• Dès janvier prochain  le slogan suivant s’affichera sur les bus londoniens : « Dieu n’existe probablement pas, alors cessez de vous en faire, et profitez de la vie”. Lasse des publicités chrétiennes placardées sur les bus de la capitale, émanant d’un groupe vouant les infidèles aux tourments de l’enfer, la journaliste Ariane Sherine a lancé une campagne pour financer des contre-publicités athées. En dix heures les promoteurs de cette initiative, soutenue par le scientifique et militant de l’athéisme Richard Dawkins, ont réuni 100000 livres (123000 €). Ainsi à Londres vont circuler trois types de bus : les athées, les chrétiens et les séculiers (publicité habituelle). Quels seront les bus qui assureront le meilleur service ? Dieu seul le sait.


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  • « Soyons sérieux » : c’est un copeau-clé de la langue de bois. Elle a pour but de rabaisser l’adversaire ou le journaliste dont les arguments même exacts deviennent ainsi fantaisistes, pour tenter de rendre son propre discours crédible en lui donnant un label de véracité, surtout s’il s’agit d’un mensonge.

     

    « Nous le ferons après une large concertation » : c'est-à-dire, la décision étant déjà prise elle sera néanmoins exposée à ses adversaires qui ne pourront rien y changer. La concertation se situe entre la décision et son application.

     

    « C’est un débat démocratique »  est un copeau du même ordre : le débat l’est parfois (mais qui participe au débat ?), la décision qui en découle, rarement.

     

    « C’est un progrès pour la démocratie ». Là il faut vraiment dresser l’oreille car le plus souvent c’est un recul (ex. un conseiller de Sarkozy a osé dire sur France Inter que la nomination du président de la TV publique par le président de la république était un progrès pour la démocratie)

     

    « C’est une loi votée par les élus du peuple ». Il n’y a plus rien à dire, sauf que ce n’est pas pour cela que la loi est bonne, qu’il n’est pas du tout certain que le peuple dans sa majorité la veut, qu’une grande partie du peuple n’est pas représentée au parlement et qu’une fois élus – surtout en début de mandat – les représentants se fichent le plus souvent de ce que veut le peuple qu’ils sont censés représenter. Le peuple ne peut s’exprimer que par les sondages dont les résultats sont parfois manipulés, ne serait-ce que par les questions posées.

     

    « La France est un pays d’assistés ». A commencer par les hommes politiques qui montrent l’exemple en  n’hésitant  jamais à augmenter leurs émoluments et à défendre leurs privilèges (à tel point que, comme pour les hauts fonctionnels, leur salaire ne leur sert, pour la plupart, que d’argent de poche).


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  • C'est encore loin la mer ?


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  • Dans les traitements appréciés par les patients le naturel revient au galop. Nature, naturel, mots magiques qui confèrent à un traitement  un caractère d’innocuité, un zeste d’innocence édénique. « Laissez faire la bonne nature », à savoir les microbes, les virus, et toutes les dérèglements naturels de l’organisme. Dire que ce qui est naturel est bon pour la santé parce que naturel est une idée fausse.

    Un postulat de Pythagore

    « Ne mange pas de fèves »   est une des principales règles enseignées par Pythagore qui n’aurait pour rien au monde traversé un champ de cette légumineuse. On s’est interrogé sur les raisons de cette aversion.  Certains  évoquent une croyance des grecs en la présence de l’âme des morts dans la fève. Plus impertinent, Aristote prétend que c’est à cause d’une certaine ressemblance avec le sexe masculin. Et si Pythagore était tout simplement atteint de favisme, une maladie génétique dans laquelle l’ingestion de  fèves[1]  provoque une anémie grave, dont dix pour cent environ des grecs sont atteints ?

    Les vertus végétales

    Les régimes alimentaires garantissant longue vie et bonne santé ont de tous temps séduit. Au début du XIXe siècle, l’Américain Sylvester Graham, inventeur des crackers, surnommé « le persuadeur péristaltique », mena un grand combat pour les régimes végétariens et le pain de son.

