• 31. La puce, le rat et l'homme

    La peste a été à l'origine de pandémies dévastatrices : celle de Justinien, au VIe siècle, fit  des millions de victimes au pourtour méditerranéen, celle du Moyen Age, au XIVe siècle, tua près de la moitié de la population de l'Europe et la peste dite océanique de la fin du XIXème au milieu du XXe siècle fit douze millions de morts.

    La peste a semblé longtemps être l'expression du courroux divin et les médecins ne croyaient donc  pas à la contagion. Mais les gens, eux, ont vite compris que la fréquentation des pestiférés conduisait à le devenir et que la navigation était source de dissémination. La première réaction était donc de fuir. Si la fuite pouvait éviter d'être atteint, elle permettait aussi à la maladie de se disperser.

    La peste au Moyen Âge

    Le pape Clément VI, en Avignon, ne quitta pas la ville, s'enferma entre deux murs de flamme, ce qui ne l'empêcha pas de prendre des mesures nécessaires et de promulguer deux bulles affirmant - en vain - l'innocence des juifs, victimes d'une folie meurtrière contagieuse qui se propagea en Europe de 1348 à 1352. Après les juifs, on rechercha des semeurs de peste, des « graisseurs », des « ...empoisonneurs qui frottent les portes avec du pus de pestiféré par une méchanceté infinie » (Ambroise Paré). A Milan, en 1630, un vieillard perdit ainsi la vie pour avoir essuyé un banc d'église avant de s'y asseoir.

    Des mesures sérieuses d'isolement, d'hygiène et touchant la navigation furent prises dès la fin du XIVème à Venise, imitées par les autres pays. Sous Louis XIII, les médecins amenés à visiter les pestiférés durent mettre un habit spécial avec un masque aux yeux de cristal et un long nez empli de parfums qui les faisait ressembler à de grands oiseaux. Lors de la peste de Marseille, le Régent fit édifier un mur pour empêcher les Marseillais de contaminer le reste du royaume. Mais les précautions les plus sévères pouvaient être contournées. En 1799 Bonaparte, venant d'Egypte et de Jaffa où la peste était présente, évita la quarantaine,  en faisant escale en Corse exempte de peste et dernier port d'attache, lui permettant d'obtenir une patente « nette », avant de toucher le continent.

    La peste à Marseille en 1720

    Des moyens moins sérieux furent essayés. A partir du XVIIème on perfora le courrier pour y faire pénétrer des vapeurs, on conseilla de fumer du tabac et pendant la peste de 1665 on obligea même les étudiants d'Eton  à le faire jusqu'à les fouetter. Les parfumeurs firent fortune en créant des compositions pour se préserver des miasmes et l'eau de Cologne vit ainsi le jour. Les palefreniers semblaient être protégés et pendant la peste de Moscou en 1771, on s'arrachait les couvertures de cheval et les nobles restaient en selle le plus longtemps possible. Des amulettes protectrices les plus diverses furent essayées, certaines religieuses, d'autre moins comme des crapauds séchés pendus autour du cou ou des dents de pestiférés que l'on pouvait sucer. Pourtant Jérôme Fracastor dès 1546 avait affirmé la contagiosité de la peste par des particules invisibles à partir du malade et de tout objet ayant été à son contact. Les dents étaient ainsi bien placées pour être contagieuses.

    La peste résulte d'un ménage à trois : la puce, le rat et l'homme. Alexandre Yersin découvrit en 1894  le microbe responsable, dans une petite paillote, près de l'Hôpital de Hong-Kong où il vivait et travaillait sur des cadavres de pestiférés, les anglais lui ayant interdit d'approcher les malades. Yersin, inhumé en 1943 à Nha Trang, est considéré par les Vietnamiens comme un héros national. C'est en 1898 à Karachi que Paul Louis Simond découvrit le rôle de la puce et du rat comme réservoirs et mode de transmission.

    La peste est maintenant curable par les antibiotiques. Elle avait déjà pratiquement disparu d'Europe au XVIIIe siècle sans qu'on en sache très bien les raisons. L'invasion du rat gris qui a remplacé le rat noir plus sensible à la maladie en serait une des principales causes.


    Documentation réunie avec la collaboration de Jean Waligora

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 8 Août 2008 à 09:17
    Coucou cher docteur, je viens de créer un nouveau blog, plus personnel ... J'y attends tes commentaires. A bientôt. Silvia
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