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    Le poids des amours

     

    Depuis 2008, les couples amoureux ont pris l’habitude de fixer des « cadenas d’amour » sur le grillage (lorsqu’il existe) des parapets des ponts de Paris, et de jeter la clef dans la Seine pour marquer symboliquement l’indéfectibilité de leur union. La conséquence est que les ponts risquent de mal supporter le poids de ces amours. Un pan du grillage du pont des Arts s’est d’ailleurs effondré en juin dernier apparemment plus fragile que les sentiments de fer exprimés par ces couples.

    A partir du 11 août, la mairie de Paris compte inciter les couples à remplacer les cadenas par des selfies, les couples se photographiant sur le pont et diffusant cette photo mémorable de leur amour sur un site spécialement créé pour l’occasion : lovewithoutlocks.paris.fr – ou sur Twitter, avec le mot-dièse #lovewithoutlocks. La mairie envisage également de supprimer les grillages. Radical mais plus efficace.

    Ce qui m’intrigue, c’est que l’on puisse symboliser un amour par un cadenas, symbole d’enfermement, de lien que l’on ne peut rompre même si l’on désire se libérer, la clef jeté dans la Seine la rendant introuvable. Cadenas et clef évoquent la ceinture de chasteté du Moyen Âge. Envisager l’amour comme une prison est déjà mauvais signe. On rejoint ici le mariage catholique : l’union jusqu’à la mort et l’interdiction du divorce. A l’époque où nous vivons, où la moitié des couples se séparent lorsqu’ils sont mariés, où beaucoup ne se lient même pas par le mariage, la pose de ces cadenas me semble plus tenir du jeu que de la passion.

    Quant à se photographier soi-même, en couple, c’est plutôt sympathique. Par contre le besoin égocentrique de montrer ses bobines accouplées au monde entier semble oublier que pour vivre heureux, il faut vivre cachés. (voir l’ article précédent « Selfies »)

     


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  • Je trouve déprimante la mode qui consiste à se photographier soi-même – ce que permet, et en toute circonstance, le téléphone portable, organe inévitable qui fait maintenant partie de l’organisme de chaque individu - puis à l’envoyer sur les réseaux dits sociaux afin que chacun sur la planète puisse contempler la pauvre tronche ou la fesse rebondie de nombrilistes patentés.

    Ces selfies, plus joliment dénommés « egoportraits » au Québec, sont l’indice d’une étrange satisfaction de soi ou peut-être d’une misère d’être. J’hésite. C’est un exhibitionnisme du vide qui s’apparente à celui du pervers qui prend plaisir à ouvrir son imperméable dans la rue pour montrer son sexe aux enfants qui passent. Le vide égocentrique est parfois entouré d’un évènement que le « selfieur » tient à photographier, non pas pour l’évènement lui-même, mais pour montrer qu’il y était.

    Si les selfies sont une manière de certifier au monde, mais de façon fugace et ridicule, que l’on existe quelle que soit sa médiocrité, les peintres, eux, ont laissé par leurs autoportraits la trace d’eux-mêmes, de leur talent ou de leur génie, à travers les siècles.

    A cet égard, c’est peut-être Rembrandt qui nous a offert le plus d’autoportraits exécutés à tous les âges de sa vie et dont je reproduis ici quelques uns :

    A 24 et 23 ans :

     

     

    Selfies

    Selfies

     

    A 34 ans :

     

    Selfies

     

    A 44 ans :

     

    Selfies

     

    A 54 ans :

     

    Selfies

     

    A 63 ans, l’année de sa mort :

     

    Selfies

     

    Mais l’autoportrait le plus terrible que je connaisse est celui de Picasso qui date de 1972, l’année qui précède celle de sa mort :

     

    Selfies

     


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  • Quand on parle de croissance et de décroissance, c’est immédiatement à l’économie que l’on pense. Le monde est dominé par les impératifs économiques, bien qu’ils soient aujourd’hui mâtinés d’une dose toxique de religion. Tous les pays s’essoufflent à rechercher la croissance comme les chevaliers de la Table ronde à la recherche du Graal. Certains écologiques prônent au contraire la décroissance pour économiser les ressources de la planète.

