• Sur les trottoirs 3

    Le mendiant des heures à la dure, les fesses au sol et le dos au mur, les yeux baissés pour apitoyer les passants, ne voyait que la moitié de l’Humanité : la moitié supérieure des enfants, la moitié inférieure des grands.

    C’était une fourmilière de jambes, des fourmis dans les jambes qui ne cessaient de s’agiter. Des jambes de femmes belles à regarder, timidement découvertes au printemps, dénudées en été. Mais aussi, plus navrant, des jambes poilues des touristes avec leurs mollets tristes, toujours cachées dans les villes de leur pays, elles profitaient du voyage pour se montrer sans pudeur aux étrangers.

    Le mendiant voyait aussi toutes sortes de pantalons avec pli ou informes, entiers ou soigneusement déchirés sans raison pour jouer aux déshérités.

    Il guettait surtout les pantalons d’uniforme, et leurs lourdes chaussures cirées. Car il avait aussi les chaussures sous le nez, avec la fausse joie de leurs bandes de couleur, faites pour les coureurs, elles étaient à bout de souffle et fatiguées.

    Donc, mis à part les enfants et les chiens, qui familièrement levaient parfois la patte, il ne voyait que des jambes chaussées sans tronc.

    Comment appelle-t-on l’inverse d’un cul-de-jatte ? Voyons, ce qui ne peut exister n’a pas de nom. Mais se dit philosophiquement le mendiant « Nom de Dieu ! Le nom de Dieu existe bien ! »

    Alors, il se leva et prit son verre de monnaie, son écriteau : « aidez-moi j’ai faim » et partit d’un pas pesant se mêler aux passants.

     

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  • Commentaires

    1
    Samedi 15 Novembre 2008 à 18:52
    Fort bien vu ! A croire que vous avez essayé...
    2
    Samedi 15 Novembre 2008 à 20:30

    Si j'avais essayé, il aurait fallu deux personnes pour me relever et me transporter plié en deux. Rester des heures assis sur le trottoir est une prouesse physique qui mérite les quelques pièces que l'on donne.
    Dr WO

    3
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 11:04
    Donc, si je comprends bien, pendant que Le Huron perd ses boulons,les vôtres ont été revissés un peu serrés ! Quelle paire de joyeux lurons !
    4
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 12:02
    Vous avez bien compris les aléas de la mécanique humaine
    Dr WO
    5
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 15:29
    Ne me mêlez pas à vos disputes, je n'ai rien dit, moi! Zut! Trop tard!
    6
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 16:55
    Comment ! Vous nous mettez vos boulons sous le nez et ensuite vous vous défilez !
    Dr WO
    7
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 18:57
    Même quand je me défile, ça fait du bruit : Clong, Crouic, Bang, Toc!
    8
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 19:43
    Je sens que je vais adorer jouer au meccano !
    9
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 20:19
    Le monde est "plein de bruit et de fureur", alors un bruit de plus...
    Dr WO
    10
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 20:22
    J'avais raison pour le petit côté sadique. Vous n'arrachiez pas les jambes de vos poupées tout de même ?
    Dr WO
    11
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 20:40
    Non, je les opérais pour voir ce qu'il y avait dedans...toujours la curiosité scientifique !
    12
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 20:48
    La curiosité scientifique n'est pas souvent récompensée. Comme beaucoup de chercheurs vous n'avez trouvé que du vide.
    Dr WO
    13
    Dimanche 16 Novembre 2008 à 22:40
    Et quelques fessées...!
    14
    Lundi 17 Novembre 2008 à 10:14
    Voilà une façon inédite de récompenser les chercheurs qui ne trouvent rien.
    Dr WO
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