• 41. Il faut avoir la foi pour guérir

    « …avec une tendresse spéciale pour les charlatans sans oublier le vrai médecin qui, au-delà d’un certain seuil de notoriété, passera inévitablement pour un guérisseur d’écrouelles et un « gourou médiatique ».[1]

    Avoir la foi pour guérir n’est pas une idée complètement fausse. Cependant il ne nous semble pas – avec regret - que la foi puisse guérir une maladie organique. La foi peut donner l’illusion de la guérison lorsqu’on se pense malade sans l’être, lorsque la guérison d’une maladie est attribuée à la foi, alors qu’elle disparaît toute seule, sans contester le rôle de la foi dans certains désordres psychiques ou même à l’origine d’une amélioration transitoire dans des maladies organiques. Mais bien entendu le domaine de la foi n’est pas celui de la raison. On peut démonter un miracle mais pas le démontrer.

                                                                                  

    Où le guérisseur rémunère celui qu’il guérit

    Le toucher des écrouelles illustre dans le passé la croyance dans les guérisons miraculeuses. C’était la seule imposition par les rois de France, d’Angleterre et d’Ecosse qui ne leur rapportait rien. Elle leur coûtait même, car chaque malade admis en présence du roi recevait une monnaie d’or, si bien que par mesure d’économie (Louis XIV aurait touché deux à trois mille personnes) on fût amené à réduire la taille des pièces. Le plus souvent les ulcères tuberculeux du cou finissent par se refermer spontanément. Le roi d’Angleterre Guillaume III, qui ne croyait guère en son don miraculeux, aurait murmuré aux scrofuleux qui défilaient : « Que le Seigneur t’accorde une meilleure santé et te donne du bon sens » [2]

                                                                                  

    Les vertus de la prière

    La prière a toujours fait partie de l’arsenal thérapeutique préventif et curatif. Il est donc normal de vouloir juger son efficacité. Au XIXe siècle, le cousin de Darwin, sir Francis Galton, l’eugéniste qui voulait tout mesurer, fit une enquête statistique sur celle-ci, en comparant la mortalité dans les différentes classes sociales. Il en résulta que c’est la famille royale qui avait la plus courte espérance de vie malgré le flot de prières en sa faveur, la reine Victoria exceptée. La sincérité des prières ne semble pas avoir été prise en compte. De nos jours on est plus sérieux et ce sont des études randomisées en double aveugle qui montrent un effet favorable sur les troubles coronariens, l’arthrite rhumatoïde et même le taux de réussite de la fécondation in vitro. Toutefois les auteurs, prudents, se gardent de conclure.

                                                                                    

    Les vertus de la compassion

    Le médecin qui qualifie volontiers de miracle une guérison inespérée due à son traitement reste souvent dubitatif devant une réussite attribuée à l’intervention divine. Pourtant «  Il y a plus de faits vrais que de faits démontrables ». (Gödel).

    Innombrables, spécialisés ou généralistes, les saints guérisseurs ont succédé aux dieux païens thaumaturges et ont leurs équivalents dans toutes les religions. Certains médecins sont tellement dévoués à leurs malades, qu’on les qualifie parfois de saints laïques. Cependant comme les saints religieux, ils sont loin  d’être toujours guérisseurs, bien que certains prétendent que la compassion augmente les défenses immunitaires de l’organisme  en élevant le taux d’immunoglobuline A et donc accroît la durée de vie[3].

                                                                                            

    Comment retrouver son âme

    D’après Saint Thomas d’Aquin le fœtus acquiert son âme quarante jours après la fécondation chez l’homme et quatre-vingt jours chez la femme. Le médecin ne soigne que son support supposé. C’est le domaine du prêtre dont la tâche est plus aisée car il n’est soumis à aucune obligation de résultat. D’où la mode des chamans. Ceux de la république de Touva, au fin fond de la Sibérie, attirent des « spiri-touristes » car ils «  peuvent retrouver l’âme égarée des malades et les soigner »[4].

     

     

    Ducumentation réunie avec la collaboration de Jean Waligora



    [1]  Régis Debray Cours de médiologie générale éd Gallimard, folio 2001

    [2]  Cité par Kenneth Walker, Histoire de la Médecine

    [3] Le Dalaï-Lama et Howard Cutler cités par Pascal Bruckner, L’Euphorie perpétuelle, éd Grasset

    [4] Le Point du 9/05/2003

      


     

    « Heureux !Atmosphère »

  • Commentaires

    1
    Jeudi 20 Novembre 2008 à 20:12
    Le psychisme a une origine organique, non?
    2
    Jeudi 20 Novembre 2008 à 20:53

    Le psychisme dépend de l'organique mais aussi du vécu. Inversement l'organique ne dépend que rarement du psychisme même s'il existe une pathologie psychosomatique mais sans altération des organes eux-mêmes.