    Les vertus des fruits et légumes pour « vieillir en bonne santé »[2] augmentent avec la distance qui les séparent de nos marchands de quatre saisons, qu’il s’agisse des baies du Grand Nord ou des fruits tropicaux.

                                                                                    

    Même les plantes qui ont bonne réputation  peuvent avoir des effets secondaires dangereux : la bourdaine et le séné malmènent l’intestin, l’arnica peut provoquer des dermites et des troubles gastro-intestinaux, l’eucalyptus des nausées et vomissements, la camomille des réactions allergiques, le millepertuis une photosensibilisation, le thym des troubles gastro-intestinaux, le kava a une toxicité hépatique comme le thé vert et l´Aloe Vera (qui entrent dans la composition des suppléments diététiques Herbalife) et l’aristoloche a une toxicité rénale et cancérigène… Si on ne peut plus se fier aux produits naturels...Bien sûr les accidents sont rares comme le sont ceux provoqués par la plupart des médicaments mais dont tolérance et l’efficacité sont testés avec plus de sérieux que pour les produits dits naturels considérés et vantés - par définition - comme non dangereux.

    En 2003, la ministre de la Santé d’Afrique du Sud soutenait que pour lutter contre le sida il était plus sûr d’utiliser de l’ail, de l’huile d’olive et de l’oignon que des anti-rétroviraux (en Afrique du Sud, 20% de la population est séropositive). « Parce que l’ail sauve de la mort, n’y renoncez pas, même s’il donne mauvaise haleine » (Sir John Harington, inventeur de la chasse d’eau).

    Les poisons de la bonne Nature

    En fait, la plupart des poisons viennent de la nature, même si certains d’entre eux sont utiles à la médecine :

    - L'amanite phalloïde est un champignon mortel. Périodiquement un médecin semble avoir trouvé le traitement, veut convaincre ses confrères en l’essayant sur lui et meurt

    - La digitaline est extraite de la digitale dont la fleur ressemble à un dé à coudre. A doses excessives, elle provoque des troubles de la vision des couleurs où les objets peuvent apparaître en vert ou en jaune. On s’est demandé si Van Gogh n’avait pas été influencé par le souvenir d’une intoxication digitalique, sa névrose ayant été traitée par de la digitale. La digitaline n’a sûrement pas guéri Van Gogh de sa névrose mais ses effets iatrogènes ont pu contribuer à son génie.


    - La belladone est une petite cousine de la tomate et de la pomme de terre, dont le fruit ressemble à une cerise noire, qui transformait les belles italiennes en allumeuses aux pupilles dilatées. C’est un véritable Dr Jekyll and Mr Hyde végétal. Du coté Hyde, un poison violent, mortel, l’atropine qui justifie la référence à Atropos, la Parque qui coupe le fil de l’existence. Les Romains l’utilisaient pour empoisonner les réserves de nourritures de leurs ennemis, premier exemple de guerre chimique. Du côté Jekyll les actions thérapeutiques multiples, importantes et toujours actuelles de ses alcaloïdes.


    - Les curares sont des poisons utilisés en anesthésie pour obtenir un relâchement de la musculature abdominale de l’opéré et des nerfs de l’opérateur qui ne supporte pas qu’elle ne soit pas relâchée.

    - La mandragore est une plante avec laquelle on peut faire un médicament narcotique et aphrodisiaque, ce qui est tout de même contradictoire

    La nature secrète bien d’autres poisons, sans parler des drogues qui permettent d’accéder aux enfers artificiels : opium et dérivés, cocaïne, cannabis et bien sûr le tabac.
     


    Documentation réunie avec la collaboration de Jean Waligora

    [1] Variété Vicia faba

    [2] Entretiens de Bichat 2004. Table ronde sur l’intérêt de la papaye fermentée sur notre santé

     


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  • René Magritte « Le jockey perdu »

     

     

    LA FABLE DU JOCKEY PERDU

     

    Un jockey distrait est perdu dans la nature

    Lui qui ne connaît que les pistes balisées

    De l’hippodrome, comment a-t-il pu s’égarer ?