    Non, mon propos n’est aucunement économique, il serait plutôt onéreux. Quand je parle de croissance, je songe pudiquement à celui du sexe masculin. Je viens d’apprendre (Atlantico.fr) que 15414 opérations d’agrandissement du pénis ont été effectuées à travers le monde (de 3 à 6 cm pour la longueur et éventuellement de 2 à 3 cm pour le diamètre).

    Et c’est là que je retombe sur mes pieds en rejoignant l’économie : c’est l’Allemagne qui arrive en tête pour la croissance phallique puisqu’une opération d’agrandissement du pénis sur cinq a été réalisée outre-Rhin, la somme à débourser s’élevant à 9600 €. Le Venezuela et l’Espagne, puis le Mexique et la Colombie arrivent derrière, l’Iran est en dixième position. Mystère : la France n’est pas citée dans le classement de l’étude publiée par « International Society of Aesthetic Plastic Surgeons ». Les Français sont-ils satisfaits de leurs attributs ou ont-ils renoncé à toute croissance ?

    Parlons maintenant de décroissance. Que mes frères masculins ne s’inquiètent pas, il ne s’agit pas d’amputer un appendice auquel ils sont très attachés. La décroissance dont je veux parler concerne le sexe féminin ou plus précisément de ses lèvres. Un groupe britannique de chirurgie esthétique a révélé que le nombre de demande de labiaplastie a progressé de 45% au cours des quatre dernières années. « Ainsi, [en Grande-Bretagne] 3 500 interventions visant à remodeler le dessin des lèvres vaginales sont désormais réalisées chaque année, dont 1 150 concernent des jeunes femmes de 18 à 24 ans ». Cette tendance existe également aux USA.

    Les prétendues imperfections de ces lèvres paraissent plus visibles avec la mode de l’épilation intégrale. Les perfectionnistes recherchent l’esthétique vulvaire des très jeunes filles ou s’inspirent de modèles révélés par les films pornographiques. Comme toute décroissance, celle-ci n’est pas sans risque car outre des infections possibles, des douleurs lors des rapports peuvent parfois gâcher le plaisir de la contemplation.


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  • Gaston Flosse est président et sénateur de la Polynésie. Il a toujours été élu malgré ses malversations connues de tous et notamment de ses électeurs. Cette fois il est condamné en cassation et devrait donc se démettre de tous ses mandats.

    La manœuvre suivante montre à quel point le bonhomme est habile : il sollicite la grâce présidentielle. Il est peu probable qu’il l’obtienne, mais une demande de grâce nécessite une instruction qui suspend l’exécution de la décision. Et pendant le temps de l’instruction, Gaston continuera à percevoir les émoluments attachés à ses fonctions, c'est-à-dire la modique somme de 20000 € par mois !

    On peut s’étonner qu’un individu aussi visiblement malhonnête ait été régulièrement réélu. Mais ce n’est pas le seul, et sans doute est-il habile dans d’autres domaines et notamment dans celui à satisfaire sa clientèle. Ce qui m’étonne, pour ma part, est l’appétit d’argent dont fait preuve ce vieillard dont les années à vivre sont comptées.

    Dessin de Geluck


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  • Devant la progression de la maladie au virus Ebola en Afrique de l'Ouest, la présidence libérienne a décrété "Trois jours de jeûne et de prière de mercredi à vendredi de 6h à 18 h pour implorer la protection divine contre l'épidémie"

    Devant l'impuissance humaine, la démarche habituelle des croyants est de se tourner vers Dieu pour appeler son intervention. Mais la question qui se pose est : pourquoi un Dieu tout puissant permet-il que des maladies viennent décimer ses créatures ? Les religions interprètent les épidémies soit comme une épreuve, soit comme une punition. Cette idée de maladie-punition était omniprésente dans le passé, notamment dans la chrétienté où l'Homme est né coupable. Mais cette conception reste encore vivace de nos jours.  

