• MEUTES XXIII

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    LE RETOUR DE LA NUIT

     

    Branlant sur leurs membres décharnés

    Les morts étonnés revinrent à la vie

    Sortis du monde de l’obscurité

    Leurs yeux de taupe furent éblouis

    Par les lumières qu’ils avaient oubliées

    Alors ils fermèrent les yeux

    Il n’y avait pas de mots pour traduire leur nuit

    Et ils restèrent silencieux

    Et quand les mots venaient à leur esprit

    Ils mourraient sur leurs langues figées

    Ils couvraient l’encre bleue de leur bras

    Comme s’ils avaient honte d’avoir été torturés

    Ils craignaient que les autres ne les croient pas

    Ils restèrent longtemps silencieux

    Puis ceux qui trouvèrent les mots pour le dire

    Témoignèrent pour les taiseux

    Pour ceux qui enterraient leurs souvenirs

    Et les revivaient dans l’insomnie

    Et d’autres se suicidèrent

    Après leur retour à la vie

    Brûlant le lambeau de lumière

    Qu’ils avaient arraché à la nuit

     

    Paul Obraska         

     

    George Grosz « Heureux d’être de retour » 1943

     

    Le dernier dimanche d'avril est la "Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation".

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  • Commentaires

    1
    Lundi 25 Avril 2011 à 11:39
    Souvenons-nous! Notre présent l'exige.
    2
    Lundi 25 Avril 2011 à 11:57

    Beaucoup préfèrent oublier l'histoire et certains aimeraient la contester. Les massacres restent d'actualité.

    Dr WO

    3
    Lundi 25 Avril 2011 à 16:20

    Tout cela est vrai et mon poème a tenté de le traduire.

    Dr WO

    4
    Lundi 25 Avril 2011 à 17:46
    Qu'en sera-t-il quand les derniers témoins de cette horreur ne seront plus là pour raviver notre mémoire ?
    5
    Lundi 25 Avril 2011 à 18:46

    Ce massacre, ignoble par son ampleur, son organisation industrielle et sans la moindre utilité pour les massacreurs, amplement archivé, restera comme l'évènement historique le plus honteux du XXe siècle et de l'humanité.

    Dr WO

    6
    Lundi 25 Avril 2011 à 20:46
    C'est un très bel hommage.
    On reconnaît bien là votre sensibilité ...
    L'horreur ici n'a pas d'adjectif... et quand l'on prend conscience de tout cela, (à condition de le vouloir) on rougit presque et même surement d'oublier tant soit peu, d'oublier même beaucoup... désolée si je vous semble pessimiste....
    7
    Lundi 25 Avril 2011 à 23:11

    Les hommes ont commis beaucoup d'horreurs et en commettent encore, mais l'oubli est aussi une nécessité pour vivre.

    Dr WO

    8
    Mardi 26 Avril 2011 à 22:29
    Quel poeme fort en emotion ! Le tableau accompagne superbement bien l'univers imaginé .
    On oublie pas Doc .Je ne savais pas que cette journée existait
    Comme vous le dites si bien on enterre les souvenirs trop douloureux cela nous aide à vivre .
    9
    Mercredi 27 Avril 2011 à 10:44

    Oui, bien que la psychanalyse a une démarche inverse : percer le mur de l'oubli.

    Dr WO

    10
    Mercredi 27 Avril 2011 à 12:53
    Beau poème, Doc ! qui décrit une réalité dont on a du mal à apprécier le mécanisme. J'ai entendu récemment dans un reportage sur le procès de Heimann que, même en Israël, pendant longtemps les rescapés des camps de ma mort étaient regardés avec une sorte d'incompréhension mêlée de méfiance.
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    11
    Mercredi 27 Avril 2011 à 13:43

    Parce que les rescapés étaient la preuve de la honte de l'humanité et de l'échec de la civilisation. La preuve que quel que soit le degré atteint par un peuple civilisé, il n'était pas à l'abri de la barbarie la plus stupide et de la plus inutile. Le rescapé était le témoin resté vivant de l'abjection de l'homme.

    DR WO

    12
    Lundi 2 Mai 2011 à 10:21
    Bonjour Paul. J'ai entendu une femme un jour dire ;_ il n'y a pas de vie 'après'Auswitch mais une vie 'avec' Auswitch. Je crois que tous les hommes et les femmes qui ont vécu la guerre peuvent dire celà. Car si Auswitch fut une machine particulièrement macabre et qui restera un fait historique marquant du XXème siècle, il y a eu tous les autres génocides et les guerres du terrorisme. Si le devoir de mémoire est important pour reconnaitre la douleur de celui qui fut torturé, il est crucial que les peuples du monde protègent les victimes des états dictateurs qui massacrent des gens de leur peuple et tuent leurs enfants pour un bulletin de vote aujourd'hui. La mémoire d'hier doit servir pour aujourd'hui ; sinon ça n'a aucun intérêt et cela donne l'effet inverse ; de la sensiblerie et le sentiment de persécution. Bien à vous. Tibicine
    13
    Lundi 2 Mai 2011 à 11:37

    Les massacres du passé n'ont jamais empêché les massacres à venir. La mémoire n'a malheureusement rien d'utilitaire, mais ce n'est pas une raison pour l'effacer et la considérer comme une sensiblerie. Comment éliminer le sentiment de persécution, puisque celle-ci existe depuis des siècles pour les persécutés.

    Dr WO

    14
    Lundi 2 Mai 2011 à 19:48
    Bonsoir Paul. Vous réduisez mon propos, je ne suis pas d'accord. Vous avez lu et commenté mon poème 'Etoile', vous connaissez donc ma sensibilité. Je ne crois pas aux symboles, aux lieux de mémoire, aux commémorations. On n'est pas meilleur croyant en se prosternant devant un Jésus sur sa croix ; c'est dans le coeur que ça se passe. Je crois à la mémoire collective, à l'hérédité, aux leçons du passé et à l'action dans le présent. Je crois en la résilience. Bien à vous. Tibicine
    15
    Lundi 2 Mai 2011 à 20:48

    La mémoire collective se nourrit des célébrations comme un rappel de vaccination. La mémoire individuelle n'est le plus souvent conservée que chez les victimes (c'est elles qui ont besoin de la résilience).

    Dr WO

    16
    Leonie
    Lundi 7 Janvier 2013 à 16:07
    Votre poème doc est très beau il rend hommage à ces hommes qui ont vécus l'horreur dans toute sa splendeur, ces hommes comme vous dites qui ont connu l'obscurité la plus sordide qu'il puisse exister, et c'est vrai que certains n'ont pas pu supporter le retour à la lumière, car ils ont retrouvés un monde inconnu pour eux, un monde pas prêt d'accepter de croire qu'il existe des mondes sordides, j'ai lu le livre d'une rescapée des camps qui retranscrit très bien ce sentiment d'être seule au monde en revenant parmi les siens, elle a dit qu'elle était considérée comme une revenante dérangeante par les siens et les autres incapables d'imaginer l'immaginable.
    Nous devons nous souvenir pour éviter que cela se reproduise.
    17
    Leonie
    Lundi 7 Janvier 2013 à 16:07
    PS - correction ; "l'inimaginable"
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