• Bouddha-II.JPG

    Les-4-dormeurs.JPGJe me suis aperçu que mes trois derniers articles étaient assez mortifères. Entre le temps qui passe, les propositions amoureuses de Ronsard assorties de l’avenir sombre de la belle qu’il convoite, brossé sans ménagement, le mariage des fantômes chinois, les corps dérobés dans les sépultures dans un but commercial et enfin les déclarations de Hollande tournant autour du pot de la fin de vie, je dois me rendre à l’évidence : les visiteurs qui continuent à venir sur mon blog doivent jouir d’une certaine force de caractère car leur fidélité est mise à rude épreuve.

    Afin de tenter de me faire pardonner et en espérant qu’ils retrouvent un peu de sérénité, je leur offre celle du Bouddha du musée Cernuschi, musée des arts de l’Asie de la Ville de Paris qui se trouve dans le Parc de Monceau, près d’une des entrées (celle du Bd Malesherbes).

    Je m’y suis rendu dimanche dernier pour voir l’exposition « Rêves de laque, le Japon de Shibata Zeshin », artiste du XIXème, et j’ai vu quelques belles œuvres d’une grande finesse et notamment « Les quatre dormeurs », image que j’ai dérobée en catimini avec mon portable.

    Ces dormeurs : Le vieillard, le tigre et les deux enfants, à quoi rêvent-ils ? Le vieillard rêve-t-il de redevenir enfant ? Les enfants rêvent-ils de chevaucher le tigre ? Et le tigre rêve-t-il d’achever le vieillard ?

    Décidemment, je suis incorrigible.


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  • Flanqué de Marisol Touraine (Affaires sociales et Santé) et de Michèle Delaunay (Personnes âgées et Autonomie), François Hollande a récemment visité une maison médicale dédiée aux soins palliatifs (Notre-Dame du Lac à Rueil-Malmaison). Je remarque d’abord que soins palliatifs et fin de vie sont confondus, or palliatif  s’oppose à curatif, et lorsqu’un traitement ne change pas le cours d’une maladie quelconque, il reste palliatif. Ensuite, que les soins palliatifs que nécessite la fin de vie sont de plus en plus assurés dans des lieux qui leur sont spécifiquement dédiés et qui deviennent ainsi des mouroirs. Certes, le personnel soignant est mieux formé pour les assurer, mais le malade ne se fait plus guère d’illusion dès qu’il en franchit le seuil. Ne serait-il pas plus humain de prévoir des équipes volantes spécialisées sans concentrer les lits en un même lieu ?

    Dans les déclarations du président de la République, j’ai relevé  qu’il « s’engage à mettre en place une réflexion pour développer la diversité de l’offre de soins palliatifs en France ». Engager une réflexion, n’engage évidemment à rien. Hollande a également annoncé la création d’une mission de réflexion sur la fin de vie présidée par le Pr Didier Sicard. Encore une réflexion, et ce nouveau président de la réflexion prévoit de mener quelques débats afin « d’accumuler des matériaux de pensée ». Ah ! La jolie formule ! Et « faire en sorte que les Français se saisissent de la question », il est certain qu’il faut beaucoup réfléchir pour trouver la manière dont les millions de Français pourront s’en saisir, d’autant plus que chacun d’eux a probablement une opinion personnelle sur la question.

    Hollande a demandé par ailleurs à Touraine de lancer une réflexion (encore !) sur la tarification et a estimé que « les soins palliatifs ne sont pas le monopole des médecins ». Il est évident que les infirmières sont indispensables, mais si l’on pouvait se passer des médecins pour faire de la médecine, quel bonheur ce serait pour Mr Hollande ! Et « monopole », quel vilain mot quand il s’agit de s’occuper de mourants !

