• L’addition de l’addiction

    L’addition de l’addictionLorsqu’un événement survient heurtant l’opinion publique, le plus souvent le gouvernement se doit de réagir, et sa réaction la plus habituelle est de créer un comité Théodule, ainsi baptisé par De Gaulle, et parfois une commission parlementaire, les travaux de l’un comme l’autre aboutissant plus ou moins à enterrer l’affaire en attendant que l’opinion se calme et oublie. Une autre alternative, dont le gouvernement actuel a sans doute abusé, est le « collectif citoyen » qui a cependant l’inconvénient de raviver un problème plutôt que de l’enterrer puisqu’il est rare que l’on suive intégralement les propositions de ce collectif constitué, par définition, d’incompétents. Le drame récent où une adolescente de 14 ans prénommée Alisha a été tuée par un couple de ses « amis », sur fond de harcèlement, a conduit la ministre Marlène Schiappa a annoncé la création – comme on pouvait s’y attendre - d’un “comité de parents” contre le harcèlement scolaire dont l’objectif serait de “mieux outiller” les parents contre ce fléau. Je ne sais pas ce qu’il en sera des parents, mais y figureront des associations et des personnalités « qualifiées ». Le harcèlement des mineurs augmente, et en 2020, 3119 faits ont été enregistrés, notamment de cyber-harcèlement, visant des mineurs en France. On peut douter de l’efficacité que pourrait avoir ce « comité de parents » sur la prévention des violences entre adolescents, mais Marlène Schiappa se sentait obligée de faire quelque chose et un comité Théodule, ça ne mange pas de pain. Si le harcèlement scolaire où des enfants sont pris pour cibles par la majorité des autres est vieux comme l’école, car les meneurs ont toujours apprécié les victimes comme preuves de leur puissance, la nouveauté est l’amplification du phénomène que permettent aujourd’hui les réseaux sociaux où le sadisme peut s’exprimer lâchement sous anonymat. Pour un vieux singe comme moi qui n’a connu dans sa jeunesse ni internet, ni les réseaux sociaux, en survivant néanmoins à leur absence, je me pose bêtement la question : pourquoi la personne harcelée continue-t-elle à rester sur les réseaux sociaux pour recevoir quotidiennement des injures et parfois des menaces de viol ou de mort ? J’ose croire que ce n’est pas du masochisme, il faut donc admettre que la présence sur ces réseaux est devenue indispensable à la vie de la jeunesse : c’est une addiction quitte à en payer l’addition. Un exemple est donné par la jeune Mila qui continue à être menacée des pires sévices par une meute depuis qu’elle a dit vertement ce qu’elle pensait de la religion islamique après avoir été attaquée elle-même par des musulmans sur ses préférences. Non seulement elle continue à figurer sur les réseaux, mais elle a été récemment bouleversée par l’interruption de son compte Twitter (qui n’a pas tant de vigilance pour les comptes des violeurs et assassins potentiels) et elle a déclaré, soulagée, lors de son rétablissement : « J’ai retrouvé mon compte Twitter, je suis hypercontente ! ». Illustration : Egon Schiele "Jeune fille assise"

    « César se noie dans le Rubi-con370. Un principe sans précaution »

  • Commentaires

    1
    Lundi 15 Mars 2021 à 16:59

    Je crois qu'effectivement aujourd'hui, les "jeunes" et moins jeunes d'ailleurs ne pourraient se passer de l'addiction d'internet, la preuve vous et moi ne bloguons-nous pas ?

    Quand aux comités Théodule bien nommé par de Gaulle qui ne s'en laissait pas conter, c'est une autre paire de manches!

      • Lundi 15 Mars 2021 à 17:22

        Je pense qu'il y a une différence entre un blog qui s'apparente au journalisme et le réseau social où les textes sont courts du type émotionnel et destinés à être largement diffusés et repris.

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    2
    Lundi 15 Mars 2021 à 19:17

    Les réseaux sociaux sont des repaires de sociopathes.

      • Lundi 15 Mars 2021 à 19:30

        Une différence supplémentaire (du moins je l'espère et sans généraliser) entre blog et réseau.

    3
    Lundi 15 Mars 2021 à 19:52

    Le temps s'accélère : avant-hier c'est en lisant le journal que Victor Hugo en voyage apprenait la mort de sa fille; hier, nous, nous avions une seule chaîne de télé (sous la tutelle d'un ministre de l'information) pour nous informer; et aujourd'hui les jeunes (mais pas que) se livrent à des "battles" de haine, de menaces et d'injure en direct sur les réseaux sociaux.

     

    PS: je trouve la jeune Mila bien courageuse. Elle aurait pu se terrer et vivre dans la peur. Elle a préféré continuer à provoquer ses agresseurs. 

      • Lundi 15 Mars 2021 à 20:53

        Je ne sais pas si c'est le temps ou la bêtise qui s'accélère. Mila vit toujours dans la peur. Cette assuétude aux réseaux sociaux "quoi qu'il en coûte" me surprend tout de même. Les réseaux sociaux sont un champ de bataille plus qu'un moyen de communiquer ou de débattre.

    4
    Souris donc
    Mardi 16 Mars 2021 à 08:21

    Un "comité de parents" ?

    Mais les parents ont les mêmes addictions ! 

    J'ai invité enfants et petits-enfants au restaurant, nous étions une douzaine. Avant même de consulter le menu, ils étaient tous sur leurs tablettes. J'ai tenté de souligner leur manque de tact, ça a duré 5 mn, ils ont tous replongé.

    Il y a 2 générations d'addicts : les milléniaux et leurs parents.

     

      • Mardi 16 Mars 2021 à 08:40

        Mais pour ce qui concerne les travers possibles provoqués par cette addiction, la solution serait la levée de l'anonymat. La lettre anonyme est une lâcheté et une menace, pourquoi serait-elle admise sur internet ? Chacun devrait être juridiquement responsable de ses déclarations.

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