• 67. Combat illusoire

    Ucello paolo St georges
    Paolo Ucello : "Saint-Georges et le Dragon" 1456


    L’idée que la volonté a une influence sur la maladie est des plus mystérieuses. Le stéréotype du malade combattant sa maladie, tendant ses forces contre l’envahisseur est largement répandu. Le malade habité par un mal qu’il faut chasser ou se livrant à son dernier combat. Malheureusement les cellules cancéreuses, la fibrose envahissante, la dégénérescence, les virus et les microbes s’ils sont parfois  sensibles an traitement, se moquent vraisemblablement de la volonté du patient ou de son degré d’information.

     

    Connaître l’ennemi pour le combattre

    Pour nombre de médecins ne rien cacher au malade aurait une vertu thérapeutique. Savoir hâterait la guérison. Certains vont jusqu’à avancer que la guérison n’est possible que si le malade est parfaitement informé : « L’efficacité des soins passera de plus en plus par l’information du patient, qui ne peut guérir que s’il devient propriétaire de sa maladie et s’il participe de façon éclairé aux choix thérapeutiques. »[1]. Passons sur le terme de « propriétaire » qui introduit le libéralisme même dans la maladie et il ne manque plus que l’offre de vente, mais pour être sérieux, il est légitime de demander sur quoi repose cette affirmation. Nous n’avons pas connaissance d’études comparant la qualité et la rapidité de la guérison ou de la rémission entre un groupe de malades parfaitement informés de leur maladie et ayant choisi leur traitement et un groupe de malades identiques ne connaissant qu’une partie de la vérité ( celle sur le but des examens et la thérapeutique) et chez qui le traitement a été choisi par leur médecin.

    Si savoir a une vertu thérapeutique, il y a là encore un mystère. C’est supposer que l’information du patient, c’est à dire la pensée, renforce l’efficacité des médicaments ou agit sur les lésions, les cellules cancéreuses ou les germes.

    En renversant la proposition, c’est dire que l’ignorance diminue l’efficacité du traitement et admettre que lorsque le malade était peu au fait de sa maladie, on n’obtenait que difficilement des succès thérapeutiques avec la chimiothérapie, la radiothérapie, la chirurgie ou les antibiotiques. Ce qui est absurde.

                                                                                    

    Chamanisme et bon sens

    Croire à la vérité et à la volonté comme traitements ressort d’une conception chamanique de la maladie assez étonnante dans une médecine qui se veut rationnelle et scientifique. Heureusement qu’un grand nombre de malades gardent les pieds sur terre : « Je ne me suis pas battue avec cette maladie, je l’ai soignée » (Hélène Fillières).

    Cependant l’état d’esprit d’un malade a son importance. Il y a des malades qui se laissent mourir (« glissement »), mais si l’on ne possède pas un traitement efficace, la volonté de vivre ne retardera guère l’échéance.

    Si l’on peut être guéri sans rien connaître de sa maladie et sans que la volonté intervienne, la volonté et l’information sur le traitement  peuvent aider à le suivre correctement, à le supporter et à ne pas l’abandonner. Dans certaines maladies chroniques comme le diabète ou l’asthme, l’éducation du malade sur la surveillance et l’adaptation du traitement est importante et la contribution active et volontaire du malade aux soins indispensable, mais ce sont des cas particuliers.


    [1] Louis Dubertret, propos recueillis par le Point du 4 novembre 2004

    « Femmes au volantMECREANCES XXIV »

  • Commentaires

    1
    Mardi 19 Janvier 2010 à 11:33
    Tous les individus sont différents. Leurs maladies aussi. Et la confiance qu'ils ont dans leur médecin variable. Aussi, faire des statistiques me paraît du temps perdu. Je bute comme vous sur le mot "propriétaire" qui s'applique surtout aux hypocondriaques. Enfin, un malade inconscient que le médecin guérit échappe au champ de ce genre de spéculation.
    2
    Mardi 19 Janvier 2010 à 11:49

    Les individus sont différents mais le résultat est le même (mis à part les cas particuliers). En effet, l'étude théorique que je mentionne n'a aucun intérêt, Ce qui m'irrite ce sont les affirmations gratuites.
    Dr WO

