• Les poubelles de l’histoire

     

    Les idéologies et les idées imposées aux masses finissent tôt ou tard par être abandonnées ou par échouer ou être combattues et sombrer, noyées dans le sang.

    On est soulagé de les voir disparaître. Jetées dans les poubelles de l’histoire, on croit que celles-ci seront vidées dans les décharges à l’abri des cerveaux pour éviter de les polluer. On espère qu’elles seront incinérées ou broyées afin qu’il n’en reste plus rien pour les générations futures.

    Erreur. Les poubelles de l’histoire ne sont jamais vidées.

    Les idéologies et les idées naissent mais ne meurent jamais, elles s’évanouissent, errent comme des fantômes et hantent les esprits.

    Après le temps nécessaire pour que disparaissent les générations qui les ont subies, après le temps nécessaire pour que l’oubli s’installe, les idéologies et les idées, aussi nocives furent-elles, réapparaissent.

    Bien sûr, leur nom change, leur façade est repeinte, les bonimenteurs sont souriants, et jurent la main sur le cœur ne pas avoir tiré les nouvelles idées des anciennes poubelles et persuadent les masses que celles qu’ils proposent sont devenues indispensables. Comme elles l’étaient avant d’être jetées dans les poubelles de l’histoire.

    Et les gens s’y laissent prendre car quand on est dépourvu il ne reste qu’à fouiller dans les poubelles, et d’accepter ce que l’on en sort, même s’il faut se pincer le nez pour s’en nourrir.

    Les poubelles de l’histoire

    René Magritte « L'avenir des statues »

     

    PERSUASION

     

    Un homme vaincu

    a forcément tort

    Un homme mort

    est un homme convaincu

    Un convaincu a tort d'être mort

    il ne peut plus dire ses torts au plus fort

     

    Et lorsque s'accumulent les morts pour leur bien

    on les met ensemble dans des fosses communes

    où les hommes se retrouvent enfin

    et que disparaît leur rancune

     

    Plus le vainqueur tue de gens plus il sera décoré

    Et les survivants persécutés persuadés

    feront au tueur de grandioses  statues

    sur les places et dans le vide des rues

     

    Paul Obraska

    « 172. Sidaction négativeLa nouvelle »

  • Commentaires

    1
    Mardi 31 Mars 2015 à 11:10

    Un convaincu a tort d'être mort car il ne peut, reconnaître ses torts, applaudir son vainqueur ni lui dire qu'il avait bien raison. Même de le tuer.

    C'est en ignorant l'Histoire qu'on en arrive à croire que les poubelles ne sont que des réservoirs d'idées.

     

    2
    Mardi 31 Mars 2015 à 11:13

    Bien vu!

    Les poubelles sont pleines des déchets de Lénine, Staline, Adolphe, Mao et de tous les autres, rien de bon là-dedans, mais on les fouille toujours, puisque comme vous le dite, ceux qui veulent nous mener, n'ont pas d'idée, il repeignent donc ces idées pour les rajeunir!

    3
    Mardi 31 Mars 2015 à 11:15

    PANGLOSS.Outre l'ignorance de l'histoire, il y a aussi sa falsification.

    4
    Mardi 31 Mars 2015 à 11:19

    LIVIA. Et le XXème siècle a largement rempli les poubelles.

    5
    Mardi 31 Mars 2015 à 11:24

    Triste constat Doc et tellement vrai. L'être humain est irrécupérable et comme vous le dites si bien, rien ne se perd dans les poubelles de l'histoire, et ce qui ressort est encore plus nauséabond, les idéologies reprises bien souvent transformées dans le mauvais sens de l'histoire. Un très beau texte sous l'avenir des statues de René Magritte. Bonne journée. ZAZA 

    6
    Mardi 31 Mars 2015 à 11:36

    ZAZA. Les modèles de société sont en fait limités et aucun n'est parfait. La question est toujours : comment éviter les pires ?

    7
    Mardi 31 Mars 2015 à 16:18

    C'est vrai que la tentative de certains de recycler les déchets de l'Histoire n'est pas très ragoûtante. Mais je suis moins pessimiste que vous : nous saurons faire le "tri sélectif" (pour employer un pléonasme à la mode)

    8
    Mardi 31 Mars 2015 à 16:29

    Les éboueurs tardent à venir.

    9
    Mardi 31 Mars 2015 à 18:35

    Vous prêchez un convaincu!


    Amitiés.

    10
    Mardi 31 Mars 2015 à 19:06

    Un convaincu sans violence...et sans prêche smile

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