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Littérature aqueuse
Le politiquement correct des éditeurs américains nous promet une littérature incolore ou monochrome, inodore, insipide et qui se veut surtout indolore. Des sujets bien lavés, bien essorés, débarrassés de toute épine pour ne pas heurter la moindre sensibilité, et pour cela on conseille plus ou moins aux auteurs de parler que de leur monde sans avoir l’outrecuidance de parler de ceux des autres qu’ils sont accusés a priori de ne pas connaître. Ne pas être handicapé rend suspect de parler de l'handicap, les hétérosexuels ne sont pas habilités à parler de ceux qui ne le sont pas, les Blancs ne devraient décrire que des Blancs, à la rigueur des métis, mais on permet aux Noirs de parler de toutes les couleurs ou du moins les Blancs n’accusent pas les Noirs d’appropriation culturelle alors que l’inverse est courant. Les hommes parlent encore des femmes, en évitant cependant d’être accusés de misogynie, mais les femmes parlent des hommes sans être accusées de misandrie. Toutefois, les éditeurs américains font preuve d’ouverture d’esprit en proposant aux auteurs qui osent écrire sur ceux qui sont différents d’eux-mêmes de faire contrôler leurs écrits par des « relecteurs en sensibilité » («sensivity readers ») chargés d’y dépister la moindre scorie qui pourrait éventuellement heurter l’âme sensible d’une minorité à laquelle l’écrivain n’appartient pas, ce qui est de sa part plutôt téméraire car il risque de subir une censure idéologique et de ruiner ainsi sa carrière s’il ne s’excuse pas publiquement d’avoir piquer la sensibilité exacerbée d’autrui. Dans un article du Point, on cite des « relecteurs en sensibilité » hautement spécialisés ou à compétence multiple, une des relectrices se déclare : « Biraciale (Afro-Américaine et blanche), mauvais traitements parentaux, anxiété, maladie chronique (rectocolite hémorragique) ». Si depuis toujours les écrivains se renseignent avant d’écrire leurs livres, ces « relecteurs en sensibilité » dépassent le cadre de la documentation et les solliciter est plutôt la preuve d’une autocensure éditoriale pour éviter un lynchage dans les médias et surtout sur les réseaux sociaux. Illustration Magritte : « La lectrice soumise »
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Commentaires
Ce n'est qu'une période transitoire. demain, les auteurs (et .teuses ou .trices) sauront ce qui est correct et ce qui ne l'est pas.
L'épreuve de "sensitivity" aura un coefficient 8 dans les épreuves du C.A.P. de romancier.
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Samedi 21 Novembre 2020 à 17:18
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Cette relecture en plus d'être humiliante pour l'auteur, est d'autant plus stupide que cela suppose que les "relecteurs" sont exempts de préjugés, de bêtise et de haine.
Or, si on demandait à Dieudonné et à certains rappeurs, en qualité de "noirs victimes du discrimination", de corriger Mein kampf, ils ne trouveraient rien à enlever au texte original.
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Samedi 21 Novembre 2020 à 17:26
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Comme vous le suggérez, nous aurons, après les films, de la littérature d'une insipidité tellement rasoir que personne au monde ne voudra plus lire; Mais n'est-ce pas le but recherché afin d'abêtir les peuples ?
Ce qui est à craindre, et on l'observe déjà, c'est la mise à l'écart, et peut-être un jour la destruction, des oeuvres artistiques devenues politiquement incorrectes.