• Une sainte qui sent le fagot ?

     

    Une sainte qui sent le fagotJ’ai eu l’occasion de voir à la télévision Mère Teresa qui doit être, demain, transformée en sainte grâce à une guérison qui tient plus de l’arnaque que du miracle[1].

    Cette vieille femme au visage masculin et rude m’avait toujours mis mal à l’aise : c’était une pratiquante expérimentée du show-biz. Ceux qui n’était pas intoxiqués par la mousse médiatique qu’elle cultivait avec délectation la considéraient comme ultraréactionnaire, ennemie de toute réforme de l’Eglise, notamment lors du Concile de Vatican II : « nous avons assisté à l'élévation et à la consécration du dogmatisme extrême, de la foi étriquée et d'un culte d'une personnalité humaine des plus médiocres » (Christopher Hitchens). Il est logique qu'elle ait été contre l’avortement, mais elle le considérait, en outre, comme «le plus grand destructeur de la paix» dans sa déclaration lors de la remise de son Prix Nobel de la Paix. Bien qu'étant contre le divorce, elle déclara en 1996 « qu'elle était heureuse du divorce de son amie la Princesse Diana, parce que son mariage avait été manifestement malheureux ».

    C’est que cette sainte était l’amie des riches, surtout lorsqu’ils donnaient de l’argent, et même des pires comme la famille Duvalier en Haïti dont elle eut la charité de louer le régime.

    Par contre comme l’avait écrit Hitchens en 2003 qui la considérait comme une fanatique et une imposture : « MT n'était pas une amie des pauvres. Elle était une amie de la pauvreté. Elle disait que la souffrance était un cadeau de Dieu. Elle passera sa vie à combattre le seul traitement connu contre la misère : l'autonomisation des femmes et leur émancipation d'une existence de bêtes de somme à la reproduction obligatoirement compulsive. »

    On pourrait la soupçonner d'avoir éprouvé une certaine jouissance dans la contemplation apitoyée de la souffrance des autres dont elle refusait  qu'elle fût soulagée par des analgésiques, assimilant cette souffrance à celle subie par le Christ. La plupart des saints furent plutôt masochistes, Mère Teresa pourrait être classée dans la catégorie des sadiques compassionels, d'autant plus que pour sa maladie elle a eu recours aux meilleures cliniques.

    Malgré tout l’argent récolté, son hospice de Calcutta était toujours aussi délabré[2] à sa mort comme de son vivant, mais elle aurait ouvert, en toute humilité, plus de 500 couvents au nom de sa congrégation.

     

    [1] « Une Bangladaise, Monica Besra, affirme qu'un rayon de lumière est sorti d'une photo de Mère Teresa qu'elle avait en sa possession à son domicile, et l'a guérie d'une tumeur cancéreuse. Son médecin, le Dr. Ranjan Mustafi, déclare que sa patiente n'a jamais eu de cancer et que son kyste tuberculeux s'est résorbé grâce aux médicaments qu'il lui avait prescrits »

    [2] « Bon nombre de bénévoles partis à Calcutta en revinrent violemment désillusionnés par la raideur idéologique et l'amour de la pauvreté qui suppuraient des «Missionnaires de la Charité», leurs dires ne purent que tomber dans des oreilles de sourds. »

    "Lors d’une enquête sur les conditions de soin et d’hygiène dispensés dans les centres des missionnaires de la Charité, Aroup Chatterjee – auteur de Mother Teresa : The Untold Story (ed. Fingerprint, non traduit) – découvre que les seringues y sont plusieurs fois utilisées, que des médicaments périmés y sont administrés, que des enfants y sont attachés à leur lit et que l’aspirine n’est que rarement utilisée. Des pratiques amenées à changer. « Mère Teresa a glorifié la souffrance, car elle pensait que cela rapprochait de Jésus-Christ ». D'après lui : elle n’était qu’une obscurantiste et une démagogue »." (Le Monde.fr du 4/09/16)

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  • Commentaires

    1
    Samedi 3 Septembre 2016 à 18:44
    ZAZARAMBETTE

    C.Q.F.D.Doc.... J'ai toujours eu des doutes sur les fonds recueillis par cette "sainte".

