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Je n’ai jamais compris les personnes qui éprouvaient le besoin de consulter les charlatans : astrologues, voyants, cartomanciens, devins…pour connaître leur avenir. Il y a même des personnages contemporains fort connus comme Mitterrand, Chirac ou De Gaulle qui ont cédé à la tentation, peut-être parce qu’ils hésitaient à prendre des décisions importantes, ce qui prouve que devant l’inconnu, la raison s’efface et la magie réapparait.
Pourtant, qu’ai-je fait pendant toute ma vie professionnelle sinon tenter de prévoir l’avenir de mes patients et essayer d’en modifier le cours. Certes, le jeu de cartes n’était pas étalé par hasard et je ne faisais pas appel à des forces occultes, mais j’aurais aimé parfois le faire avant de prendre une décision difficile.
Il est probable que dans l’avenir l'IA générative fera office de « forces occultes ». C’est l’ambition de Delphi-2M, un nouveau modèle d’IA générative présenté par une équipe allemande dans Nature. « Cette IA a été entraînée à partir des données de santé « anonymisées » de 400 000 volontaires britanniques de la UK Biobank, puis validée sur celles de 1,9 million de patients danois (malgré cela la population testée ne serait parfaitement représentative de la population générale).
Son objectif : « apprendre la « grammaire » des maladies humaines pour mieux prédire leur survenue ». Elle estimerait la probabilité qu’un individu développe une pathologie donnée, parfois plus de dix ans à l’avance et ceci pour 1000 maladies !
Ces prédictions auraient deux intérêts : d’une part, orienter plus efficacement la prévention individuelle en dépistant des signaux faibles, et d’autre part, faire des simulations collectives permettant d’orienter les objectifs de santé publique. « Le modèle est « particulièrement performant » pour les pathologies à évolution régulière comme certains cancers, l’infarctus du myocarde ou la septicémie. En revanche, ses performances sont moindres pour les maladies mentales, infectieuses ou les complications obstétricales, dont la survenue est plus imprévisible. ».
D’un côté le génome permet des prédictions, et l’IA va apporter celles basées sur la clinique. Les générations futures sont bonnes pour embarquer sur des probabilités vers le Port de l’angoisse, mais de toute façon on connait la destination finale.
Illustration : Albert Anchor : « Diseuse de bonne aventure » 1880
Source : Shmatko A et col. Learning the natural history of human disease with generative transformers. Nature. 2025. DOI : 10.1038/s41586-025-09529-3. Rapporté par le Journal International de Médecine