    3
    Mardi 19 Janvier 2010 à 13:25
    Je suis d'accord sur l'introduction et la conclusion de l'article mais l'argumentation "coonnâitre l"ennemi pour le combattre " ne me convainc pas ..En effet -participer aux choix therapeutiques n'est pas "choisir son traitement "
    -On ne peut pas opposer de façon équivalente : "savoir =vertu thérapeutique " et "ignorance = diminution de l'efficacité therapeutique "
    l'etre humain est bien plus complexe ...
    Dr Wo que faites vous des composantes psychologiques ?
    PS superbe tableau !
    4
    Mardi 19 Janvier 2010 à 13:46
    Je pense que le problème de ne pas tenir informé le patient de sa maladie (et de son traitement) se posait à une époque où le médecin lui-même était dans un grand flou artistique.
    Aujourd'hui que l'on sait les causes, les symptômes, l'évolution probable de la maladie et les avantages et inconvénients des différends traitements, le problème se pose de moins en moins, non ?
    5
    Mardi 19 Janvier 2010 à 14:08
    Que dire de certains malades qui sont tellement "propriétaires" de leur maladie qu'elle leur sert presque de raison de vivre ? On l'a tous entendu au moins une fois ce :"vous pensez bien, avec "ma" maladie..."
    6
    Mardi 19 Janvier 2010 à 15:56

    Un patient a toujours participé au choix thérapeutique, mais à présent on lui demande de plus en plus de choisir son traitement (ce qui déresponsabilise le médecin). Si l'on admet que savoir a une vertu thérapeutique, il faut aussi admettre l'inverse. A ma connaissance je n'ai jamais vu l'influence des facteurs psychologiques sur la guérison ou l'absence de guérison d'une maladie organique grave (c'est de ce type de maladie dont je parle).
    Dr WO

    7
    Mardi 19 Janvier 2010 à 16:04

    Le problème de l'information se pose à présent beaucoup moins. Le patient est informé, parfois trop, ce qui peut nuire à sa prise en charge. Ce que je discute est l'affirmation que l'information serait un facteur essentiel de la guérison et je crois au contraire qu'une information excessive est une source d'angoisse.
    Dr WO

    8
    Mardi 19 Janvier 2010 à 16:10

    C'est vrai. Je me souviens d'une patiente chez laquelle j'avais démontré qu'elle n'avait pas la maladie dont elle se plaignait auprès de sa famille depuis 20 ans. Elle n'a pas été convaincue et m'en a beaucoup voulu. Elle a changé de médecin pour pouvoir continuer à se plaindre.
    Dr WO

    9
    Mardi 19 Janvier 2010 à 19:51
    Les causes de cette inégalité sont multiples avec en premier la constitution génétique.
    Dr WO
    10
    Mercredi 20 Janvier 2010 à 20:41
    Le dragon n'a jamais existé. Saint Georges non plus, d'ailleurs.
    Une métaphore de l'homéopathie?
    11
    Mercredi 20 Janvier 2010 à 20:49
    Une métaphore sur l'inexistence du combat conscient du malade sur sa maladie.
    Dr WO
    12
    Mercredi 20 Janvier 2010 à 23:31
    J'avoue ne pas trop y croire. Néanmoins pour la peau, je serait plus prudent.
    Dr WO
    13
    Jeudi 21 Janvier 2010 à 07:40
    Le moral chez le patient est tout de même de nerf de la guerre.
    Un patient bien informé appréhende sa maladie et ses traitements en connaissance de cause, arrive à appréhender les différents symptômes qui signalent la limite acceptable par le corps, une meilleure gestion du problème…..
    C’est ce que les gens appellent se battre pour guérir de la maladie.
    Pour mon cas personnel, je dirais que je la gère avec l’aide des « louzzous » que j’avale quotidiennement depuis 2003.
    Merci Doc, pour ce billet intéressant
    Bonne journée
    Bizzzzzzzzzzzz
    ZAZA
    14
    Jeudi 21 Janvier 2010 à 09:48

    Connaître les limites de son corps est en effet important pour ne pas provoquer les symptomes et pour ne pas aggraver sa maladie, mais ce n'est pas un combat qui conduit à la guérison, c'est une adaptation judicieuse permise par la connaissance pour les maladies chroniques dont je cite deux exemples. Quant au moral, il ne guérit pas les maladies sérieuses, il permet de vivre mieux, ce qui n'est pas si mal.
    Dr WO

    15
    leonie
    Lundi 7 Janvier 2013 à 16:20
    les hommes ne sont pas égaux devant la maladie, Est ce une question de constitution où bien la maladie trouve une porte d'entrée dans un corps affaibli?
    16
    Marie-Hélène
    Lundi 7 Janvier 2013 à 16:20
    On ne peut pas nier l'importance du mental,le cerveau envoie de nombreux messages. J'ai fait un travail intéressant en sophrologie avec un médecin pour accélérer la cicatrisation des tissus. Mais il n'a jamais été question de supprimer les traitements. Je crois à la combinaison des deux.
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