    Bonne soirée dans la chaleur encore.

      • Samedi 3 Septembre 2016 à 18:56

        Il n'y aurait jamais eu d'audit sur l'utilisation de l'argent récolté. On montrait toujours dans les médias l'aspect misérable et convainquant de l'hospice de Calcutta.

    2
    Samedi 3 Septembre 2016 à 20:56

    Je n'aime que les "saint laïcs" qui font le bien par amour de leur prochain et non pour gagner leur paradis en obéissant à une injonction divine.

      • Samedi 3 Septembre 2016 à 22:57

        Je suis bien de cet avis, un saint doit être totalement désintéressé. MT se prenait pour "un crayon dans les mains de Dieu", en toute simplicité.

    3
    Souris donc
    Samedi 3 Septembre 2016 à 21:11

    Le pape François n'en loupe pas une. Bien que la béatification de Mère Térésa remonte à Jean-Paul II qui a eu la peau du communisme. Canoniser, c'est tout une procédure. Ainsi, Jeanne d'Arc est devenue une sainte, avec une légende. La bergère, les voix. Or elle monte à cheval. Donc elle appartient à l'aristocratie. Hypothèse : fille d'Isabeau de Bavière ?

    Michel Pastoureau, dans L'Ours, histoire d'un roi déchu, montre comment l'Eglise s'arrange pour intégrer les mythologies les plus éloignées de son dogme.

      • Samedi 3 Septembre 2016 à 22:58

        C'est le côté populiste de l'Eglise.

      • Souris donc
        Dimanche 4 Septembre 2016 à 08:59
        Et son habileté. Récupérer le paganisme, les mythologies, plutôt que de les combattre.
      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 09:28

        La croyance confortablement installée hors de la raison est une mythologie. Il serait suicidaire pour les religions de la combattre, elles ne combattent que les mythologies concurrentes.

    4
    Dimanche 4 Septembre 2016 à 08:21

    "La pauvreté plus que les pauvres", je suis d'accord avec la formule. J'ai toujours perçu les curés de mon enfance comme ça. Un mode de vie très austère, certes, mais faisant toujours la morale aux pauvres gens sur un ton condescendant, voire un peu méprisant,  alors qu'ils s'adressaient avec respect et  obséquiosité aux notables. 

    Comme vous le soulignez, elle avait en quelque sorte dispensé sa copine Lady Dy de se conformer à sa morale chrétienne extrêmement rigide.

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 08:36

        Le pire est le sadisme dont elle a fait preuve en ne soulageant pas par des analgésiques la douleur des mourants (sous prétexte qu'elle n'était pas médecin, mais elle aurait pu faire appel à un vrai soignant) afin qu'ils puissent ainsi rejouer la mort douloureuse du Christ.

      • Souris donc
        Dimanche 4 Septembre 2016 à 09:04

        Qu'elle ait été peu regardante sur l'origine des fonds ne me choque pas, c'est du pragmatisme. Mais la "souffrance rédemptrice" : révoltant et sadique.

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 09:17

        C'est là, en fait, où son dogmatisme aveugle et buté devient immoral et inhumain.

    5
    Souris donc
    Dimanche 4 Septembre 2016 à 08:44

    Côté populiste, certes. La sanctification procédait de la pédagogie ("édification") à une époque où la narration s'adressait à des illettrés. Comme les fresques murales et les vitraux. Je n'ai rien contre un peu de narration, de légende, que je trouve préférable à la suite des prescriptions coraniques. Saint François et ses oiseaux ont inspiré Messiaen, Saint Roch et son teckel, toute une statuaire. Sans parler des peintres de la Renaissance inspirés par Saint Jérôme, ses livres, ses vanités.

