• Des chiffres et des êtres

    On peut se demander si aujourd’hui le droit de manifester n’est pas devenu un droit obsolète.

    A une époque où l’opinion publique ne pouvait s’exprimer qu’à travers les journaux ou le parlement, ce droit à s’exprimer dans la rue était un corollaire nécessaire à la vie démocratique, d’autant plus que les journaux, eux-mêmes orientés, peuvent aisément manipuler l’opinion, et que le parlement n’est jamais vraiment représentatif de la population en l’absence d’une élection à la proportionnelle intégrale, ce qui donne d’ailleurs une importance excessive aux formations élues par des minorités.

    Aujourd’hui l’opinion publique a de nombreuses possibilités de s’exprimer. Des sondages avec des questions précises, sans ambiguïté et une méthodologie rigoureuse en donnent déjà un bon aperçu. Les réseaux sociaux et les pétitions constituent d’autres angles d’évaluation, et internet permet d’imaginer d’autres modalités d’expression de l’opinion publique qui pourraient même être organisées officiellement.

    Mais voilà, il y a les chiffres et les êtres. Un million de signatures ont un impact bien plus faible qu’un million d’êtres humains qui prennent la peine de descendre dans la rue, d’autant plus qu’aujourd’hui ce n’est pas sans risques.

    Car il est devenu impossible de manifester en France quand il s’agit d’un problème économico-politique. Seules certaines manifestations sociétales, celles qui font consensus, se déroulent sans heurts. Les autres sont l’occasion pour des voyous estampillés d'extrême gauche ou d'extrême droite d’exprimer, non pas une opinion, mais une violence ou une volonté de pillage.

    Il fut un temps où chaque manifestation était encadrée et balisée et le plus souvent pacifique, la violence ne s’exprimant que dans les slogans. A présent on ne peut plus défiler dans les rues où le parcours est devenu systématiquement destructeur, surtout si les manifestants suivent l’itinéraire de leur choix.

    S’il s’agit de manifester en nombre pour exprimer une opinion, il n’est aucunement nécessaire de défiler pour mettre les magasins et le mobilier urbain du parcours à la disposition des voyous. Une masse populaire sur une esplanade serait même plus impressionnante qu’un défilé clairsemé dont l’importance est à chaque fois évaluée de façon discutable.

    Mais le nombre pour une manifestation n'est pas suffisant pour être efficace, il est nécessaire qu'elle soit nuisible.

    « La neige est saleD’un art à l’autre. »

  • Commentaires

    1
    Dimanche 25 Novembre 2018 à 16:49

    C'est vrai! Ils se fichent complètement des pétitions, du coup je n'en signe plus! C'est une perte de temps! Tandis que : 1 millions de personnes et surtout qui cassent! Cela leur parlent plus!

      • Dimanche 25 Novembre 2018 à 16:54

        Il est vrai que les pétitions ne cassent rien.

    2
    Dimanche 25 Novembre 2018 à 19:19
    Pangloss

    Se rassembler sur une esplanade pour se faire compter comme du bétail, c'est quand même rendre un peu trop évident le statut bovin (ou vitellin, aurait dit De Gaulle) du peuple français.

      • Dimanche 25 Novembre 2018 à 19:52

        Il me semble que dans beaucoup de pays étrangers les manifestations ne sont pas mobiles. Un défilé pourrait être aussi comparé à un troupeau en transhumance.

    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    3
    Dimanche 25 Novembre 2018 à 21:31

    Profitons des réseaux sociaux avant que monsieur Alex Mounir Mahjoubi, secrétaire d'état au numérique ne se fâche tout rouge... 

    Quant à une énorme masse populaire sur une esplanade... faire venir la chanteuse Régine... je ne vois pas très bien ou vous voulez en venir ? A moins que vous n'évoquiez les sit-in de notre folle jeunesse où on écoutait Bob Dylan en regardant pousser les brins d'herbe ...

    Il semblerait que ça revienne à la mode:

    Samedi 24 Novembre 2018 à 17:04

     

    ENVIRONNEMENT - Ce samedi matin, les associations de protection de l’environnement dont Collectif L214, Sea Shepherd, SPAP, ARPAP, Tia’i Fenua et la fédération des Associations de Protection de l’Environnement ont organisé un sit-in à la marina de Papeete. Elles demandent depuis déjà plusieurs semaines, le retrait des parcs à poisson. Un rassemblement qui n’a pas rassemblé beaucoup de monde, mais qui a attiré l’attention des automobilistes et passants.

    C'était écrit dans le journal...

    Bof.

     

      • Dimanche 25 Novembre 2018 à 22:47

        Oui, vous avez raison, avec de la musique ce serait bien. La fête de l'Huma en somme.

    4
    Lundi 26 Novembre 2018 à 07:23

    Tout le monde se souvient du ridicule achevé de Mélenchon prétendant qu'il avait réuni plus d'un million de manifestants alors qu'ils étaient 10 fois moins nombreux. 

    Aujourd'hui, à droite comme à gauche, tout le monde a intégré les fondamentaux CGT : donner soi-même les chiffres des manifestants, refuser de se laisser compter par d'autres (surtout par la presse), se qualifier de "peuple" quelque soit le nombre de manifestants, et surtout surtout privilégier la nuisance sociale (blocage des routes, des trains, des raffineries, etc)

      • Lundi 26 Novembre 2018 à 08:50

        Je vais en effet ajouter à ce billet que le nombre pour une manifestation n'est pas suffisant pour être efficace, il est nécessaire qu'elle soit nuisible.

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :