• Le footisme, maladie universelle

    Le footisme, maladie universelle

    Des supporters russes au stade Vélodrome, à Marseille, le 11 juin 2016, pendant le match Angleterre-Russie. BERTRAND LANGLOIS / AFP

    Comment ne pas être touché par cette fièvre contagieuse.

    Comment ne pas être transporté par ces hommes en caleçon qui se vendent à prix d’or dans les foires aux joueurs, après examen des muscles et des articulations (les dents importent peu).

    Comment ne pas être fasciné par leur maîtrise lorsque se tordant à terre de douleurs, ils réussissent malgré leurs souffrances à garder un œil attentif sur l’arbitre et sa poche miraculeuse d’où peut sortir à tout moment un carton coloré du meilleur effet.

    Comment ne pas haleter, le souffle court, pendant l’attente longue, très longue, très très longue, aussi longue que l’attente de la femme désirée, avant que l’élu tire son coup décisif dans la vulve des buts.

    Comment ne pas être bouleversé par l’orgasme intense qui s’empare alors de lui, au point de le faire courir tel un possédé en soulevant son maillot, pour se dresser à un coin du terrain face à ses supporteurs en délire comme le coq après s’être farci une poule.

    Comment ne pas être ému jusqu’aux larmes par la fraternité qui s’empare alors de ses camarades, soucieux de partager avec lui cet orgasme sans pareil en l’enfouissant les uns après les autres sous leurs corps en une superbe partouse homosexuelle lubrifiée par leur sueur commune.

    Comment des foules soumises à ce spectacle bouleversant pourraient-elles échapper au footisme, à cet état second qui les conduit à se déguiser, à chanter, à hurler, l’insulte à la bouche à défaut de bave, de préférence raciste, et prêtes, dans leur délire, à en venir aux mains ou aux couteaux pour que « leur sang abreuve nos sillons ».

    Comment ne pas ne pas subir de contagion devant ces faces peintes aux couleurs nationales masquant une hébétude qui parvient à atteindre même les gens sobres, même les gens intelligents, même les gens cultivés.

    Comment ne pas être pris de vertige devant un tel spectacle, et échapper à cette maladie qui transforme à ce point l’individu qu’elle permet de sonder de façon quasi expérimentale les profondeurs de la connerie humaine…

    Mais le footisme ne provoque pas seulement un délire agité et bruyant transformant la personnalité, il peut se compliquer de convulsions violentes, parfois stimulées par le spectacle des joueurs ou même le sifflet de l’arbitre, mais le plus souvent, à distance, dans les rues avec un impérieux besoin du contact humain, de préférence sur la tronche des supporteurs de l’équipe adverse. Les convulsions se terminent parfois par une phase comateuse favorisée par l’ivresse, fréquemment retrouvée dans cette pathologie, conduisant à l’hospitalisation ou par un état d’agitation nécessitant l’intervention musclée des équipes de secours.

    Le footisme est une maladie universelle qui n’épargne aucun pays, aucun peuple, quelle que soit sa culture ou sa religion. Certains sont cependant réfractaires, évitent la contagion, se réfugient où ils peuvent en attendant que l’épidémie passe.

    Nous ne connaissons ni les mesures préventives ni le traitement. Se pencher sur la question n’est pas sans risque pour les experts dont la plupart ne sont aucunement à l’abri des ravages provoqués par le ballon rond.

    « Sparadrap d’honneurParis sous la pluie »

  • Commentaires

    1
    Lundi 13 Juin 2016 à 18:10

    Je suis de celles qui outragée par la connerie, fuie et se réfugie très loin.

    Quand je les voie parfois,( par inadvertance) chez des amis à la télé, s'emmêler leur sueur dans un amas répugnant d'humains délirants et hurlants, j'ai envie de gerber!

      • Lundi 13 Juin 2016 à 18:44

        En ce moment nous sommes servis.

    2
    Lundi 13 Juin 2016 à 18:22
    ZAZARAMBETTE

    Ce spectacle me rappelle les écrits de Juvénal, poète de la fin du premier siècle, qui disait que tout ce dont le peuple a besoin ce sont « du pain et des jeux » (« panem et circenses »).

