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Morpion
Lorsque vous achetez un livre d’un auteur connu et dont le génie n’est plus discuté, c'est-à-dire quand il est mort, avant de pouvoir le lire, l’éditeur vous inflige les avant- propos d’un (ou de plusieurs) illustre inconnu (enfin, pour moi) qui profite de l’occasion, c'est-à-dire du génie de l’autre, pour s’épancher abondamment dans une prose verbeuse, parfois freudienne et masturbatoire qui n’en finit pas. A titre d’exemple : par hasard, j’ai récemment feuilleté dans une librairie le Spleen de Paris de Baudelaire, édité en 130 pages par Gallimard et précédé par une introduction et une préface, couvrant à elles deux 100 autres pages ! Bien sûr, me direz-vous, pourquoi lire les avant-propos ? D’abord vous les payez et ensuite vous vous dites qu’il y a peut être des considérations intéressantes. Celles-ci, en fait, lorsqu’elles existent, n’occupent qu’un petit espace de la dissertation que vous abandonnez bien vite pour entrer dans l’œuvre elle-même. En tant qu’adulte vacciné vous êtes capable d’avoir votre opinion sans l’aide de l’introducteur qui ne pense qu’à se faire mousser et être enfin lu, accroché au génie de l’introduit comme peut l’être un morpion.
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Commentaires
1soulikoJeudi 28 Mai 2009 à 17:55Les avant-propos ? Je les lis rarement et ceux que j'ai parcourus en diagonale m'ont très vite lassée. Cela me fait penser aux commentaires de textes au lycée, surtout aux poésies. Je suis assez convaincue que les auteurs ainsi malmenés seraient assez surpris de tout ce qu'on arrive à leur fait dire ! J'ai d'ailleurs toujours préféré les dissertations.RépondreIl arrive qu'une notice biographique ou une introduction replaçant l'oeuvre dans son époque ait de l'intérêt pour le lecteur moderne. En revanche, ce qui n'a aucun intérêt ce sont les préfaces parasites du genre de celle que vous décrivez.Une introduction historique peut être intéressante. J'aime la concision, ce qui m'irrite c'est la place prise, presque équivalente à l'oeuvre elle-même, ce qui dénote de la part de l'introducteur plus l'envie d'être publié et surtout d'être lu (grâce au parrain qui le suit) que de rendre service au lecteur.
Dr WOJe suis absolument d'accord et continue à suivre le conseil de mon prof de français de 4ème, Monsieur Bel, (son nom n'a aucune importance mais bon), à savoir que si la préface n'est pas écrite par l'auteur lui-même, elle ne mérite pas d'être lue... Alors certe, je paye des pages que je ne lirai jamais, mais au diable l'avarice, peut être les éditeurs, auteurs, ou autres personnes dont l'identité m'est indifférente, ont-ils besoins de cela comme thérapie, et l'avantage c'est que, contrairement aux diatribes verbales, on n'est pas obligé de les subir...J'approuve, rien de plus ennuyant que ces longues préfaces masturbatoires... L'autre jour j'étais en train de lire "Seconde considération intempestive" de Nietzsche, 73 pages d'introduction paraphrasant le texte de Nietzsche, mais en beaucoup moins bien... Enfin bref, je pense qu'on a tous des exemples de ce genre à raconter.Le pire c'est que je l'ai lu en entier, ce qui fait qu'en abordant le texte de Nietzsche, je n'avais que le point de vue de cet auteur inconnu en tête...Je ne suis pas vraiment d'accord, il arrive sans doute qu'une préface soit ennuyeuse ou dépourvue d'intérêt, mais elle peut aussi constituer une bonne introduction pour une oeuvre difficile. Je suis plus réservée quant aux préfaces "de complaisance" par lesquelles un auteur en vue introduit l'oeuvre d'un autre, bien vivant : ça sent souvent le copinage et le renvoi d'ascenseur.Lorsqu'il m'arrive de lire un avant-propos, je le fais APRES avoir lu l'oeuvre. Je n'aime pas que l'on m'influence.
Dr WOLes avant-propos (que je lis après) peuvent être intéressantes lorsqu'ils évoquent le contexte historique et quand ils s'efforcent d'être brefs sans donner l'impression d'être une oeuvre et de tirer avantage du grand auteur qu'ils prétendent expliquer.
Dr WOConsidérations intempestives! Hé bé. Il y en a encore qui lisent ça. Tout n'est pas perdu!Tout dépend ! Par exemple, la préface du Chevalier de St Hermine est somptueuse.Merci Docteur pour cette piqure de rappel.
Mais parfois il y a aussi de très bonnes préfaces qui offrent de nouvelles visions sur les oeuvres connues.
Bien amicalement.
Dông PhongPourquoi ne pas imaginer des postfaces qui vous montrent ce que vous avez pu manquer dans votre lecture et vous invitent à vous y replonger ?
Certainement, comme vous le démontrez, Dr Who, c'est qu'il faut se mettre en avant et d'autant plus quand on manque de talent.
CordialementLes postfaces, c'est une ecellente idée. C'est d'ailleurs ce que je fais en lisant les avant-propos après.
Dr WOIl y a l'émotion brute de la lecture. Sans intermédiaires, donc.
En revanche, lire, après, les analyses d'autres, j'ai toujours trouvé ça intéressant.
Parce que, quand même, lorsqu'on aime la littérature, jeter avec l'eau du bain les travaux faits autour des oeuvres, je trouve ça un peu prétentieux et, parfois, limite populiste.
Je pense que l'intermédiation entre l'oeuvre et le public n'est pas nécessairement superflue. par exemple, moi qui suis assez nul côté peinture, j'ai apprécié, en allant voir de Chirico au Musée d'Art Moderne de Paris, pouvoir lire des trucs "à propos de".Pour la peinture, ce n'est pas la même chose, car ce n'est pas de la peinture, mais des textes. Là, il s'agit de littérature + littérature et les "explications" prennent autant de place que l'oeuvre elle-même et comme je l'ai dit, je tente de les lire après. Ce qui est populiste et condescendant, c'est de penser que le lecteur n'est pas à même de juger seul l'oeuvre. Il ne s'agit pas de prétention, une grande oeuvre se suffit. Pourquoi devrait-on penser comme un autre ? Et pourquoi imposer son interprétation comme si c'était la seule : c'est ça qui est prétentieux. De la même façon certains metteurs en scène ne sont pas au service de l'oeuvre mais la transforme, au point de la détruire, pour se mettre en avant afin que gens parlent d'eux et en oublient l'oeuvre représentée.
Dr WOCompliqué.
Quand on aime lire, il n'est pas interdit de chercher plusieurs sources d'analyse d'une oeuvre.
Quant au théatre... Qu'est ce qu'une oeuvre "en soi", représentée dans sa pureté originelle? Je ne sais pas. J'ai détesté des modernisations de classiques, j'en ai adoré d'autres. Pour moi, metteurs en scène et acteurs sont certes au service des oeuvres mais aussi des créateurs. Ils proposent. Après, on rejette ou on adhère. C'est le jeu passionnant de la vie culturelle, non?Bien sûr, je ne rejette pas les analyses, mais lorsqu'elles sont publiées en même temps que l'oeuvre, elles doivent rester à leur place, c'est à dire une place modeste. Je crois que lorsqu'un auteur écrit une oeuvre, il faut la respecter, rien n'empêche le "créateur" d'écrire une oeuvre lui-même. Reste, et là je suis d'accord, des oeuvres sont tellement intemporelles que l'on peut dépasser le cadre original, à condition de mettre l'oeuvre en valeur, de ne pas l'amoindrir ou de la trahir.
Dr WO
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