    Mais à notre époque où tout se vérifie et se propage sur les réseaux sociaux, quelle est encore pour l'Eglise l'utilité d'avoir de nouveaux saints aussitôt contestés, comme on le voit avec Mère Térésa ?

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 09:12

        Question que l'on peut en effet se poser d'autant plus que Jean-Paul II fut un faiseur prolifique de saints. Le bon peuple croyant reste toujours friand des légendes et des miracles. L'attrait de la magie reste toujours aussi puissant malgré et peut-être même à cause de la modernité.

    6
    Dimanche 4 Septembre 2016 à 10:12

    Le premier pape non italien a été une révolution. L'allemand une surprise. Après Francois, il est probable que les papes seront plutôt originaires du Tiers Monde catholique ( Amérique latine, Afrique...) régions où la foi est la plus forte.

    Et ces pays ont une conception de la religion catholique remplie de saints spécialisés en intercession , de "prières en vue de la guérison" , de superstitions, de gri-gris, de défilés avec statue de la vierge, de prières collectives avec transes et ... de saints propres à chaque pays (par exemple il y a au Liban, deux saints catholiques libanais: saint Maroun et saint Charbel). 

    Tout cela pour dire que la béatification a de beaux jours devant elle, car les catholiques du Tiers monde rêvent de donner des saints locaux à leur religion. 

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 10:34

        Il est vrai que le pourtour méditerranéen a eu son lot considérable de saints et les autres  continents, notamment l'Amérique hispanique, piaffent d'impatience. L'Afrique attend son pape noir.

      • Souris donc
        Dimanche 4 Septembre 2016 à 10:53

        Défilés avec statue de la vierge : Carlus, ce sont des processions.

        Je me rappelle en avoir vu une, en l'honneur de la Vierge de Guadalupe, à Santiago de Cuba. Une profusion de fleurs jaunes, naturelles et en papier, tout le monde habillé en jaune, une vieille dame en jaune, havane au bec, se faisant photographier par les touristes contre une petite pièce.

        La même ferveur que, quelques kilomètres plus loin, pour le saint laïc. Une enfilade de petits chalets comme au marché de Noël, mais dédiés à... Che Guevara. T-shirts, statuettes, images pieuses, mugs, tout le merchandising.

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 11:06

        Cuba : la cohabitation de deux religions...mais la plus ancienne survivra à la plus récente.

      • Souris donc
        Dimanche 4 Septembre 2016 à 18:19

        Merchandising, plus exactement produits dérivés. La casquette siglée. Les saints sont le produit dérivé du catholicisme. Les saints du calendrier font le bonheur des fleuristes. Le nom des hôpitaux : chacun son saint. Et Saint-Gobain. Une histoire de notoriété et de marketing.

         Les protestants n’en ont pas. Eux, leur produit dérivé, ce sont les évangéliques. Ils utilisent la musique et la transe pour convertir. En Amérique latine, je les ai vu faire, un tréteau, un haut-parleur, et c’est parti. Le pasteur évangélique répète de façon hypnotique "Alléluia !", puis met du gospel. Les gens affluent. On se tient par la main, on se balance, le sens critique s’endort. A la fin, on signe et on donne son adresse et son obole pour la construction de l’église.

        Ça marche très fort. En Afrique aussi. Et dans les banlieues françaises.

         

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 18:48

        Tableau du feu de Dieu bien décrit. Ces entreprises ne feront jamais faillite car les fonds de la crédulité sont inépuisables et on fait toujours crédit à Dieu et à ses saints.

      • Souris donc
        Dimanche 4 Septembre 2016 à 19:09

        Ceci dit, je préfère que les banlieues française suivent les évangéliques plutôt que les imams. Et pour en finir avec Dieu et ses saints, Louis Armstrong, bien sûr.

      • Dimanche 4 Septembre 2016 à 19:22

        Aucun doute sur le choix, mais on ne choisit pas la voie des autres...sauf celle d'Armstrong

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