    Enfin, le président de la République a défini le droit de chacun à mourir dans la dignité comme « un droit fondamental », tout en respectant l’opinion des « Autorités spirituelles » « qui affirment ce principe essentiel, respectable, selon lequel tout instant de vie mérite d’être vécu », c’est ce qui s’appelle ménager la chèvre et le chou. Et que veut dire ce « mourir dans la dignité » que l’on rabâche sans cesse ? Les soignants respectent toujours la dignité des mourants, font en sorte qu’ils souffrent le moins possible, assurent leurs soins de propreté et cela fait longtemps que l’on n’impose plus de traitement que l’on sait inefficace. Une maladie terminale transforme et diminue toujours l’être humain, il n’en devient pas pour autant indigne. Si l’on veut éviter cette transformation et ses conséquences, il faudrait se suicider avant. Ce qui résoudrait le problème des soins palliatifs. Je sais, cela demande réflexion.


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  • Dans l’article précédent, j’ai mis en ligne un poème de Ronsard où il engageait une belle à l’aimer avant que sa beauté s’en aille et que la mort vienne.

    zao-wou-ki-nu-deboutLes Chinois répondent à leur façon au poète des princes et au prince des poètes en montrant que la mort peut réunir un  couple et non le séparer. En effet, si un membre d’une famille chinoise meurt prématurément en restant célibataire, une tradition vieille de 3000 ans, surtout répandue dans le nord de la Chine, engage à lui chercher un conjoint aussi mort que lui avec lequel il pourra être enterré tout en convolant en des noces post-mortem, donnant l’occasion d’une double cérémonie : le mariage de fantômes. Les fantômes n’étant plus solitaires, la famille peut renouer avec la bonne fortune. Encore faut-il trouver un conjoint adéquat dont le prix peut être élevé pour des paysans modestes. Une jeune fille morte qui n’avait jamais rencontré son « époux » a été achetée pour l’équivalent de 4200 euros, mais des pilleurs de tombes ont rapidement profané sa sépulture et son corps revendu pour un autre mariage de fantômes dans une autre province. Cependant, cette triste histoire se termine bien car le corps dérobé a été retrouvé et rendu à son « époux » légitime. Le prix des dépouilles féminines fraiches ne cessent de grimper, suscitant des vocations de pilleurs de tombes organisés en réseaux dans le commerce lucratif de cadavres. Ce qui nous entraîne bien loin de la poésie. [The Economist, Londres]

    Zao Wou-ki : « Nu debout »


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  • Orsay-horloge.JPG

    Les horloges et les montres sont agaçantes. En les regardant, le temps semble tourner en rond, il revient toujours à son point de départ, comme si rien ne s’était passé, une remise perpétuelle du compteur à zéro. Elles font croire que le temps fait du surplace, qu’il tourne simplement sur lui-même sans s’écouler, mais en nous rappelant que c’est nous qui coulons après avoir fait un petit tour.

    Le sieur Pierre de Ronsard  le disait de façon plus élégante. Plus élégante, certes, mais aussi plus intéressé car c’était sa façon mortelle de draguer.

    Le temps s’en  va, le temps s’en va, ma dame ;

    Las ! le temps, non, mais nous nous en allons,

    Et tôt serons étendus sous la lame ;

    Et des amours desquelles nous parlons,

    Quand serons morts, n’en sera plus nouvelle.

    Pour c’aimez-moi cependant qu’êtes belle.

    Derrière l’horloge du musée d’Orsay


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  • dieuAu mois de décembre 2011, Le Point titrait : questions et réponses sur l’existence de Dieu. Avoir des réponses sur un tel sujet était un peu outrecuidant.

    Le Point du 12 juillet 2012 pose une nouvelle fois cette question rémanente (depuis plusieurs millénaires) qui fait fleurir les marronniers plus d’une fois par an : y a-t-il un Dieu ? Mais sans oser offrir des réponses comme en décembre dernier, par contre le titre Dieu--2-.JPGannonce de nouvelles avancées (sic) qui seraient fournies par la science (re-sic) et la philosophie. Bien que n’ayant pas lu ce dossier et ne connaissant ni la teneur de ces nouvelles avancées (ce qui laisse supposer qu’il y en avait d’anciennes), ni les arguments scientifiques (le seul à prendre en compte, me parait être que Dieu est une expérience reproductible puisqu’il y a plusieurs religions qui s’y réfèrent, mais le nombre d’observateurs à leur origine est singulièrement réduit), j’ose suggérer que Dieu existe pour ceux qui y croient et qu’il n’existe pas pour ceux qui n’y croient pas et que pour ceux qui ne savent que croire, je les invite à méditer sur la saillie de Woody Allen : « si Dieu existe, j’espère qu’il a une bonne excuse ».


