• 227. Sur l’émission TV : « Cholestérol, le grand bluff »

     

    Il y a pas mal d’années, j’ai reçu à Paris une de mes cousines qui vivait aux USA. Au restaurant le couple américain ne regardait le menu que pour me demander le contenu en cholestérol de chacun des plats et non pas si ceux-ci étaient mal ou bien cuisinés dans ce restaurant. Ce fut pénible pour moi et ridicule pour eux. A l’époque (et probablement aujourd’hui encore) les Américains étaient quotidiennement matraqués et mis en garde contre l’ennemi public n°1 : le mauvais cholestérol.

    Dans ce blog figurent dans la rubrique « Questions médicales » huit articles, rédigés en 2008, consacrés à ce fameux cholestérol, les deux derniers articles étant intitulés : « Sur le cholestérol 7 : omerta » et « Sur le cholestérol 8 : conclusion ». A la relecture, ils ne me semblent pas trop dépassés.

    Il y a toujours eu des opposants au rôle donné, en particulier Outre-Atlantique, à l’élévation du cholestérol sanguin comme facteur de risque à l’origine des maladies cardiovasculaires par rapport au rôle du tabac, de l’hypertension artérielle, de la sédentarité, ou du diabète, jusqu’à dire, pour certains, que le cholestérol n’a aucun rôle significatif et que l’abaisser quand il est élevé est inutile.

    Hier soir sur Arte, l’émission « Doc santé » avait comme titre et sujet : « Cholestérol, le grand bluff ». Un titre « coup de poing » dont les médias raffolent. J’ai vu l’émission (en avant-première sur Libération.fr).

    Les intervenants ont dit des choses qui me paraissent justes et dont j’ai déjà parlé dans ce blog (voir 128. "Du gras à moudre") :

    - La peur instillée par les médecins (surtout américains) par une propagande disproportionnée jusqu’à être ridicule.

    - La tendance des sociétés savantes à abaisser les normes (« plus c’est bas, mieux c’est »), ce qui fait entrer en pathologie des gens qui étaient considérés comme normaux auparavant.

    - Les discordances observées (notamment en France) entre le taux de cholestérol et ses conséquences.

    - Les études financées par les laboratoires pour démontrer à la fois la nocivité du cholestérol et l’intérêt de leurs médicaments.

    - L’expansion d’une industrie agro-alimentaire basée sur le phénomène.

    - Les intérêts financiers colossaux mis en jeu qui auraient conduit à décourager les études qui n’iraient pas dans le même sens.

    La conclusion de ce documentaire fut, pour schématiser, que : l’élévation du cholestérol (« le mauvais ») n’a guère d’importance, et que la prescription des statines (les médicaments les plus efficaces pour abaisser son taux) sont non seulement inutiles, mais susceptibles de provoquer fréquemment des maladies.

    Médiatisation oblige : il s’agit « d’un grand bluff », alors tout en disant des choses justes, on finit par dérailler.

    D’abord les journalistes n’ont interrogé que des médecins qui s’opposent au rôle donné à l’hypercholestérolémie. Aucun n’avait été sollicité pour défendre la position majoritaire. Curieux et suspect.

    Les intervenants ont admis que dans les études initiales les statines avaient abaissé de 30% la proportion des maladies cardiovasculaires et même la mortalité globale. Mais ils laissaient entendre que dans la mesure où elles avaient été financées par des laboratoires, les résultats devaient être faux. Mais sans aucune preuve à l’appui de cette thèse. Nos intervenants ont affirmé de surcroît que l’effet favorable des statines n’avait jamais été retrouvé par la suite. Ce qui est faux, les études qui ont suivi (dont une récente) continuent à constater l’effet favorable des statines.

    Reste la nocivité de ces médicaments. Les effets secondaires existent, bien entendu, je ne connais pas de médicament efficace sans complications possibles. Pour les statines, les effets parfois observés sur les muscles et la régulation du sucre dans le sang sont certains, mais le tableau cataclysmique décrit dans cette émission, notamment sur le système nerveux, tient plus du grand guignol que de l’objectivité.

    Une émission sans nuance et sans objectivité par amour du sensationnalisme, mais qui va peut-être faire des ravages. (voir ICI)

    « PalettesUne sensibilité à fleur de peau »

  • Commentaires

    1
    Mercredi 19 Octobre 2016 à 20:08

    Vous avez raison, cette émission va faire des ravages, les gens vont répéter jusqu'à plus soif tout ce qu'ils ont entendu à la télé ( çà ce sont  des paroles d'évangile). Ma cardiologue m'a conseillé de prendre des gélules de  riz rouge, cela a été efficace, il a baissé! Les patients ne savent plus à quel  saint se vouer!

      • Mercredi 19 Octobre 2016 à 20:58

        Une étude bordelaise a montré les conséquences possibles d'un arrêt intempestif du traitement par les statines. ICI

    2
    Souris donc
    Mercredi 19 Octobre 2016 à 22:36

    Je suis d'une puérité totale. Quand je vais faire mon bilan annuel, je suis stressée avant pendant et après. Je refuse qu'on me communique les résultats, je n'ouvre pas l'enveloppe. Et même je la planque. Car ce qu'on ne voit pas n'existe pas. Le généraliste me convoque quand il y a un problème. Je crains le corps médical comme la peste. Je les fuis, et ne vais les voir que sous la contrainte (renouveler mes lentilles, dentiste...). Et quand les résultats sont convenables, je sacrifie et apporte un poulet millésime à l'Esculape qui m'a donné son bon oracle pronostic. Grotesque, je sais. Confiance est bien, méfiance est mieux (Mao).

      • Mercredi 19 Octobre 2016 à 23:16

        La politique de l'autruche est très répandue, plus fréquente chez l'homme que chez la femme et plus fréquente, me semble-t-il, chez les médecins que chez les autres. L'ignorance est mère de la sérénité. Les examens ne font pas naître la maladie, elle existait déjà. Mais lorsque l'on n'a aucun symptôme, découvrir une maladie par des examens systématiques est une espèce de trahison.

    3
    Souris donc
    Jeudi 20 Octobre 2016 à 09:22

    C'est déjà pas moi qui fais monter l'audimat d'une émission sur le cholestérol, même avec George Clooney dans le rôle-titre. Je n'ai jamais compris le succès des séries médicales, je préfère encore directement le film d'horreur. Michel Cymes, l'animateur préféré. Mais par qui ? Y a-t-il tant d'hypocondriaques en France ?

      • Jeudi 20 Octobre 2016 à 09:51

        Je suis également étonné par ce succès. J'hésite entre hypocondrie et masochisme. Je ne regarde évidemment pas les émissions médicales car j'aurais tendance à m'énerver, surtout quand il s'agit de la médecine de "divertissement" : voir "135. Dr House". Pour l'émission sur Arte, il s'agissait d'un documentaire sur un sujet qui m'intéressait.

    4
    Jeudi 20 Octobre 2016 à 20:57

    La plupart des plats qui contiennent du mauvais cholestérol est délicieuse.

      • Jeudi 20 Octobre 2016 à 22:33

        C'est exact. Il faut y voir la main de Dieu pour que les humains ne s'attardent pas trop sur cette terre, mais il a néanmoins fait de la gourmandise un péché. Ses desseins sont impénétrables...et contradictoires.

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