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    J'ai lu récemment un roman de science-fiction (cela faisait une éternité que je n’en avais pas lu un) écrit par l’américain Walter Tevis, et intitulé « L’oiseau d’Amérique » sur le thème rabattu des robots. Dans ce livre paru en 1980 (4 ans avant la mort de l’auteur), les humains avaient confié dans le passé l’essentiel des activités aux robots, y compris celle d’organiser et de diriger. Ce transfert de pouvoir étant justifié par le désir de promouvoir la paix et de permettre à l’humain futur, libéré de toutes les tâches, de ne songer qu’à lui-même en réduisant au minimum les contacts avec ses congénères pour éviter toute friction, source de violence. Le résultat – vous vous en doutez -  ne fut guère fameux, marqué par la disparition progressive des enfants et des vagues de suicide collectif : le retour de la violence, mais sur soi-même.

    Ce roman est une illustration de ce que l'on peut craindre. Je trouve, comme d’autres, que l’intelligence artificielle dont on parle beaucoup, et avec enthousiasme, n’est pas un progrès séduisant mais une chose plutôt effrayante.

    Mon smartphone et mon ordinateur me demandent parfois avec une voix tentatrice ce que je veux et je leur rabats toujours le caquet (mon téléphone n’a plus de clapet). L’IA, après avoir envahi les transports, va sûrement permettre ceux de la libido : le robot baiseu-r-se (là, il faut faire dans l’inclusif) nanti-e de tous les atouts pour cette fonction est proche de l’accouchement.

    J’étais dans ma jeunesse un modeste joueur d’échecs et j’avoue avoir été dépité, il y a déjà pas mal d’années, lorsqu’une machine, même si elle avait été programmée par d’autres humains, triompha du champion du monde, démontrant ainsi qu’une bonne partie de l’intelligence n’est basée que sur la mémoire. Puisque le champion du monde d’échecs se faisait battre par un ordinateur, je n’avais plus de dépit à prendre une déculottée face à la machine, j’avais intégré ma défaite.

    Toutefois, je commence à me sentir personnellement visé en apprenant que le robot chinois Xiao Yi ("petit médecin") a aisément réussi l’épreuve écrite du concours national chinois d’entrée en médecine avec 456 points sur 600 (sans recourir à internet). Un candidat humain a heureusement sauvé l’honneur en obtenant 553 points (il a toute ma sympathie) alors que les ingénieurs de l'Université Tsinghua de Pékin, avait fait ingurgité à la machine pas moins d'un million d'images, 53 000 ouvrages, deux millions de dossiers ainsi que 400 000 documents et rapports médicaux.

    Les bras m’en tombent.

    Un défi que les humains ne pourront jamais relever. Pourquoi encombrer notre mémoire puisque la machine de ce point de vue est bien supérieure, nous ne faisons plus l'effort de retenir, et une amputation de la mémoire conduira peut-être à un déficit de la pensée, car celle-ci est aussi faite de rapprochements que l'ordinateur effectuent plus vite et mieux que nous. Il ne restera plus aux humains, qu’à intégrer leur défaite…Ou de briser les machines sophistiquées et présentes dans tous les domaines, concurrentes dangereuses car elles pourront peut-être un jour se fabriquer elles-mêmes.

    Ainsi dans ma vie j’ai lu des romans d’anticipation qui me paraissaient à l’époque totalement imaginaires pour voir finalement l’imaginaire se réaliser sous mes yeux.

    « 254. Relation de cause à effet entre la presse et la paniqueLa neige tombe »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 1er Décembre 2017 à 23:11

    Comme vous je trouvais certains films de science fiction très imaginatifs, comme 2001 l'odyssée de l'espace où le robot qui devait aider à conduire la fusée prend le commandement tue des pilotes humains... mais ne sommes-nos pas aujourd'hui devant ce genre de robot qui ne nous veulent pas de bien, car ceux qui les programmes sont comme le Dr Follamour complètement marteau!

      • Vendredi 1er Décembre 2017 à 23:27

        Pour l'instant les robots ne veulent rien mais ils prendront peu à peu la place des humains, et rien ne dit que ceux-ci dans leur folie ne les programmeront pas pour tuer. Les drones tuent dirigés par la main de l'homme, mais on pourrait très bien supprimer la main. Cependant un robot tueur reviendrait plus cher qu'un soldat dont la destruction est moins onéreuse.

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    2
    Samedi 2 Décembre 2017 à 12:00

    Il y a des expressions, comme ça, qui me font rigoler... "Intelligence artificielle" en est une et si on recherche l'antonyme de "intelligence" et celui de "artificielle, on tombe sur "connerie naturelle", mais passons...

    Une autre expression est "réalité augmentée"... Coluche avait inventé le "plus blanc que blanc", nos techniciens (surement épaulés par une intelligence artificielle (ou par son synonyme)) ont inventé la "réalité plusse que réelle"

    Pourtant, à propos d' I.A.... un site bluffant:

    AKINATOR.... (Akinator peut lire dans ton esprit et te dire à qui tu penses en répondant à quelques questions. Pense à un personnage réel ou fictif et Akinator tentera de le deviner. Oseras-tu défier le Génie )

     

      • Samedi 2 Décembre 2017 à 12:55

        Si la réalité augmentée est en fait de l'irréel, je pense que l'intelligence artificielle est plutôt bien nommée. Si la connerie est naturelle, elle peut être aussi artificielle, le robot téléphonique en est un exemple.

      • realist
        Samedi 2 Décembre 2017 à 15:20

        L 'intelligence artificielle n'a bien sûr aucune chance contre la "connerie naturelle", c'est à dire que des "imprévus"  feront toujours foirer les grands desseins machiavéliques mais ont peut quand même s'attendre à quelques dégats: Slaughterbots


         

      • Samedi 2 Décembre 2017 à 15:58

        Impressionnant et inquiétant !

      • realist
        Samedi 2 Décembre 2017 à 16:16

        A l'opposé, ce qui semble exclu c'est le délire dystopique du style Skynet ou Terminator: The impossibility of intelligence explosion

      • Samedi 2 Décembre 2017 à 16:24

        Le sujet semble vous passionner.

    3
    Samedi 2 Décembre 2017 à 13:09

    A l'heure du bio, du naturel, du terroir et de l'ancestral, l'intelligence artificielle me paraît bien rétrograde.^^

      • Samedi 2 Décembre 2017 à 14:24

        Fine remarque. Deux courants en sens opposé qui s'éloignent de plus en plus et qui correspondent à deux philosophies. Le courant "naturel" correspond à une peur de l'avenir qui n'est pas dénué de fondement, mais il aura du mal à s'opposer à la technologie du futur qui a déjà conquis, par ex. la procréation artificielle ou les organes artificiels et rien ne dit que la technologie ne viendra pas au secours de la nature en contribuant à la préserver.

    4
    Souris donc
    Dimanche 3 Décembre 2017 à 10:34

    Syndrome Frankenstein, l'homme dépassé par sa créature ?

      • Dimanche 3 Décembre 2017 à 10:53

        Nous sommes déjà dépassés pour ce qui concerne la mémoire et le lien entre les informations qui sont des modalités de notre pensée.

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