• A propos de livres

    Je lis assez régulièrement les chroniques que Kamel Daoud fait paraître dans Le Point. Algérien vivant à Oran, il a, me semble-t-il, un regard lucide et courageux (il est l’objet d’une fatwa létale) sur l’islam qu’il connaît bien puisqu’il a une vision de l’intérieur et qu’il a lui-même été très croyant dans sa jeunesse.

    Ce qui n’a pas empêché un aréopage d’intellectuels français, se proclamant meilleurs connaisseurs de l’islam que lui, de le conspuer lorsqu’il s’est permis de dire, après les agressions sexuelles commises sur plusieurs centaines d’Allemandes par des Arabes dans la nuit du jour de l’an 2016, que les musulmans avaient un problème sérieux avec la sexualité et le corps des femmes. Ce qui n’est pourtant qu’une évidence, mais aux yeux aveugles de ces intellectuels bien-pensants, il ne fallait pas toucher à ce qu’ils considèrent comme les nouveaux damnés de la terre quoi qu’ils aient pu faire.

    Dans sa chronique dans Le Point du 16/2/17 intitulé « Le droit de ne pas achever un livre », il écrit que l’on a le droit sans se sentir coupable d’abandonner un livre que l’on estime mal écrit ou ennuyeux. Ce qui m’a soulagé, car l’ironie veut que j’ai abandonné la lecture du roman par lequel il s’est fait connaître : « Meursault, contre-enquête ». Je l’avais largement entamé, mais je finissais par m’y ennuyer et la vie est trop courte pour persister dans l’ennui. J’ai néanmoins relevé dans cet ouvrage cette réflexion du héros qui m’a plu : « La religion pour moi est un transport collectif que je ne prends pas. J’aime aller vers ce Dieu, à pied s’il le faut, mais pas en voyage organisé » (p 76 Actes sud – Babel).

    A propos de livresDans sa dernière chronique, Kamel Daoud rapporte la réflexion d’un de ses collègues : « La religion est un livre qui a bien marché » et il ajoute cette phrase : « Autodafé inversé : le livre brûle le monde ». Il s’agit, bien sûr, des livres dits sacrés et je trouve cette phrase remarquable par sa vérité et sa concision.

    Le livre le plus original est la Bible hébraïque, l’Ancien Testament, une réussite dont les auteurs ne devraient pas se réjouir à titre posthume car leur œuvre littéraire a fait le malheur de leurs descendants en suscitant deux suites qui ont brûlé le monde : le Nouveau Testament et le Coran.

    « MacronnerieEntremetteurs »

  • Commentaires

    1
    Michèle
    Samedi 18 Février 2017 à 19:21

    J'ai très peur pour la vie de cet homme.

      • Samedi 18 Février 2017 à 19:39

        On peut le craindre

    2
    Souris donc
    Dimanche 19 Février 2017 à 09:08

    Avec un décalage, j’ai lu Le Point spécial Kamel Daoud. Dans son interview revient sans cesse l’idée des monothéismes. Et une fascination pour les pages narratives de la Bible (Job, Jonas).

    Là, problème.

    Les musulmans (pas nous, juifs ou chrétiens) revendiquent souvent ce creuset du monothéisme, ils ont amené l’expression "religions du Livre" qui nous n’employions pas. Cette ambiguïté nie la différence essentielle de la composante narrative de la Bible et des Evangiles que n’a pas le Coran qui n’est qu’une suite de préceptes totalitaires, régissant tous les aspects du quotidien (comment se torcher...Je ne sais pas vous, mais moi, à 3 ans les drôles savaient comment se torcher). Et une idéologie mortifère.

    La fatwa contre Kamel Daoud, et contre nous tous qu’il est haram de tuer en tant que mécréants. C’est le narratif qui permet de recontextualiser une religion, de l’ouvrir à une réinterprétation moins littérale. Ce que font les biblistes. Les ulémas, non. Et de moins en moins avec l’infiltration des Wahhabites et Frères musulmans en Occident.