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  • Le jardin de plantes de Paris n'est pas un jardin mais pour l'essentiel une vaste pelouse, et les plantes exubérantes sont confinées à l'étroit dans des serres.

    Le paradoxe de la galerie de l'évolution est que pour montrer la fabuleuse histoire de la vie sur Terre, elle ne peut exposer que des êtres inanimés et morts, animaux imités ou empaillés ou des squelettes monstrueux, armatures ajourées enfermant le souvenir des entrailles. Et pourtant ces milliers de spécimens, du plus minuscule au plus gigantesque, donnent une idée du prodigieux élan vital qu'il a fallu pour créer cette profusion de formes, ce festival de couleurs, ce foisonnement d'organismes qui semblent sortis d'une imagination délirante mais qui fonctionnent ou qui ont fonctionné, en inventant des solutions pour survivre auxquelles l'intelligence humaine n'aurait même pas pensées. Créations lentes, générations après générations, de trouvailles pour se défendre contre les autres, puisque la vie pour vivre dévore la vie. Des innovations impensables, inattendues, bizarres, pour ne pas dire ridicules, comme celle du requin-scie ou du poisson-scie, la tête armée d'un long pieu hérissé de denticules acérés sur chacun de ses bords. On reste stupéfait que l'évolution ait pu ainsi inventer tant de choses et retenir l'innovation adéquate pour les générations suivantes. Hallucinant.

    G-evolution-1.JPG

    G-evolution-4-especes-disparues.JPGUne horde d'animaux les plus divers, menée par un éléphant, semble se déplacer au milieu de la grande salle, évoquant la horde des animaux imaginaires, menée par un mammouth, et fuyant les catastrophes naturelles des films d'animation de « L'âge de glace ».

    Cette photo sombre – et elle peut l'être - montre l'entrée d'une galerie particulière, celle des espèces disparues ou en voie de disparition. C'est une galerie de fantômes. Certains de ces disparus étaient magnifiques comme le tigre de Chine. On défile comme dans un cimetière en regardant les épitaphes d'une dramatique simplicité : «  Untel, en voie de disparition » ou « Untel, espèce éteinte » et comme l'a dit un de mes petits-fils qui nous accompagnait : « éteinte. Un point c'est tout. Poignant... ». Mais toutes les espèces sont destinées à se transformer et à disparaître (mais l’homme a maintenant sa part de responsabilité). A force de les voir passer, la Terre ne reconnaît plus les siens.

    La galerie de l’évolution

    En sortant, un peu d'optimisme en voyant les nuages blancs colorés en rose par la verrière d'une serre.


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  • Chacun sait que les occidentaux ont perdu la guerre d’Afghanistan. Une défaite qui vient après celles (deux) des Anglais au XIXe siècle et celle des Russes au XXème. Le « gouvernement » afghan actuel avec à sa tête  Hamid Karzaï l’Ambigu, cherche à sauver ses billes en négociant avec les talibans (l’OTAN le fait également). Après dix ans de présence occidentale, le président mis en place par les Américains n’a trouvé rien de mieux pour faire progresser son pays (selon nos critères) que d’appuyer la plus haute autorité religieuse, le Conseil des oulémas, lorsque celui-ci a édicté que « l’homme est fondamental et la femme secondaire » [source Le Monde.fr].

    Selon une ONG, 87% des Afghanes auraient subi des violences qui vont jusqu’à l’exécution sommaire pour adultère, surtout dans les campagnes car dans les grandes villes avec la présence des occidentaux des progrès auraient été faits (dans la tête des Afghans mâles ? J’ai comme un doute). Lorsque les troupes de l’OTAN partiront que croyez-vous qu’il se passera dans un pays où il est évident que « l’homme est fondamental et la femme secondaire » ?

