennes, Jadot qui a mené campagne à leur tête s’estime déjà apte à gouverner. Un peu de patience : le fruit est encore vert. La société civile peut aussi descendre dans la rue mais les manifestations n’ont une signification que si elles sont massives, sinon elle ne représentent qu'une petite fraction de la population. Restent les réseaux sociaux, je ne crois pas que ce qui se déverse, le plus souvent anonymement, dans ce tout-à-l’égout soit représentatif de la société civile, il s’agit plus d’humeur que de convictions, seule une fraction de la population les utilise, et à cela s’ajoute la facilité avec laquelle ils peuvent être bidouillés.


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    La musique n’adoucit pas les mœurs 

    Bien sûr, les sérénades, les chansons un peu sirupeuses, ou des mélodies peuvent faire rêver et calmer les ardeurs belliqueuses.

    Bien sûr, on connaît l'action favorable de la musique en matière thérapeutique, utilisée pour renforcer certaines psychothérapies. Action thérapeutique remarquée par les napolitains qui faisaient danser la tarentelle aux victimes du tarentisme, troubles nerveux provoqués par la morsure d'une tarentule. Dans ses Souvenirs entomologiques, Jean-Henri Fabre, qui avait vérifié que la morsure pouvait tuer un moineau ou une taupe, suggère que la transpiration provoquée par la danse pouvait aider à éliminer le poison, et dans ce cas la musique n’y serait pour rien.

    Mais la musique est toujours chargée d’émotions fortes. Les militaires l’ont bien compris, et la musique (ou simplement le tambour) a longtemps été utilisée pour faire marcher les soldats au pas, puis vers la mort. La musique symphonique, elle, n’est pas là pour calmer les esprits mais le plus souvent pour vous prendre aux tripes. La musique dite classique est rarement une musique sereine, et quand un mouvement se permet de l’être, la suite remet les choses dans l’ordre dramatique.

    Quant au rap, la violence et la haine lui sont consubstantielles, elles constituent sa matrice et sa raison d’être. Des paroles aux gestes, il n’y a qu’un pas, et les rappeurs, notamment issus du 93, mais vivant pour la plupart ailleurs, roulent sur l’or tout en exprimant leur révolte contre un monde qui les enrichit. Ils s’insultent entre eux, et vont jusqu’à se battre en utilisant parfois des armes létales. On ne sait jamais dans cette tragicomédie la part publicitaire qui lui revient, le rappeur peut vouloir se rendre authentique auprès de ses fans en jouant la violence dont il fait la promotion. Il s’agit de ne pas décevoir, le rap a une audience considérable (Booba, sur le réseau social Instagram, compte 4,2 millions d’abonnés !). Le rappeur avec sa gueule de voyou (un gage de succès) est d’abord un entrepreneur qui fournit un exutoire à son public, et celui-ci le diffuse à plein volume dans les rues en roulant vitres ouvertes.

    Vous allez me dire que si le rap n’est pas une musique qui adoucit les mœurs, c’est pour la bonne raison que ce n’est pas de la musique. Certes, le rap est en général fait de vociférations rythmées assorties d’images brutales lorsqu’il s’agit d’un clip, mais le parlé-hurlé est un mode d’expression qui s’apparente au parlé-chanté. Ce mode a été utilisé par Arnold Schönberg dans son « Pierrot lunaire » à partir d’une douzaine de poèmes d’un poète belge. Et il fut largement utilisé par des auteurs-compositeurs de chansons comme Léo Ferré ou Gainsbourg. Paix à leur âme, j’espère qu’ils ne se retourneront pas dans leur tombe.

    Illustration de Bernard Buffet


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  • Corrida

    Je n’ai assisté qu’une seule fois à une corrida, il y a bien longtemps, à Barcelone. C’est un spectacle mortifère puisqu’il s’agit d’un jeu cruel entre un homme et un bovidé puissant qui se termine le plus souvent par la mort de ce dernier avant celle du premier. Mais ce n’est pas toujours le cas, le jeu reste ouvert, et c’est peut-être ce qui fascine les spectateurs, cousins lointains de ceux des cirques romains qui assistaient, comblés, à la mort des gladiateurs.