     Un Tireur d'élite

    Dans l'Iliade, pour punir Agamemnon d'avoir enlevé la fille d'un prêtre et refusé de la rendre, les flèches d'Apollon frappent le camp grec et répandent une épidémie.

    Saint Grégoire parle de flèches tombant sur Rome pendant la première pandémie de peste du VIe siècle

    La peste du XIVe siècle tua près de la moitié de la population de l'Europe. Touchant tous les milieux sans distinction de rang ou de fortune, elle a semblé longtemps être l'expression du courroux divin. Des flèches venant du ciel et touchant l'homme, symbolisaient la maladie envoyée comme punition divine. Au XVème, des tableaux représentant les hommes frappés par cette maladie montrent des flèches atteignant l'aine ou l'aisselle, là où apparaissent les bubons. Dieu lançant des traits fût par la suite remplacé par un intermédiaire plus anonyme : la Mort  troquant sa faux contre un arc et des flèches et entraînant les pestiférés dans une danse macabre. La maladie comme punition divine lui donnait un caractère cosmique expliquant l'impuissance des médecins face aux forces surnaturelles.

     Tous coupables

    Tous les moyens étaient recherchés pour amadouer le Ciel : prières, processions, pénitences et flagellations. Lors de la peste du XIVème, des centaines d'hommes et de femmes venant d'Aix-la-Chapelle exécutaient jusqu'à épuisement une danse de Saint Guy sur la place publique, et allaient de ville en ville : Cologne, Metz et Erfurt, entraînant les spectateurs dans leurs convulsions frénétiques. La Confrérie de la Croix arrivant de Hongrie, traversait l'Europe, les frères tête couverte et yeux baissés, portaient des costumes sombres avec une grande croix rouge sur la poitrine. Ils exécutaient en public, deux fois par jour, des flagellations avec des fouets à triples lanières terminées par des pointes de fer. Leur venue était annoncée par des sonneries de cloches. La compagnie continuait sa tournée de ville en ville à moins que la peste de la décime.  Ces démonstrations impressionnantes étaient toutes inefficaces. Les hommes d'Eglise s'efforçaient de déterminer le péché responsable. Il variait selon les pays. On incriminait l'impiété, l'opéra ou le théâtre ou les habits trop voyants ou les longs souliers pointus, attribuant à Dieu des préoccupations pour le moins frivoles.

    Curieusement dans la conception religieuse de la maladie, c'est toujours  Dieu qui punit pour le péché et le diable n'intervient que pour la maladie mentale. Satan offre plutôt la santé et la jeunesse contre l'âme. L'âme serait-elle pathogène ?


    "La procession des flagellants" de Goya

     Des malades au bûcher

    Pour se préserver de la lèpre pourtant peu contagieuse, les moyens ont été parfois radicaux. La crécelle permettait aux lépreux de signaler leur présence afin que l'on s'en écartât.  Les religions, prêtres et fidèles, considéraient également la lèpre comme une punition divine. Au XIVe siècle, les lépreux, accusés d'avoir empoisonné les puits, ont été exterminés. En 1321, restée dans les mémoires comme l'année de la crémation des lépreux, l'archevêque de Lyon en fit brûler un grand nombre.  Le roi Philippe V le long en profita pour confisquer leurs biens. Au XVIe siècle, alors que la lèpre devenait plus rare, certains se faisaient passer pour lépreux afin de ne pas travailler et ne pas payer d'impôts. Quelques établissements devinrent des lieux de vices et d'orgies transformant les bordes (cabanes de lépreux) en bordels[1].

    Des malades soumis aux châtiments corporels

    A la fin du XVe siècle apparaît brusquement la grande vérole lors de l'invasion de l'Italie par Charles VIII. Elle se répand à grande vitesse et ravage toute la planète, comme la pandémie de sida actuelle. On n'en connaît absolument pas l'origine,  chaque peuple en accusant un autre, mal français pour les Italiens, mal napolitain pour les Français, mal des Francs pour les Arabes, mal portugais pour les Chinois, mal chinois pour les Japonais et mal des Indiens d'Amérique pour beaucoup, sans la moindre preuve, uniquement parce que l'épidémie est contemporaine du voyage de Christophe Colomb.