    Qu’à cela ne tienne, « la communauté internationale a promis dimanche à Tokyo 16 milliards de dollars d’aide sur 4 ans à l’Afghanistan. Mais elle a assorti cette promesse d’une série de conditions à respecter par la partie afghane, dont la promotion des droits de la femme fait partie. ». Défense de rire ou de pleurer ! Somme conséquente qui permettra d’arrondir les fins de mois des hommes encore au pouvoir avant qu’ils ne prennent la fuite avec leur magot, le reste permettra d’armer les talibans lorsqu’ils y parviendront (les Américains en ont déjà l’expérience puisqu’ils ont armé les talibans contre les Russes). Il y a des illusions qui coûtent cher.


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  • Il y a 50 ans Adenauer et De Gaulle avaient scellé à Reims la réconciliation de la France et de l’Allemagne déchirées par trois guerres meurtrières en 75 ans, c'est-à-dire le temps d’une génération. Le général avait déclaré devant Mgr François Marty : « Excellence, le chancelier et moi-même venons dans votre cathédrale sceller la réconciliation entre la France et l’Allemagne ».

    Aujourd’hui Angela Merkel et François Hollande ont pénétré dans la cathédrale à la suite d’une procession de curés pour s’asseoir dans le chœur et écouter – ma foi – une belle musique de Bach (un extrait de la « Passion selon Saint-Jean »).

    Je comprends que les dirigeants d’aujourd’hui aient voulu imiter le cérémonial suivi il y a 50 ans. Mais je me pose la question : en quoi une cérémonie religieuse (l’aval de l’au-delà, en quelque sorte) était-elle nécessaire, aujourd'hui comme hier, pour sceller ou commémorer un acte politique entre deux Etats laïques  et en présence de prêtres qui n’ont jamais manqué de bénir, de part et d’autre, les canons destinés à mettre en pièces les créatures de Dieu ?


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  • UN GÂTEAU FAIT AVEC AMOUR. Dans une maternité de la ville de Nankin, 10% des parturientes repartent avec leur placenta après l’accouchement car manger son placenta est une pratique séculaire de la médecine traditionnelle chinoise. En déguster régulièrement (de préférence dans une soupe) est en effet censé lutter contre le vieillissement et prolonger la vie. Les ventes en pharmacie de gélules de placenta en poudre marchent très bien et la forte demande a créé un marché noir florissant impliquant le personnel accoucheur et les accouchées. [Allodocteurs.fr]. J’hésite néanmoins à conseiller aux femmes en âge de procréer qui se seraient égarées sur mon blog (il faudrait qu’elles soient complètement perdues) de partir avec leur placenta sous le bras après leur prochain accouchement.

    GELULES - SURPRISES. Des trafiquants honnêtes mettront dans les gélules du vrai placenta dérobé, mais les surprises sont toujours possibles. Il a été récemment découvert que 77 millions de gélules ont été fabriquées en Chine avec un gel industriel contenant du chrome, un métal lourd cancérigène et toxique pour l’homme. Avouez qu’il est préférable d’avaler du vrai placenta, même en soupe. Si la Chine est un des principaux pays producteurs de médicaments contrefaits[1], l’ennui est qu’elle est aussi parmi les premiers producteurs de génériques. Au cours du mois de mai un journal chinois aurait annoncé que 254 fabricants chinois de produits pharmaceutiques, soit 12,7% de l’industrie pharmaceutique du pays, produisaient des gélules impropres à la consommation. [LeHuffingtonpost.fr]

     

    Yue Minjun

    Yue Minjoun



    [1]Dont le commerce aurait rapporté en 2010 la bagatelle de 75 milliards dans le monde, et il serait ainsi 25 fois plus lucratif que la vente de la drogue tout en étant moins dangereux pour les trafiquants.


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  • Le-chat-Geluck-ennuis.jpgUn jeu fait fureur dans les sphères dirigeantes. Il s’agit pour chacun des participants de ne prononcer dans leurs discours, les débats, les interviews, ni le mot « rigueur », ni le mot « austérité ». Celui ou celle (parité oblige) qui fera un « sans faute » aura le droit, au choix, soit à une voiture de fonction supplémentaire (ou un vélo s’il s’agit d’un ou d’une écologiste), soit un ministre délégué (masculin, féminin ou trans) de plus.
     
    Dessin de Philippe Geluck
     

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