• Les Suisses savent compter

    Les Suisses sont ennuyés. Ils acceptent volontiers l’argent que l’on veut bien mettre dans les banques de leur pays, ils acceptent même les étrangers qui ont de l’argent et qui désirent y vivre, même si les raisons de ce choix ne sont pas toujours avouables, ils acceptent en souriant (pour certains) les touristes qui viennent visiter leur beau pays, mais ils sont ennuyés par les étrangers qui viennent  volontairement y mourir dans un tourisme de mort après un séjour trop bref pour être rentable.

    En effet, en Suisse, de nombreuses « Dignitas clinics » pratiquent légalement le suicide médical assisté (par la mise à disposition d´une potion létale, mais l´euthanasie active y est interdite, comme en Suède et au Danemark)[1]. Chaque année des dizaines d’étrangers, le plus souvent britanniques, allemands et français, choisissent comme destination finale les cantons helvètes.

    L’activité internationale de Dignitas, accueille en moyenne 200 étrangers chaque année. Le coût pour un étranger souhaitant recourir aux services de cette association s’élève à 6 000 euros (A noter qu’une étude concernant « 274 personnes accompagnées par Dignitas (….) entre 2001 et 2004 » indiquait que « 79 % souffraient d’affections incurables », ce n’était donc pas le cas de 21%).

    Mais les Suisses savent compter : ces autolyses particulières engendrent fréquemment des frais de procédure, liés à l’ouverture d’une enquête et souvent à la réalisation d’une autopsie, qui s’élèvent en moyenne à 600 000 francs suisses par an et certains responsables suisses se sont émus du fait que leur pays est ainsi contraint de prendre en charge de tels coûts pour des ressortissants étrangers venus chercher la mort en Suisse. Ils envisagent donc de créer une taxe (après une votation) qui pourrait s’élever à 34 000 euros (50 000 francs suisses), pour chaque candidat étranger au suicide, accueilli par une organisation suisse, sauf s’il vit en Suisse depuis plus d’un an (on est soulagé pour certains de nos compatriotes qui se plaisent dans ce beau pays et qui n’auraient pas pu payer le surcoût engendré par cette taxe).

    Cette taxe rapporterait pour 200 candidats par an, la somme de 10 millions de francs suisses, ce qui ferait un bénéfice annuel de 9 millions 400000 francs suisses.

    Les Helvètes savent compter, mais peut-être en ont-ils assez de cette évasion létale et du blanchiment des morts et préfèreraient que chacun meure chez soi.

    Magritte-pipe.jpg


    [1] En France, par le décret du 19/02/2010 publié au JO de 21/02/2010, il vient d’être créé un nouveau bidule qui se surajoute aux autres bidules et qui sera appelé « l’Observatoire de la fin de vie » avec un comité de pilotage de douze membres. Les observateurs seront essentiellement chargés d’évaluer les besoins de recherche et surtout d’information du public et des professionnels de santé sur la fin de vie. Tâche lourde.

     

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  • Commentaires

    1
    Mercredi 24 Février 2010 à 18:10
    Tout s'achète, même la beauté, mais pas l'esprit, qui peut cependant se vendre.
    Dr WO
    2
    Mercredi 24 Février 2010 à 18:35
    Jusqu'en 1975, les femmes se rendaient en Suisse pour avorter. La Suisse, pays de la mort ?
    3
    Mercredi 24 Février 2010 à 18:46
    Ou en avance, au choix.
    Dr WO
    4
    Mercredi 24 Février 2010 à 19:28
    Le droit au suicide est une liberté que certains rétrogrades inspirés par des relents religieux (seul Dieu peut faire mourir ses fidèles) ou non (on appartient à son roi, il est donc interdit de le priver d'un sujet). Mourir dignement n'est-il pas préférable à se pendre dans la grange, se jeter sous un train ou se tirer une décharge de fusil de chasse dans la bouche? hélas! aujourd'hui, tout a un coût et le prix du suicide assisté est d'autant plus élevé dans certains pays que d'autres l'interdisent.
    il était donc urgent de créer un "bidule" pour noyer le poissons et mettre à l'abri de la pluie les membres d'un comité de pilotage ad hoc ("hoc", c'est l'abri). Quel mauvais plaisant ira se pendre dans leur escalier?
    5
    Mercredi 24 Février 2010 à 19:55

    C'est une vaste question qu'il est difficile de traiter dans des commentaires. J'ai un peu (très peu) traité ce sujet dans un petit billet ("Comme c'est difficile" dans les bâtons rompus"). Plutôt que parler de droit, il vaudrait mieux parler de possibilité, car l'attitude vis à vis du suicide est, bien sûr, personnelle. La question se pose surtout lorsque l'acte d'interruption de la vie doit être accompli par les autres.
    Dr WO

    6
    Mercredi 24 Février 2010 à 20:21
    C'est vrai qu'il s'agit d'une vaste question et cette question me touche. Un droit au suicide n'est pas envisageable lorsque la personne qui souhaite mettre fin à ses jours n'est pas en pleine possession de ses moyens ! J'ai perdu un cousin de 20 ans qui a pensé que la vie n'en valait plus la peine à cause d'un chagrin d'amour et la même semaine un jeune du village à mis fin à ses jours devant ses camarades pour la même raison ! C'est un sujet que l'on devrait aborder plus souvent (à l'école notamment) mais concrètement je ne sais pas si cela changerait grand chose. Les parents ont un long chemin à faire pour se débarasser de leur culpabilité.
    Les personnes dont vous parlez doivent éprouver des remords ? Aider quelqu'un à mourir ne doit pas du tout être évident à assumer.
    7
    Mercredi 24 Février 2010 à 20:36

    Ce billet évoque le suicide en fin de vie. Le suicide par désespoir est un autre problème et je pense que c'est une liberté discutable.
    Dr WO

    8
    Mercredi 24 Février 2010 à 22:32
    J'ai du mal à comprendre que l'on puisse choisir de payer aussi cher pour aller se suicider en Suisse et d'après ce que j'ai entendu dire dans des conditions assez glauques. Il me semble que l'on peut mettre fin à ses jours à l'aide de médicaments chez soi... mais ne m'étant jamais penchée sur la question j'avoue ne pas trop savoir qu'en penser sinon qu'abréger de trop grandes ouffrances en fin de vie me paraît un acte des plus humains.
    9
    Mercredi 24 Février 2010 à 22:46

    En France et dans beaucoup de pays, lorsqu'on aide quelqu'un à abréger ses jours, on risque d'être poursuivi pour euthanasie (les personnes en fin de vie ne sont le plus souvent pas capables de se suicider).
    Dr WO

    10
    Mercredi 24 Février 2010 à 23:19
    Le droit au suicide est un vaste sujet.
    La France, le condamne mais de plus en plus, la jurisprudence dans certaines affaires atténue les sanctions encourues pas les tiers qui abrègent les souffrances de leurs proches avec leur accord.
    La Suisse est le pays d’accueil de tous ceux qui ont les moyens de payer de tels actes.... l’acte de suicide, des actes de chirurgie esthétique, d’évasion monétaire......
    C’est bien connu!!!!!!!!!!!!
    Alors pourquoi les nantis s’en priveraient ???????
    Bonne soirée, DOC
    Bizzzzzzzzzz
    ZAZA
    11
    Mercredi 24 Février 2010 à 23:26
    Ils ne s'en privent pas.
    Dr WO
    12
    leonie
    Lundi 7 Janvier 2013 à 16:20
    On achète la naissance (mère porteuse, adoption en pays étrangers) et on achète la mort, le profit est toujours de mise.
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