• Le verbe

    Le verbe

    Dessin de Tom (Amsterdam)

    Quand on lit les articles des journalistes étrangers et notamment ceux des pays européens ou lorsqu’on les écoute à propos de la vie politique française, ce qui semble les frapper le plus est l’importance donnée dans les débats à l’idéologie. Ils s’étonnent que le débat serve plus à s’affronter en restant sur des positions dogmatiques et inconciliables qu’à trouver des points d’accord permettant d’avancer et de sortir des situations difficiles.

    Dans l’esprit des idéologues, le pragmatisme est un gros mot. Au lieu de tenter de sortir de la merde, beaucoup préfèrent y patauger pour rester dans la chaleur des idées toutes faites, ce qu’ils appellent des convictions, et peu importe si celles-ci sont inapplicables. L’idéologie peut même pousser l’idéologue à refuser de parler à l’autre, d’emblée considéré comme un ennemi puisqu’il n’a pas les mêmes idées que vous.

    De ce fait, étiqueter devient plus important qu’agir. Dans une récente émission télévisée, Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du Parti socialiste a affirmé que « le Parti socialiste ne sera pas social-libéral ! » et a estimé que son parti avait "un problème de doctrine" et devait "inventer un nouveau progressisme". Donc apparemment, pour cet homme politique le problème essentiel n’est pas de réduire le chômage, de permettre de vivre décemment de son travail et en sécurité, mais de définir une idéologie et de porter une étiquette, clefs fondamentales des solutions.

    De la même façon, l’étiquette appliquée à une personne est une marque indélébile qui peut la rendre d’emblée suspecte, et même condamnable, avant de pouvoir juger de ses actions. Le cas exemplaire est celui d’Emmanuel Macron, récemment nommé ministre de l’Economie dans le gouvernement socialiste, et considéré d’emblée comme un « social-traître » parce qu’il a travaillé dans une banque, et donc collaboré avec l’ennemi. On pourrait aussi logiquement penser que pour s’occuper d’économie, il est préférable de connaître la finance, et qu’un ancien cadre d’une banque (que l’on traite avec mépris de banquier comme si la banque lui appartenait) est probablement plus compétent que ces politiques dont la seule profession qu’ils connaissent est de faire de la politique, et qui, pour la plupart, n’ont jamais mis un pied dans une entreprise alors qu’ils prétendent réglementer son fonctionnement.

    Si tout a commencé avec le verbe, en cas d’abus, tout risque également de finir avec lui.

    « HumeurDavid et Goliath »

  • Commentaires

    1
    Lundi 1er Septembre 2014 à 12:00

    Les préjugés et les étiquettes collées sans réfléchir sur le dos des gens deviennent insoutenables.Tout cela pour défendre son idéologie.

    Je me souviens d'un patron communiste convaincu, Jean-Baptiste Doumeng, décédé en 1987, qui pu donner à manger à la France et aux français tout en gardant des idées politiques bien tranchées.

    Voici l'hommage de Gaston Plissonnier qui a assuré quelques temps l'intérim de Georges Marchais:

    « Ce vétéran du Parti, qui a passé toutes les tempêtes, était surtout un homme passionné. Passionné par la vie paysanne, passionné par l’intérêt national [...]. Avant tout profondément bon, il savait écouter les autres. Cet homme d’honneur ne participait pas à l’activité organisationnelle du Parti. Il était au service des relations commerciales de la France avec d’autres pays, un dirigeant international du mouvement coopératif ». « Jean », comme l’appelaient les siens, soulignait lui-même : « Je préfère agir pour la convergence économique internationale, qui me sélectionne pour une activité particulière, plutôt que d’assumer une tâche de propagande, disons le mot, dans un milieu condamné à rester témoin. »

    Une belle leçon dont certains politiques devraient suivre plutôt que de se cantonner dans leur idéologie archaïque.

    Bonne journée Doc. ZAZA

     

    2
    Lundi 1er Septembre 2014 à 12:09

    Donc son idéologie n'influençait pas son action. Nous pourrions dire qu'il considérait son idéologie comme une religion à exercer dans la sphère privée.

    3
    Lundi 1er Septembre 2014 à 12:31
    Bea007

    Eh oui, définir une idéologie est plus important aux yeux de beaucoup de nos gouvernants que de s'occuper de la politique pratique, la vraie, celle pour laquelle nous les payons, c'est à dire pour nous apporter une bonne organisation, une bonne répartition des taxes et pourquoi pas un mieux être. J'en ai assez de ces débats politiciens qui se regardent le nombril. Nous, les français d'en bas, nous existons aussi mais semblons transparents à leurs yeux. 

    Bonne journée.

    4
    Lundi 1er Septembre 2014 à 14:06
    Djefbernier

    Je ne sais plus qui m'a convaincu qu'une bonne part de responsabilité en revient au format télé. En définitive à son existence même.

    5
    Lundi 1er Septembre 2014 à 14:13

    Les vieux machins attachés à leur label "gauche de la gauche" et pour qui le mot "libéral" est la pire des insultes, semblent depuis ce week-end en perte de vitesse, mais ils n'ont pas dit leur dernier mot.

    A noter qu'à l'extrême droite, ils ont le même problème. Le label  "Front National" (on a envie d'ajouter "canal historique") est déjà est en passe d'être remplacé par le label "Rassemblement Bleu Marine", mais la vieille garde résiste et en fait une question de principe !

    6
    Lundi 1er Septembre 2014 à 15:14

    BEA. En France, le verbe précède l'action et gare à celui qui échappe à l'orthodoxie.

    7
    Lundi 1er Septembre 2014 à 15:18

    DJEFBERNIER. La TV est une caisse de résonnance universelle. Mais les combats idéologiques "hors sol" l'ont précédée.

    8
    Lundi 1er Septembre 2014 à 15:24

    CARLUS. Le parti communiste français a longtemps été très puissant, et il a laissé une trace profonde dans l'esprit des gens et dans les syndicats dont la plupart raisonnent selon le modèle de la lutte des classes.

    9
    Mardi 2 Septembre 2014 à 16:19

    Que voulez vous, ce pays est dogmatique, cela remonte au moins à la révolution française et probablement à plus longtemps encore. La Gauche est particulièrement sectaire et, sauf à opérer un improbable changement de cap, elle ne tolérera jamais que l'on fasse passer l'intérêt du pays avant sa liturgie. Voilà pourquoi nous sommes foutus.

    Amitiés.

    10
    Mardi 2 Septembre 2014 à 18:02

    Et les pays étrangers nous regardent avec curiosité et peut-être même avec un peu de commisération.

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