    Dr WO

    3
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 10:38
    Ouais...Alors expliquez moi pourquoi après un gros choc psychologique certains déclenchent une maladie grave ? J'ai plusieurs exemples vécus par des proches : cancer, Charcot...
    4
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 11:13
    Ou tout simplement tombent dans les pommes! Le "vécu", même émotionnel s'inscrit dans le cerveau ... qui serait le siège de la "psyché"
    5
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 11:16
    Point d'interrogation après "Psyché". Mais On peut dire aussi "âme". ce qui, bien sûr, nous distingue des animaux. Eux n'ont pas d"âme", les pauvres!
    6
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 17:51

    J'ai dit que l'organique (c'est à dire des lésions d'organes) ne dépend que rarement du psychisme, je n'ai pas dit jamais. Le stress peut parfois provoquer ou accélérer certaines maladies. Il faut cependant se méfier des coïncidences, les gens ont tendance à attribuer leur maladie à un facteur extérieur.

    Dr WO

    7
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 17:59

    "Tomber dans les pommes" n'est pas une maladie : c'est phénomène fonctionnel. Le cerveau n'est pas atteint , il réagit à l'émotion en stimulant un circuit nerveux qui provoque une chute de la tension artérielle (là je suis franchement pontifiant...)

    Dr WO

    8
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 18:07
    C'est vrai aussi. Il me semble malgré tout, même si je ne suis pas spécialiste en la matière, que corps et "âme" ou psyché ou ce qu'on veut sont inséparables et ne peuvent "fonctionner" l'un sans l'autre. Je l'exprime sans doute mal...
    9
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 18:11

    Ne faisons pas comme Descartes qui situait l'âme (ou sa jonction avec le corps) au niveau de la glande pinéale du cerveau.

    Dr WO

    10
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 18:22

    Certains médecins du passé disaient que la pensée était "une sécrétion du cerveau". Il n'y a évidemment pas de pensée sans corps (bien que des religions nous invitent à le penser) mais il peut y avoir un corps sans pensée (pour Descartes c'est le cas des animaux).

    Dr WO

    11
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 18:29
    Descartes! Demain matin dans mon bureau!
    12
    Vendredi 21 Novembre 2008 à 18:45

    Il n'existe plus puisqu'il ne pense plus.

    Dr WO

    13
    Samedi 22 Novembre 2008 à 10:42
    Et le coeur, siège du sentiment? Il est vrai que "Bonjour, mon coeur!", ça sonne mieux que "Bonjour, mon pancréas" ou "Bonjour, mon duodénum!". Mais c'est vous qui voyez.
    14
    Samedi 22 Novembre 2008 à 12:25

    Les sentiments ont été mis dans un muscle creux compartimenté, comme dans une boîte à bijoux.

    Dr WO

    15
    Mercredi 26 Novembre 2008 à 06:49
    Le psychisme serait comme l'huile d'un moteur (en mécanique, je suis bonne). Les croyances stressantes - justifiées ou pas - créent des fuites qui endommagent le moteur qu'il faut ensuite réparer même si "on remet de l'huile. Si une fois le moteur réparé "on ne remet pas de l'huile" la même avarie se reproduira et sans doute plus grave sur ce moteur qui n'était déjà plus neuf. D'où les recommandations de la chanson "mets de l'huile", peut-être.
    16
    Mercredi 26 Novembre 2008 à 08:42

    C'est une façon de voir, mais je pense que la mécanique humaine est plus compliquée qu'un moteur. Le psychisme peut contribuer à la guérison mais il peut aussi détériorer la santé comme une huile de mauvaise qualité si l'on s'en tient à votre comparaison.

    Dr WO

    17
    Mercredi 26 Novembre 2008 à 10:16
    Bien que vous préfériez sans doute les histoires d'wo, pour compléter cette histoire d'huile, ce sont les mauvais stress qui représentent pour moi les huiles de mauvaise qualité (ou qui génèrent les fuites d'huile) Même si les bons stress, à trop forte dose, sont parfois dangereux aussi, pour la santé. Gagner 1000000000000000€ au loto, par exemple.
    18
    Mercredi 26 Novembre 2008 à 17:23

    Il n'y a pas de bons ou de mauvais stress. Tout dépend de la façon d'encaisser le choc émotif par l'organisme, mais il est vrai qu'une joie est moins detructrice qu'un malheur et on peut difficilement la considérer comme un stress.

    Dr WO

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