• 183. Les aléas de la mort programmée

     

    A l’heure où en France une famille se déchire sur la fin de vie d’un homme quadriplégique dans un état végétatif, à quelques lieux de cette polémique, en Belgique, abréger la vie d’autrui est légal, assuré par des médecins si les conditions pour le faire sont respectées.

    L’euthanasie est non seulement permise pour des cas désespérés mais également possible pour « souffrance mentale inapaisable ».

    Une étude* est parue dans le BMJ portant sur 100 patients ayant demandé à être « euthanasiés » pour cette raison entre octobre 2007 et décembre 2011. Le diagramme ci-dessous montre leur répartition selon le sexe et l’âge.

    183. Les aléas de la mort programmée

    On voit que 77% de ces candidats à la mort sont des femmes.

    90 de ces 100 personnes avaient des troubles psychiatriques divers où domine, bien sûr, la dépression pour la moitié d’entre eux. A noter l’existence 13 fois d’un stress post-traumatique et 10 fois d’un trouble de la conduite alimentaire.

    Un changement thérapeutique a pu être tenté, mais finalement 48 demandes sur les 100 ont été acceptées :

    - 35 ont été « euthanasiés » le plus souvent entourés par la famille, dans des conditions qui n’existent pas pour le suicide traumatique.

    - 2 se sont suicidés seuls.

    - 11 ont reporté ou annulé l’euthanasie. 8 d’entre eux se sont sentis soulagés de pouvoir éventuellement y recourir, 2 se sont rétractés en raison de la pression familiale et un dernier a été incarcéré (dans le groupe il existait 10 toxicomanes).

    52 demandes n’ont pas été acceptées :

    - 38 se sont rétractés avant décision

    - 8 ont réitéré leur demande

    - 4 se sont suicidés

    - 2 sont décédés de mort naturelle.

    En conclusion. Donner volontairement la mort n’est pas une mince affaire. J’avoue qu’en tant que médecin, programmé pour préserver la vie, c’est un dilemme que j’ai du mal à résoudre, surtout lorsqu’il ne s’agit pas d’une déchéance et/ou d’une souffrance physique.

    Je ne conteste pas que la souffrance mentale peut être insupportable, mais le sujet reste en possession de ses moyens et donc avec la possibilité de se suicider, ce qui a d’ailleurs été fait ici 6 fois sur 100. L’avantage de l’euthanasie est d’assurer une mort « plus sereine ».

    A contrario, sur les 48 sujets dont la demande a été acceptée, il s’avère que 11 sont restés vivants. Combien parmi les 35 « euthanasiés » seraient-ils restés en vie si on ne leur avait pas donné la mort ?

     

    *Euthanasia requests, procedures and outcomes for 100 Belgian patients suffering from psychiatric disorders: a retrospective, descriptive study

    « Lorsque les palourdes sont légèresJe gazouille, donc je suis »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 15:14

    Vous avez été programmé pour préserver la vie. Moi, je ne veux pas être manipulée, torchée et intubée pendant des jours et des jours par des soignants brutaux et sans égards parce que stressés. Quand mon chien de 15 ans a été atteint d'un cancer, le vétérinaire lui a injecté une cocktail lytique, le chien s'est assis tout doucement, j'ai dit "alors ?", le vétérinaire m'a dit, "ça y est, il est mort".

    Je trouve qu'un être humain mérite autant de prévenance qu'un chien. Chaque fois qu'un médecin se fait trainer en justice parce qu'une infirmière mal intentionnée l'a dénoncé, je signe la pétition.

    2
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 15:20
    fanfanchatblanc
    Un sujet douloureusement complexe voire insoluble. Perso j'aimerais ne pas faire subir à mes enfants et petits enfants l'humiliation de ma décrépitude. Mais je crains de n'avoir pas les moyens de m'offrir le suicide assisté qui existe je crois en Suisse. Il me reste l'espoir : m'endormir et ne pas me réveiller, le rêve de chacun de nous probablement.
    Bonne journée Dr WO
    3
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 15:37

    SOURIS DONC. Là il ne s'agit pas de la probabilité (pour ne pas parler de certitude) d'une mort à court terme avec son cortège éventuelle de déchéance et de douleurs que l'on veut éviter par l'euthanasie, mais de personnes suicidaires. Or on sait que le désir de suicide peut être temporaire. L'euthanasie offre ici un suicide confortable mais peut-être prématurée, c'est là toute la question, car en mettant à part toute question religieuse, chacun est maître de sa vie.

    4
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 15:43

    FANFAN. C'est en effet, je pense, le rêve de la plupart d'entre nous. D'autres rêvent de mourir au combat, mais le combat offre autant d'handicapés que de morts subites. 

    5
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 16:26

    Bref, l'étude BMJ montre que les femmes sont plus hystériques que les hommes ? Donc qu'il faut traiter leur demande avec plus de circonspection ?

    6
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 16:57

    Je ne dirais pas "plus hystériques" mais plus dépressives, et atteintes de troubles psychiatriques qu'il faut en effet prendre au sérieux. A moins qu'elles soient plus déterminées.

    7
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 17:01

    Outre cette étude, qui démontre des intentions plus importantes sur l'utilisation sur soi de la mort programmée, je suis de l'avis de Fanfan, "j'aimerais ne pas faire subir à mes enfants et petits enfants l'humiliation de ma décrépitude". Mes volontés dans ce domaine sont clairement exprimées, si je ne peux pas mettre fin moi même à ma vie ! Ce ne sont pas à des tiers de décider pour moi ! Bon après midi Doc.

     

    8
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 17:16

    Voilà qui est clair et déterminé. Navré d'avoir publié cet article alors qu'il fait un si beau soleil. sarcastic

    9
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 18:09

     

    Oui mais, Docteur Wo, hystérie vient du grec utérus, vous le savez mieux que moi. D'où toute une histoire des thérapies. De l'exorcisme à la psychanalyse, en passant par l'hypnose.

     

    Je me demandais si l’étude ne réactivait pas cette spécificité attribuée aux femmes.

     

    10
    Vendredi 31 Juillet 2015 à 18:55

    « Quelques philosophes anciens, et Platon lui-même, regardaient la matrice comme un animal, non seulement capable de se mouvoir d’un lieu à l’autre, mais encore susceptible de fureur. »

    Il y a un différence entre l'hystérie qui est réactive et la dépression qui ne l'est pas, mais il faut y ajouter les troubles de la personnalité retrouvés dans 50% des cas. Cette étude fait un constat statistique sans aucune interprétation, elle ne réactive donc rien. Mais on peut légitimement se poser la question : pourquoi ? Est-ce lié à la physiologie féminine ou à l'environnement social ? Probablement au deux.

    11
    Samedi 1er Août 2015 à 16:44
    Pangloss

    Un livre "Suicide mode d'emploi" a fait parler de lui il y a quelques années. Il a, je crois, été interdit.

    12
    Samedi 1er Août 2015 à 17:06

    Il y a au moins trente ans. Il a été rapidement interdit, considéré comme un encouragement à se suicider.

    13
    mamyours
    Mercredi 5 Août 2015 à 11:37

    pas si simple que cela la fin de vie en belgique ! je parle bien de personnes pour qui il n'y a plus d'espoir !

    ma belle fille belge vient de le vivre avec son grand pere !!!! la encore je mets en doute ce que les medias nous racontent !!

     bonne journee

    14
    Mercredi 5 Août 2015 à 11:40

    Là il s'agit d'une étude. On devrait a priori lui faire confiance.

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