     C'est l'Italien Jérôme Fracastor qui identifie la vérole, la baptise syphilis, affirme la contagion par voie sexuelle et conseille  le mercure qui restera le seul traitement jusqu'au XXe siècle.

    Les malades ont été longtemps dénoncés, isolés, stigmatisés, culpabilisés et parfois punis. A Bicêtre, ceux que l'on estimait coupables étaient flagellés. Dès 1496 les étrangers atteints devaient quitter Paris sous peine de pendaison, les syphilitiques devaient quitter Edimbourg sous peine d'être marqués au fer rouge, et sous Louis XIV les prostituées trouvées dans la ville de Versailles risquaient de perdre leurs oreilles.

    Avec la pénicilline la maladie semblait vaincue car un traitement précoce la guérit sans séquelle. Depuis 2000 la syphilis est de retour, favorisée par la multiplication des partenaires et l'abandon du préservatif.

    Régulation divine de la démographie

    La croyance dans l'intervention de l'Au-delà dans la maladie n'est pas l'apanage du Moyen-Age. La transmission du choléra se faisant par l'eau, les aliments souillés, et le contact manuel avec le porteur du vibrion cholérique de Koch, elle atteint de préférence les pauvres vivant nombreux dans des espaces étroits. Lors de l'épidémie de 1832 à Paris, certains dirent qu'il s'agissait d'une divine providence, permettant d'absorber l'excédent de population par rapport aux moyens d'existence.

    La maladie reste une punition

    De nos jours, lorsque l'avortement était clandestin, certains considéraient que la mort d'une avortée était une juste punition, et on n'a pas manqué d'affirmer que la pandémie du sida était une punition divine frappant les tenants de la libération sexuelle. Dans l'esprit de tous et même dans celui des médecins, ne pense-t-on pas implicitement que les maladies provoquées par l'alcool, le tabac, les drogues punissent ceux qui se sont rendus coupables d'avoir cédé à leurs penchants. Inversement, combien de malades ne comprennent pas qu'ils puissent l'être, ne s'étant livrés à aucun écart et commis aucune faute, ayant suivi la prévention ou le traitement à la lettre et ressentent la maladie comme une punition injuste, d'autant plus injuste que le voisin intempérant reste, lui, en bonne santé.


    [1] W. Hansen et J.Freney, Bulletin de la Sté Française de microbiologie, fév 2003


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  • L’épidémie la plus grave de la maladie à virus Ebola progresse actuellement en Afrique de l’Ouest (Guinée, Sierra Leone, Libéria). Le risque que cette épidémie touche la France est faible. Néanmoins, il n’existe actuellement aucune restriction pour les voyages vers les pays où sévit l’épidémie et au retour.

    Récemment Mme Touraine a déclaré : “La France a les moyens de faire face à Ebola mais doit être vigilante”. Soyons vigilants.

    Comme il n’existe aujourd’hui aucun vaccin et aucun traitement contre cette maladie, dont la mortalité peut atteindre les 100%, les moyens dont parle sans doute la ministre de la Santé ne peuvent se borner qu’à des mesures prophylactiques visant à limiter la contagion en isolant les malades, et à éviter d’entrer en contact avec leurs matières organiques et leurs fluides corporels.

    Actuellement pour les voyages aériens les précautions prises visent essentiellement à dépister les personnes déjà atteintes, soit au depart, soit pendant le vol, Air France ayant équipé leurs avions du materiel nécessaire pour assurer la prophylaxie de la maladie.

    Fort bien. Mais un vol depuis les zones épidémiques ne dure que quelques heures, or la Fièvre hémorragique à Ebola a une durée d’incubation qui peut varier de 2 à 21 jours (4 à 9 jours en moyenne). Un porteur du virus peut donc n’avoir aucun signe de la maladie pendant le voyage et le transmettre ultérieurement à son entourage une fois la maladie declarée. Mais c’est vrai que nous avons les moyens d’éviter qu’elle ne se répande et attendre que la maladie s’éteigne avec les malades (ce qui a été le cas des épidémies antérieures).

    Certaines compagnies aériennes ont préféré supprimer leurs vols vers l’Afrique de l’Ouest. Les lâches.


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  • Les replis de la mémoire

    Si la deuxième guerre mondiale fut en Europe une nécessité pour abattre le nazisme et le fascisme imposés par la folie de quelques hommes, la première fut une boucherie parfaitement inutile. Les commémorations se succèdent. S’il est important que leurs descendants rendent hommage à la mémoire des sacrifiés sur l’autel de l’aveuglement des dirigeants et de la bêtise des généraux de l’époque, commémorer à répétition les évènements désastreux de la « Grande Guerre » tient du masochisme.

    Hier ce fut la commémoration de l’assassinat de l’archiduc d’Autriche-Hongrie à Sarajevo, motif avancé du conflit, aujourd’hui celle de l’invasion de la Belgique par le Allemands. Sur l’invitation du roi des Belges douze chefs d’Etat – dont Hollande - sont attendus à Liège pour « fêter » ce désastre.

    Que l’on fête une victoire ou la fin d’une guerre est justifié, mais pourquoi les échecs et les défaites ? L’histoire de l’Europe est riche de ces évènements, et il est à craindre que les hommes ou les femmes d’Etat soient amenés dans l’avenir à passer plus de temps à commémorer qu’à gouverner. Hollande montre l’exemple, et semble se complaire dans ce rôle passéiste où il ne prend guère de risques.

    L’Europe ressasse son histoire jusqu’à la nausée. C’est un indice inquiétant : elle est plus tournée vers le passé que vers l’avenir. L’Europe est vieille et fatiguée et comme les vieillards elle vit plus dans le passé que dans le présent, et ne se projette plus guère vers l’avenir. A cet égard, la France semble être la plus percluse. De commémoration solennelle en commémoration solennelle, elle traîne solennellement son passé comme un boulet, et ancienne puissance coloniale, ses anciennes colonies vont finir par la digérer.

    René Magritte : « Mémoire »


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    Parallèles

     

    Solitude des parallèles alignées

    Cheminant chacune de son côté

    Sans jamais se rencontrer

    Comme deux jumelles fâchées

     

    Peut-être qu’avec patience

    Au bout de l’espace sans fin

    Au bout de leur persévérance

    Se rencontreront-elles enfin

    Mais quand elles se croiseront

    Ce sera dans l’infini leur fin

    Par l’étreinte de l’intersection

     

    J’ai toujours été captivé par les lignes parallèles. Ces lignes qui fuient devant vous en se perdant dans l’horizon lorsqu’elles sont rectilignes. Certaines meurent dans la mer, celles qui bordent les chemins meurent avec eux. Les rails peuvent épouser d’autres rails au gré des aiguillages, mais finissent par mourir dans les gares toujours séparés.

    Un jour un enfant en regardant les rails du haut d’un pont m’a demandé quand et où ces lignes de fer se toucheront. Lui aussi était captivé par les parallèles. Je lui ai répondu : « jamais ».

    Pour les géomètres les lignes parallèles se rejoignent à l’infini. C’est une promesse invérifiable. Une croyance. Et comme je ne suis pas croyant, je lui ai répondu : « jamais ».

    Sans doute ai-je eu tort. La perspective nous donne l’illusion de leur union au lointain, mais ce n’est qu’une illusion d’optique. Par contre,  les mathématiciens et les physiciens d’aujourd’hui trouvent la géométrie Euclidienne bien étroite, et ne se contentent plus des trois misérables dimensions qui encadrent notre vie. Et je ne sais pas si les parallèles ne se rejoignent pas dans le monde des particules. Dans ce monde dont nous sommes intimement faits et pourtant si étrange et si mystérieux : là où on peut être et ne pas être, ou être deux choses à la fois, ou être à deux endroits différents au même moment.

    Alors ne dis jamais jamais.


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