    Le cérémonial peut séduire, mais c’est tout de même celui de la mort. Ce qui révulse est l’action des picadors qui tournent autour du taureau sur un cheval aux flancs protégés en lui plantant des pics dans l’échine. Le sang coule, nappe le pelage, et imprègne le sable de l’arène. Le taureau se défend en cherchant à renverser le cheval et son cavalier. Les picadors ne sont guère appréciés, la torture qu’ils affligent à la bête contraste avec la chorégraphie qui suit où le toréro se met en danger face à elle. Mais si le taureau n’était pas fatigué, le jeu serait inégal, et la bête massive l’emporterait aisément sur l’homme armé d’une simple cape, l’épée ne servant qu’à la fin du spectacle.

    Ce taureau que l’on a choyé pendant plusieurs années va mourir, mais ce n’est pas la mort industrielle des abattoirs au milieu des cris des bêtes apeurées, car après s’être défendu, il sera foudroyé dans une mort instantanée par l’épée du toréro, et restera une seconde immobile sur ses pattes avant de tomber brutalement sur le flanc.

    Je n’ai jamais plus assisté à une corrida. Je n’aime pas que l’on puisse jouer avec la souffrance et la mort. Mais j’ai eu par ailleurs l’occasion d’entrer dans un abattoir et je pense que si le taureau avait conscience, et le choix, il préfèrerait peut-être combattre dans l’arène avant de mourir.

    Les protecteurs des animaux ont pleinement raison d’œuvrer pour que leur soit infligé le moins de souffrance possible. Mais nous sommes amenés à les tuer pour nous nourrir. Et dans le cas où nous cesserions de les tuer pour nous nourrir, nous serions obligés de les tuer (ou d’empêcher leur reproduction) pour nous défendre, qu’il s’agisse de moustiques ou de taureaux.

    Corrida

    Illustrations : Picasso : « La mort du taureau » (1934) / Photomontage dont j'ignore l'auteur (oeuvre figurant dans une exposition consacrée à Denis Robert)


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  • Les tics du langage sont probablement aussi vieux que le langage. Mot ou expression que l’on sort à la moindre occasion de façon appropriée ou inappropriée, et dans ce dernier cas de façon mécanique comme un pet involontaire.

    Si parfois on connaît les circonstances qui ont permis la formation et l’éclosion du tic, le plus souvent on les ignore. Un tic donné a une durée de vie limitée mais qui peut aller jusqu’à plusieurs années. Il disparaît en général lorsqu’un autre est capable de le remplacer en s’introduisant insidieusement chez les individus aux défenses immunitaires abaissées. Il arrive parfois que plusieurs tics coexistent, ce qui rend le contact avec autrui irritant.

    Le tic agit comme un virus, sa contagion se fait par voie aérienne, de bouche à oreille, en empruntant un circuit phono-audio-cérébro-phonique dans sa forme complète. Si le tic peut pénétrer dans tous les organismes, ceux pourvus d’anticorps résistent, et ne contribuent pas à propager l’épidémie car ils enkystent le tic, et ne le rejettent pas à l’extérieur, la phase phonique expectorante étant nécessaire à sa transmission.

    En ce moment je suis soumis à l’attaque récidivante d’un tic qui semble avoir diffusé largement dans les milieux de la restauration, mais pas seulement. Il s’agit du tic : « ça marche ». On ne dit plus oui ou non ou d’accord ou à la rigueur OK, mais : « ça marche », même quand ça ne marche pas. Ainsi quand la personne qui vous sert vous demande : « vous voulez du ketchup ? » et que vous répondez « non », elle réplique : « ça marche ». Bizarre, non ?

    Il faut souligner que ce sont les personnes jeunes qui sont le plus sensibles aux tics du langage. Ce sont également elles qui ont des trous dans leur jean. Est-ce que les trous dans les jeans favorisent la pénétration du virus ? C’est peu vraisemblable car la contagion se fait par le conduit auditif et non par les genoux.

    D’où est sorti ce « ça marche » ? Sans doute que l’expression donne une touche dynamique même si rien ne bouge. Si l’expression était utilisée en cuisine, il n’y a aucune raison pour qu’elle soit utilisée en salle, et dans les entreprises ou ailleurs. On est bien obligé de rapprocher ce tic pédestre de « La république en marche » d’autant plus que le tic est apparu (hors cuisine) – si je ne fais pas erreur – en même temps que les « marcheurs » de Macron qui ont porté leur idole au pouvoir. Ce dernier tic épidémique ne serait donc qu’un dégât collatéral des dernières élections présidentielles. Des études épidémiologiques sérieuses devraient être faites pour évaluer cette hypothèse si l’on veut mettre sur pied des mesures prophylactiques dans l’avenir.


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