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Par Dr WO le 5 Mai 2010 à 17:26
Egon Schiele "Agonie"
AGONIE
L’agonisant sur son grabat
A déjà enfilé son crâne de squelette
Sa peau a abandonné sa tête
Noyé dans des couvertures en amas
Aux couleurs vivantes et colorées
Ses mains veulent peut-être prier
Mais il n’est plus là
Il n’a plus peur
Il est ailleurs
Le prêtre à tête de boxeur en colère
Couronnée de sa tonsure
Sa barbe noire en jugulaire
Il prend, il ceinture
Dans le cercle de ses bras écartés
Tête basse prêt à foncer
Son œil globuleux fixé
Sur l’âme de l’agonisant
Il veille plus qu’il ne prie
Il surveille le mourant
Il est à lui
Mais l’agonisant s’est échappé
Il est trop tard
Il n’est plus à personne
Il n’est nulle part
Paul Obraska
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Par Dr WO le 10 Mars 2010 à 17:24
Edgar Degas « Absinthe »LE LIEN
Regard perdu dans un rêve désabusé
La femme d’une tristesse épaisse
Devant la liqueur opaline entamée
Ses épaules lasses s’affaissent
Ses bras pendent fatigués
L’homme fume le regard ailleurs
Etrangers
Attablés ici pour vider leurs heures
L’absinthe réunit le couple amer
Côte à côte sans se toucher
Pour vider quelques verres
Pour se noyer l’esprit
Chacun perdu et solitaire
Les deux recherchent l’oubli
Encore une fois devant un verre
Ensemble et désunis
Paul Obraska
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Par Dr WO le 28 Janvier 2010 à 16:48
Marc Chagall : « Paris par ma fenêtre » 1913.CHAGALL A PARIS
Venu des plaines et des lacs du nord
Il vole au-dessus de la ville tricolore
Mais il emporte dans sa mémoire
Le couple couché sur le brouillard
Des wagons roulent à l’envers
Leurs couples de roues en l’air
Sur une chaise des fleurs coupées
Dressées comme des épis de blé
Sur le bord de la fenêtre
Il offre au chat un visage humain
De ses rêves colorés vont naître
Êtres volants et mariés chevalins
Homme au double visage
Un cœur naïf dans le creux de la main
Un regard en arrière vers son village
Il restera unique sur son chemin
Paul Obraska
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Par Dr WO le 6 Juin 2009 à 17:37
Egon Schiele : "Le danseur"
LIBERATIONIl avait bu, lui qui ne buvait jamais
La face cramoisie levée vers les cieux
Les bras tendus vers l’espoir, il criait
Et pleurait et riait les larmes aux yeux
Il tournait et dansait et titubait sur un pas maladroit
Les spectateurs bienveillants soutenaient sa danse
Le funambule déséquilibré, saoul d’alcool et de joie
Passait de l’un à l’autre pour embrasser l’assistance
Il finit par tomber de tout son long, épuisé
Resta le dos à terre, les bras en croix
Poitrine haletante, ne pouvant plus crier
De sa voix cassée, il répétait pour lui :
« On est libéré, les Américains ont débarqué….
Les Américains ont débarqué, c’est fini… »
Paul Obraska
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Par Dr WO le 27 Mai 2009 à 17:09
Salvador Dali « Portrait du frère mort »PAPIER GLACE
Vieilles photos sur papier glacé
Vous avez la froideur des natures mortes
Fantômes foudroyés du passé
Que l’oubli à nouveau vous emporte
Mirage des bonheurs perdus
Sourires figés dans la glace du papier
Immuables dans le temps suspendu
Papillons de couleurs épinglés
Les revenants glacés nous dévisagent
Avec le choc de leurs anciens visages
Dans une époque à jamais révolue
Les souvenirs soudain libérés
Surgissent, cruels, sous la lumière crue
Pour nous montrer ce que nous avons été
Pour redonner chair aux disparus
Dont il ne reste que papier glacé
Paul Obraska
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Par Dr WO le 4 Mars 2009 à 17:49
Joan Miro « Tête d’homme »TÊTE A TÊTE
Qu’y a-t-il dans une tête?
