• 164.Transhumanisme

    «Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin de médecins, mais les malades. » Jésus (Evangile selon St Marc 2/17).

    Bien que divine, cette affirmation est totalement dépassée.

    Pendant des siècles, la santé était définie de façon négative : l’absence de maladie déclarée. Pas de maladie, pas de médecine. Les choses ont changé, le sujet sain est également devenu l’objet de la médecine, ne serait-ce que par la prévention et les vaccinations. Mais la médecine, par ses connaissances du corps humain et les moyens qu’elle possède pour le modifier, offre des possibilités d’améliorer la vie du sujet en bonne santé apparente. En accédant à cette demande et parfois à cette exigence, la médecine se déconnecte des maladies, ne cherche plus seulement à rétablir la santé ou à la préserver, mais à modifier l’autre ou à influer sur son destin en utilisant les mêmes moyens que pour guérir. Elle change sa nature en changeant ses objectifs. Cette orientation est plus due à la société qu’aux médecins eux-mêmes (extrait de l'article « La médecine du bonheur »).


    Dans les années quatre-vingt est né aux USA un courant de pensée : le transhumanisme qui repose sur l’idée que les nouvelles technologies (regroupées sous l’acronyme NBIC pour nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives) devraient être utilisées pour améliorer les capacités physiques et intellectuelles de l’homme, afin de modifier profondément sa condition. Bien sûr, et depuis longtemps, la médecine tente d’améliorer la condition humaine par des techniques de substitution comme les lunettes ou les prothèses. Mais le transhumanisme envisage d’aller plus loin en augmentant les capacités humaines et créer un homme nouveau ; « l’homme augmenté ».

    A ce propos, le CREDOC a publié récemment les résultats d'une enquête auprès des Français. Moi, qui suis un médecin de la vieille école avec le souci d’intervenir le moins possible lorsque les gens se portent bien, je suis un peu surpris que, d’après cette enquête, pour une majorité de Français (près de 60%), les progrès de la médecine sont tout d’abord destinés à « améliorer les capacités physiques et mentales d’une personne en bonne santé » et que ces progrès « ne doivent pas se limiter à soigner les maladies », avec des différences en fonction des catégories sociales : « Les cadres et professions intellectuelles supérieures, les hauts revenus, les habitants de l’agglomération parisienne s’inscrivent le plus dans une logique qu’on pourrait apparenter au transhumanisme et considèrent plus souvent que l’homme doit chercher à augmenter ses capacités » (le CREDOC, Régis Bigot et Sandra Holbian).

    Mais si 60% des Français sont prêts à une modification de leur corps (comme la greffe d’un bras robotisé), par contre ils ne sont plus que 14 % à juger admissible l’idée d’installer « des composants électroniques sur le cerveau pour améliorer ses performances ». Pas touche à mon moi. Et pas touche à ma vie privée : 76 % des Français sont opposés à l’implantation d’un capteur sous la peau pour surveiller en permanence différents paramètres de santé par crainte d’une intrusion dans leur vie privée par les personnes chargées de collecter les données, personnes dans lesquelles ils n’ont a priori aucune confiance.

    « Vent de paniqueFleur au fusil »

  • Commentaires

    1
    Samedi 25 Octobre 2014 à 16:08

    De toute façon quoique fasse la science c'est à dire l'homme! Nous allons mourir, peut-être en bonne santé!

    70 ou 80 ans c'est bien suffisant! toutes les personnes de cet âge que j'ai connues autour de moi, en avaient assez de vivre et n'avaient plus de goût à rien!

    Plus c'est trop!

    2
    Samedi 25 Octobre 2014 à 16:21

    Tout dépend des individus. Le sociologue Morin, toujours actif et qui s'exprime parfaitement a dépassé les 90 ans, et l'architecte qui a conçu la remarquable Fondation Vuitton a 87 ans, et d'Ormesson n'est pas mal non plus...

    3
    Samedi 25 Octobre 2014 à 22:29

    Vieillir certes, mais en bonne santé et avec toute sa tête. Les gens vivent plus vieux, mais si c'est pour les maintenir dans la dépendance la plus complète, je ne vois pas où se trouve le progrès. Je suis depuis cet après midi dans mon île auprès d'une maman qui aura dans 1 mois 1/2 89 ans, mais qui est obligée pour se maintenir à son domicile de dépendre de sa fille, (l'autre atteinte de sclérose en plaque depuis 1986, végète sur un fauteuil roulant...), du passage d'infirmiers matin et soir, et de personnel ADMR et CESU pour l'entretien et les repas. Et que peut faire la médecine pour améliorer tout ceci.. RIEN.