    Selon lui, pour soumettre le peuple décadent de Rome à sa volonté, il suffit de lui offrir de quoi manger (du pain) et de beaux spectacles (des Jeux) qui le satisferont amplement. C’est pour cette raison que l’on distribuait gratuitement du pain dans la ville et que l’entrée aux Jeux était elle aussi gratuite.

    PEUPLE DÉCADENT DU MONDE AU XXIème SIÈCLE  !

    Et oui, nous en sommes là, l'alcool a remplacé le pain et la rue les arènes

    Bonne soirée Doc

      • Lundi 13 Juin 2016 à 18:46

        La violence bête et méchante n'est pas d'aujourd'hui. Mais à présent elle est filmée et diffusée dans le monde entier

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    3
    Souris donc
    Mardi 14 Juin 2016 à 07:26

    Excellent tableau de la pathologie. Etiologie, signes cliniques, diagnostic, complications. Pour le traitement, il doit être drastique dans certains cas : camisole, entonnoir sur la tête, et hop, direction la Mad Pride. Je zappe les choses foot-balistiques, mais il me semble que l'usage de la canette comme projectile ne devrait pas faire tant de dégâts, car la viande soûle manque de précision et de force d'impact. Il doit y avoir du hooligan sobre ou alors du zadiste infiltré.

      • Mardi 14 Juin 2016 à 08:34

        On observe régulièrement des convulsionnaires chroniques qui à l'occasion de ces rassemblements passent en phase aiguë avec des crises d'agitation traumatisante tout de même exacerbées par l'absorption d'alcool.

      • Souris donc
        Mardi 14 Juin 2016 à 10:00

        Ah voilà. Ce qui explique la cellule de dégrisement, mais capitonnée. Et, plus radical, le canon à eau.

      • Mardi 14 Juin 2016 à 10:11

        L'eau pour diluer l'alcool. A noter l'expression : "boire un canon"

    4
    Mardi 14 Juin 2016 à 08:04

    Article splendide! Le footisme ne trouverait-il pas sa source dans le trafic de cette drogue qu'est le foot? On voit à qui profite ce trafic ce qui n'empêche pas de se demander si certains trafiquants ne consomment pas eux-mêmes leur produit.

      • Mardi 14 Juin 2016 à 08:39

        Il y a même une organisation de dealers corrompus qui a pignon sur rue.

    5
    Mardi 14 Juin 2016 à 10:29

    J'ai lu votre article deux fois, juste pour le plaisir ! Vous transcrivez ma pensée avec un brio inégalable. yes

      • Mardi 14 Juin 2016 à 10:37

        Merci ! sarcastic

    6
    Mardi 14 Juin 2016 à 10:57

    Moi, je crois que dans mes vies antérieures, j'ai participé aux  luttes des jeunes hominidés en quête du statut de mâle dominant, puis aux luttes rituelles des cro-magnons, j'ai été au Cirque voir les gladiateurs, j'ai assisté avec assiduité aux tournois et aux joutes des chevaliers , j'ai parié des sommes importantes sur des boxeurs ensanglantés...

    Voyez-vous, Doc, je n'aime pas me battre, mais j'aime bien voir ceux qui aiment se battre le faire. Ca me rappelle d'où nous venons. smile

      • Mardi 14 Juin 2016 à 11:09

        Ce modèle primitif ne nous a jamais quitté. Il a pris d'autres formes policées dans le meilleur des cas, mais il suffit d'enlever le papier et la ficelle pour qu'il réapparaisse dans toute sa brutalité.

    7
    vega
    Mardi 14 Juin 2016 à 16:31

    quelque chose me dit que vous n aimez pas le foot !!

    c est moins dangereux d aller à roland  garros  mais ça peut être douloureux pour les cervicales arthrosiques..

      • Mardi 14 Juin 2016 à 16:50

        Le jeu lui-même peut être amusant à regarder, c'est tout ce qui l'entoure qui est devenu déplorable. Il fut un temps où ce sport avait beaucoup moins ce caractère chauvin, violent et corrompu. Il suffit de regarder le contraste avec les autres sports dont certains sont très populaires comme le rugby.

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