      • Dimanche 19 Février 2017 à 09:49

        La Bible et les Evangiles sont en effet des récits plus ou moins légendaires. Ce sont des récits humains. Le Coran comporte d'une part une interprétation erronée de la Bible et d'autre part une liste des ordres et des châtiments venant directement de Dieu pour leur donner une valeur non discutable. Mahomet était peut-être comme le disait Ataturk "amoral et inculte", mais très malin. Les tribus juives de Médine auxquelles s'est abord adressé Mahomet (en vain, ce qui a conduit à leur massacre ultérieure) ont probablement influencé ses conceptions religieuses, mais il a pris du Judaïsme le pire : la séparation des sexes, l'importance des pratiques dont les pratiques alimentaires.

    3
    Dimanche 19 Février 2017 à 16:05

    On ne peut avoir que de l'admiration pour un intellectuel qui met ainsi sa vie en danger pour défendre des idées. Mais j'ai un petit (un minuscule) malaise sur le fait que sa démarche semble plus être de participer au débat sur l'islam en France plutôt qu'à celui de l'islam en Algérie.  

     

    PS : j'avais lu il y a longtemps, au moment où je laissais la lecture "utilitaire" pour la lecture plaisir, un ouvrage dont j'ai oublié l'auteur (Pennec ?) qui évoquait les droits fondamentaux du lecteur : 

    - le droit de ne pas achever un livre

    - le droit de remettre la lecture d'un livre à plus tard et d'en commencer un autre

    - le droit de zapper les descriptions interminables de feuilles mortes tournoyant dans l'atmostphère blafarde des crépuscules d'automne, de reflets bleutés sur les ciels rougeoyant et de blancheur immaculée du blanc manteau de l'hiver

    - le droit de regarder la fin (très utile pour se concentrer sur autre chose que le suspens : le style de l'auteur, par exemple, ou ce qu'il dit d'un sujet ou d'un pays qu'on connait bien)

    - le droit de ne pas aimer l'auteur, le droit d'oublier son nom, le droit d'aimer un livre de lui mais pas un autre

    - et d'autres droits que j'oublie

    Une seule obligation : lire les 100 premières pages avant de laisser éventuellement tomber

      • Dimanche 19 Février 2017 à 16:33

        Daoud parle de l'islam en général et son analyse peut donc s'appliquer à l'Algérie où il est également lu.

        C'est une charte du lecteur visant à le libérer de toute obligation.

    4
    Dimanche 19 Février 2017 à 17:49

    Que des personnes normalement constituées et pas trop incultes prennent pour "Vérité divine" absolue ce que des humains ont écrit dans un livre, reste pour moi un mystère absolu ! J'ai plus d'indulgence pour le Nouveau Testament dans lequel on trouve plus d'amour et de joie que de batailles et de préceptes.

      • Dimanche 19 Février 2017 à 18:24

        Le Nouveau Testament est d'une bonté...divine. Il a beaucoup de lecteurs mais peu d'adeptes.

    5
    Souris donc
    Dimanche 19 Février 2017 à 18:34

    La fatwa française après sa chronique Cologne, lieu de fantasme, semble encore le poursuivre. Daoud était annoncé, cette semaine, comme l’invité-vedette de Busnel, hélas en même temps que Eric-Emmanuel Schmitt (le Nothomb français) qui a monopolisé la parole. Et deux zigotos du bondyblog, la bien-pensance de banlieue. Un vrai malaise, dans cette émission. Impression que Daoud était tenu à distance. Il est resté sur sa réserve. Dommage.

    A propos de livres qui vous tombent des mains, ça fait 2 ans que je lis tous les soirs une page du portrait de Bach par John Eliot Gardiner. Soporifique. Du Stilnox.

      • Dimanche 19 Février 2017 à 18:42

        Une stupide mise à l'écart mais pas une mise à mort. 

        Certains livres devraient être prescrits contre l'insomnie plutôt que des médicaments.

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