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En manque de guerre
Depuis plus d’un demi-siècle la France est en paix. Le terrorisme tue, mais ce n’est pas une guerre. Cette paix semble peser sur les générations qui n’ont connu qu’elle. Elles n’ont connu ni les bombardements, ni les soldats ennemis défilant dans les rues, ni les otages fusillés contre un mur, ni les officines où l’on torture ceux qui résistent, ni les camps d’internement où l’on meure. Elles n’ont connu que la démocratie : l’élection de leurs représentants, ce qui permet de leur cracher dessus, la libre expression sans la crainte d’être emprisonné pour une opinion, le libre déplacement à travers le pays sans papiers pour se justifier. Elles n’ont connu aucune pénurie vitale, mais au contraire des aides sociales de la part de l’Etat, c’est à dire des autres.
On peut comprendre qu’un tel manque devient insupportable à la longue. Alors on s’invente une guerre. L’Etat devient une dictature, le président de la République un dictateur, la police une armée ennemie, un défilé dans la rue une résistance, on suscite une arrestation pour avoir l’équivalent d’une torture, les victimes des accidents de la circulation qu’ils ont eux-mêmes provoqués comme l’équivalent d’un massacre qu’il faut honorer.
Générations actuelles, ne soyez pas nostalgiques, ne jouez pas à la guerre des boutons pour passer le temps et vous donner de l’importance, n’usurpez ni les mots, ni les choses, revendiquez comme la démocratie libérale vous en donne le droit, mais sans grandiloquence, et soyez patients, il suffit d’attendre, une véritable guerre avec des morts par milliers ou millions finit toujours par arriver.
Illustration : Goya « le 3 mai 1808 »
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Commentaires
3Souris doncDimanche 20 Janvier 2019 à 10:49La dissuasion nucléaire devrait nous préserver. Mais pas des armes sales de la guerre biologique, ni du terrorisme. La guerre des mots empêche l'autre de développer ses arguments.
"Dictateur"!!! : le nouveau point Godwin ?
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Dimanche 20 Janvier 2019 à 11:14
Tout échange ou tout compromis devient impossible si vous rangez d'emblée l'autre dans l'empire du Mal, si vous remplacez, en changeant la signification des mots, le discours par le mensonge et la propagande. "Dictateur" est peut-être un nouveau point Godwin qui permet de prendre sans grand risque la pose du révolutionnaire, mais qui n'efface pas l'autre, puisque CRS=SS est toujours d'actualité.
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Je me demande parfois combien de ces "rebelles", combien de ces "révoltés", combien de ces "insoumis" seraient entrés en résistance contre l'occupant nazi. Hors toute idéologie, du point de vue du courage seulement, combien de ces opposants à la féroce dictature de Macron se seraient risqués à attaquer la police d'un Pinochet, à menacer un Castro d'envahir le palais présidentiel cubain ou même à insulter un Poutine ?
PS : Je tiens à préciser que je me pose la question pour moi aussi . Et en attendant d'avoir (peut-être un jour) la réponse, j'évite de faire le fanfaron dans une France où je ne risque rien à dire haut et fort que je n'aime pas Macron.
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Dimanche 20 Janvier 2019 à 20:01
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Pour la prochaine (si prochaine il y a) ce seront plutôt des millions de morts.
Et on n'aura pas le temps de résister. Toutefois les guerres "conventionnelles" sont toujours à la mode.
NB. Je suis à nouveau interdit de commentaires sur votre blog, ça va, ça vient.