    Bonne soirée Doc

    4
    Samedi 25 Octobre 2014 à 22:46

    C'est pour cette raison que je pense toujours que plutôt que de s'investir dans l'amélioration des performances de ceux qui sont en bonne santé, il est préférable que la médecine porte ses efforts sur ceux qui sont malades. Mais si la fin de vie est redoutable, que peut-on faire ? Achever les vieillards ? Le suicide en bonne santé ? La médecine est combat arrière-garde.

    5
    Samedi 25 Octobre 2014 à 23:08

    Pour moi, le transhumanisme est inéluctable puisque la demande et l'offre sont comparables à l'araignée et la mouche, pas de l'une sans l'autre. La vieillesse comme tous les autres passages de la vie est foncièrement inégalitaire cause à ce que chacune et chacun possèdent son métabolisme propre. En matière de vieillesse, il n'y a rien à réglementer ; tout est question d'adaptation. L'avancée majeure pour une société éclairée serait de légaliser l'euthanasie, selon des critères bien définis.

     

    Un transhumanisme voulu est toujours moins dangereux qu'un transhumanisme subi. Je pense notamment à la pose d'une puce RFID qu'un gouvernement rendrait obligatoire.

     

    Bien à vous

    6
    Samedi 25 Octobre 2014 à 23:15

    Je n'ai rien à ajouter à votre commentaire.

    7
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 09:10

    Tout cela fait froid dans le dos. Vive les médecins de la vieille école!

    Amitiés.

    8
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 09:28

    Mais comme le dit Kristen Chaman, le transhumanisme est inéluctable. Nous y sommes déjà avec les manipulations de la procréation.

    9
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 13:00

    Ce transhumanisme s'apparente au dopage. Ce sondage aurait-il été administré aux bien portants? J'ai peine à croire que des malades ne préfèreraient pas que l'on soigne leur cancer, leur sida  ou qu'on les opère d'une tumeur plutôt que de se voir greffer un bras robotisé.

    10
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 15:10

    "Ce travail s’appuie principalement sur la vague de juin 2014 de l’’enquête permanente du CRÉDOC sur les «Conditions de vie et Aspirations» de la population, laquelle est réalisée en face-à-face, deux fois par an depuis 1978, auprès d’un échantillon représentatif de 2 000 personnes, âgées de 18 ans et plus, sélectionnées selon la méthode des quotas. Ces quotas (région, taille d’agglomération, âge - sexe, PCS) sont calculés d’après les résultats du dernier recensement de la population, actualisé par l’enquête emploi. Un redressement final est effectué pour assurer la représentativité par rapport à la population nationale"

    Telle est la méthodologie de l'enquête et je suppose que des malades devaient se trouver dans le lot, mais ils ne semblent pas avoir été distingués. 

    11
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 21:39

    Vous êtes peut-être de la vieille école, avec tout ce que cela a de sympathique, Doc, mais d'un autre côté votre spécialité est aussi celle dans laquelle on pratique le plus, et depuis très longtemps, la prévention, c'est-à dire, les conseils et les soins aux personnes bien portantes mais qui présentent des risques .

    Et c'est une très bonne chose, car en matière de cardiologie, il n'est pas prudent pour le patient d'attendre que les symptômes apparaissent pour se décider à consulter

    12
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 23:18

    Certes, je ne discuterai pas l'intérêt de la prévention surtout dans mon domaine, mais à condition qu'elle ne soit pas terrorisante.

    Toujours pas de commentaires sur vos articles ?

    13
    Lundi 27 Octobre 2014 à 17:04

    Non, je fais une pause. Je vais alimenter mon blog des quelques articles que j'ai pris plaisir à écrire ces dernières années. Et en général les dits articles se prêtent mal aux commentaires. 

    J'espère que malgré ce manque de réciprocité, vous m'autoriserez à continuer à commenter les vôtres.

    14
    Lundi 27 Octobre 2014 à 17:37

    Puisque l'on vous a renvoyé sur terre après votre procès, la porte de mon blog vous est largement ouverte.

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