Des pensées, plein de pensées
Les unes poussent les autres
Les autres naissent des unes
Rien ne les arrête
Des pensées en pagaille ou du prêt à penser
Chaque seconde du matin jusqu’au soir
Et même la nuit la tête est envahie
De pensées qui prennent leur liberté
Car le jour la tête se parle à elle-même
En tête-à-tête
Un monologue bavard
Oh ! Le plus souvent ce sont des pensées ordinaires
Sans intérêt et plutôt bêtes
Comme : « Ai-je fermé la portière ? »
Ou « J’ai mal au dos » ou « Je suis en retard »
La pensée persiste même dans une tête vide
Bien que fixe une pensée unique tourne en rond
Elle occupe l’espace, la tête a horreur du vide
Ou alors c’est la fin pour de bon
Et puis il y a les pensées qui rouillent à force de tourner
Elles prennent la tête et brouillent les autres pensées
C’est parce qu’elles cherchent parfois une solution :
Dans les têtes qui se posent des questions
Car la tête peut avoir de profondes pensées
Comme : « Qui suis-je, d’où viens-je, où vais-je ? »
Les pensées profondes sont des questions sans réponses
La profondeur est telle que la tête perd pied
Et prise de vertiges elle s’enfonce
Avec ses lourdes pensées
Mais la tête est parfois pleine de réponses sans questions
Comme : « Je crois en Dieu » ou « Je possède la vérité »
Dans une tête les réponses toutes faites sont redoutables
Elles ne sont pas discutables
Elles ne se posent pas de questions
Elles sont acquises pour toujours
Et occupent la tête comme dans les rêves la nuit
Mais les pensées de nuit ne sont pas faites pour le jour
Et puis il y a les pensées sordides, les pires
Elles sont tapies au fond de la tête
Elles ne demandent qu’à sortir
Toujours prêtes
Elles attendent l’occasion
Paul Obraska
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Par Dr WO le 17 Février 2009 à 17:59
Chaim Soutine « La folle »LA FOLLE
Je suis folle
Ma bouche rouge prête à mordre
Ça se voit non
J’ai la face en désordre
Rien ne colle
Rien n’est bon
Les moitiés de mon visage ne s’emboîtent pas
De guingois
Mes yeux sont deux billes de noirceur
Elles n’ont pas la même grosseur
Un gros sourcil et l’autre effacé
Un nez écrasé de boxeur
Mes cheveux jamais peignés
Et mes doigts qui n’ont pas assez de paume
Et vous avez vu sur ma tête
Mon chapeau pointu de gnome
Vert
N’est-ce pas la preuve que je suis folle
C’est ainsi que Soutine m’a faite
De travers
Mais avec mes yeux inégaux de folle
Je vous regarde sans détourner la tête
Vous fuyez mon regard
De folle Indiscrète
Sans égard
Je me moque de ce que vous pensez de moi
Et je vous vois tels que vous êtes
Et je ne vous envie pas
Paul Obraska4 commentaires
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Par Dr WO le 6 Décembre 2008 à 09:45
Pablo Picasso « La buveuse d’absinthe »EVE BRÛLEE
Coule maudite absinthe
Telle une eau brûlante
Pénètre la femme éteinte
Cendres mortes et mort lente
Cloporte des bars assassins
Assise mains tremblantes
Bras croisés sur ses seins
Tête lourde sur une main
Les yeux comme des fentes
Regard lointain perdu ailleurs
Les petites gorgées brûlantes
Brûlent amertume et rancœurs
Réchauffent la femme éteinte
Remuent ses cendres vacillantes
Ferment ses paupières peintes
Et elle part à la dérive
Emportée et captive
Elle est Eve, elle fut la beauté
Dans ses rêves elle sourit, édentée
Et les hommes évitent son regard
Regardent à la dérobée
S’ils rient de leurs écarts
Ils pleurent sur Eve brûlée
Paul Obraska
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Par Dr WO le 23 Octobre 2008 à 17:20
Egon Schiele "Lutteur" 1913
LUTTEURSContre qui contre quoi
Le lutteur de Schiele jeté dans l’arène
Est-il tendu aux abois
Avec ce regard de peur et de haine
Son visage aigu comme une lame
Sa bouche comme une goutte de sang
Sa main en griffe comme une arme
Le corps replié pour bondir en avant
Il est né la veille de la Grande Guerre
Où les corps harnachés se sont affrontés
Pour mourir au fond des cratères
Dans les fosses grouillantes des tranchées
Les corps des lutteurs côte à côte terrassés
Les sangs des ennemis s’unissant à la terre
Paul Obraska6 commentaires
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Par Dr WO le 29 Septembre 2008 à 09:41
Joannes Vermeer "Le verre de vin"
TENTATIONL'homme attentif la main sur le carafon
Regarde la belle boire le premier verre
Celui qui ouvre la porte des tentations
Et la jeune fille naïve se laisse faire
L'homme est si beau et si prévenant
Ses yeux bruns si doux et caressants
Elle boit le verre de vin clair
Ses joues se colorent de rose
Elle sourit en reposant le verre
Et se sent d'un coup moins morose
L'homme est si beau et si prévenant
Ses yeux bruns si doux et caressants
Paul obraska
Joannes Vermeer "La jeune fille au verre de vin"
IVRESSEL'homme tentateur penché sur la belle
L'invite encore à boire un verre de vin
Sourire perfide et mots de miel
Il le pousse doucement de la main
Et la belle enivrée sourit béatement
Alors qu'un compère venu entre-temps
Fait semblant de dormir dans un coin
Pendant que son ami prépare le chemin
Je sens que cette histoire va mal finir
Je ne veux pas en voir la fin
Et me retire plutôt que de médire
Paul Obraska4 commentaires
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