    Et il continue affolé à cravacher sa monture

     

    Dressé sur son coursier le jockey caracole

    Parmi les arbres aux plumes d’oiseau

    Et le cheval inspiré prend son envol

    Les ailes ouvertes de ses naseaux

     

    L’étalon sans remords laisse la course de côté

    Orné du petit homme dressé sur ses ergots

    Pour rejoindre une jument aperçue dans les prés

    Emportant le jockey éperdu sur son dos

     

    Ce galop libre dans la nature est une fête

    Sans personne ni devant ni derrière

    Sans piste, sans chemin, sans barrière

    Au milieu de rangées d’arbres-sucettes

    Plantées dans le vide des clairières

     

     Le jockey dans son habit de carnaval

    N’a jamais couru à cette vitesse

    S’il ne comprend pas son cheval

    Il est gagné par son ivresse

    Par l’animal il se laisse emporter

    Et se demande si en se perdant

    Il ne s’est pas trouvé

     

     

    Paul Obraska


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  • Dans Le Point du 4/12/2008 est parue une interview d’un psychanalyste intitulé « L’insécurité, le mal absolu ». Cette interview porte sur les peurs de la société occidentale actuelle. L’analyse ne manque pas d’intérêt jusqu’aux derniers paragraphes « …en deçà de ces peurs multiformes et toujours renaissantes, ce qu’elles expriment et camouflent à la fois : une angoisse sociale diffuse et dont l’objet est voilé. ». Bien se dit-on, cet homme de l’art va nous dévoiler la cause première de toutes ces peurs et il le fait magistralement dans les dernières lignes « La peur de la bombe atomique n’est plus ce qu’elle était, mais la dernière en date de nos peurs médiatiques est plus subtile, s’insinue au plus intime (suspense) : récession alarmante de la production spermatique, croissance indue des cancers du testicule et des malformations masculines. Eh bien, le voilà, l’objet caché de l’angoisse. SOS phallus ! » Il n’y a plus qu’à tirer la chasse d’eau.


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  • « Aller sur le terrain » : les politiques se gargarisent de ce copeau de la langue de bois pour montrer combien ils sont proches de leurs concitoyens (et surtout de leurs électeurs). Ils font une apparition fugace, très organisée et encadrée, pour retourner bien vite dans leurs palais, conduit par leur chauffeur attitré qui ne respectera pas les limitations de vitesse, tellement le maître est pressé de rentrer. En fait, c’est une façon de s’exprimer méprisante ; le terrain, c’est quoi ? Des champs peuplés de péquenots ? Des quartiers incertains ? Des chantiers salissants ? De la boue ? Du purin ? des ordures ? Attention ! Les politiques choisissent leur terrain, mais il faut leur rendre hommage quand ils se vantent d’ « aller sur le terrain » comme on va à la guerre, car c’est faire preuve de courage que de se mêler à la populace,  même de loin et pas longtemps.

     

    « Je suis à l’écoute » : Ah ! Les politiques montrent ainsi qu’ils daignent vous écouter ! Ils font un effort, être à l’écoute serait une qualité alors qu’ils sont élus pour ça. Il ne faut pas se faire  d’illusion, ils sont surtout à l’écoute la veille d’une élection où ils semblent passionnés, sous le regard des caméras,  par ce que raconte la marchande de fruits et légumes. Ils écoutent en pensant à autre chose ou ne retiennent que ce qui les arrange, tout en vérifiant la bonne position des journalistes.

     

    « Je suis au service de mes concitoyens ». Un député est élu exactement pour ça, il n’y a donc pas lieu de s’en vanter. Alors pourquoi donner cette précision ? Justement parce que les concitoyens ont des doutes : et si le député ne pensait d’abord qu’à lui ? Et s’il ne rendait service que pour être réélu ? Il est bon de répéter qu’il ne pense qu’aux autres et qu’il se sacrifie pour eux. On ne sait jamais, à force ça peut marcher.

     

    « Il est dangereux de dénigrer les politiques ». Sous-entendu : dénigrer la classe politique c’est faire le jeu des extrémistes, donc : acceptez ce que nous sommes, car nous sommes moins pires que les autres. Bien sûr, il ne faut pas mettre tous les politiques dans le même cageot, il y en a d’honnêtes et même d’efficaces (quoi ? Je ne plaisante pas), mais c’est comme pour les fruits : si dans un cageot les uns sont pourris, les autres risquent de le devenir à leur contact. La politique en tant que profession est rentable et un élu cherche à le rester car une fois entré personne ne veut sortir du fromage, bien que dans ce métier le risque de chômage est faible : ceux restés en place trouvent toujours pour les copains des points de chute enviables. Le renvoi d’ascenseur est une mécanique bien rodée chez les politiques, ce qui montre leur altruisme.


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  • La foire a eu lieu hier. La plus belle femelle humaine de France a été élue parmi tous les spécimens régionaux, sélectionnés par une maquignonne chapeautée au terme d’une présentation de leurs avantages anatomiques devant un jury concupiscent (le mot le plus évocateur de la langue française)


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  • Le héros de cette histoire a vécu à Issoire en Auvergne à la fin du XVe siècle. Je me permets de transcrire ici ses aventures :

    « Ce personnage, d’abord reconnu comme appartenant au sexe féminin avait été incorporé dans un couvent de femmes. Mais aussitôt, la jeune nonne devint la convoitise de toutes ses compagnes qui la courtisaient comme amant. L’autorité ecclésiastique fit une enquête et découvrit que ladite religieuse possédait un organe sexuel masculin. Elle fut considérée comme un homme et, après une sévère pénitence, on l’enferma dans un couvent de Moines noirs appartenant au Cardinal de Bourbon.

    Le nouveau moine était depuis huit à dix mois dans le couvent lorsqu’on s’aperçut que son ventre grossissait. On crut à une hydropisie. Quelque temps après, il accouchait d’un gros bébé !

    Les enquêteurs ecclésiastiques s’étaient toujours trompés. Ce moine était bien réellement une femme, mais une gynandroïde phalloïde.

    On considéra la malheureuse comme un hermaphrodite, horrible suppôt du démon. On la brûla vive et son pauvre enfant avec elle.

    On inscrivit sur sa tombe [en latin] : Homme, femme, moine tout ensemble, quel étonnant prodige de la nature ! »[1]

    Il est regrettable que cette histoire commencée dans une gaîté folâtre où le héros eut la chance de jouer sur tous les registres du plaisir, mais où il fut également le jouet du plaisir des nonnes et des moines, ait eu une fin aussi tragique.



    [1] Ce texte de Lucien Nass est tiré de « Les hermaphrodites devant les tribunaux du Moyen Âge » et figure dans la revue médicale « Aesculape » du siècle dernier. Il a été rapporté par Olivier Castel dans La Revue du Praticien du 30 novembre 2008


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  •   

    PORTRAITS XVIII


    Pablo Picasso « La buveuse d’absinthe »

     

     

    EVE BRÛLEE

     

    Coule maudite absinthe

    Telle une eau brûlante

    Pénètre la femme éteinte

    Cendres mortes et mort lente

    Cloporte des bars assassins

    Assise mains tremblantes

    Bras croisés sur ses seins

    Tête lourde sur une main

    Les yeux comme des fentes

    Regard lointain perdu ailleurs

     

    Les petites gorgées brûlantes

    Brûlent amertume et rancœurs

    Réchauffent la femme éteinte

    Remuent ses cendres vacillantes

    Ferment ses paupières peintes

     

    Et elle part à la dérive

    Emportée et captive

    Elle est Eve, elle fut la beauté

    Dans ses rêves elle sourit, édentée

     

    Et les hommes évitent son regard

    Regardent à la dérobée

    S’ils rient de leurs écarts

    Ils pleurent sur Eve brûlée

     

     

    Paul Obraska


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