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Par Dr WO le 26 Janvier 2009 à 16:57
Marc Chagall « La famille du pêcheur »LA FEMME DU PÊCHEUR
Ils sont l’un contre l’autre, mais la femme tourne le dos, l’enfant sur son sein, la bête à ses pieds. Elle est la terre nourricière. L’homme est revenu de la mer, des poissons dans ses mains, après une si longue absence, de retour des horizons infinis, encore à l’écoute du chant des vents marins, plongeant toujours ses filets dans les plis de la mer. Ils sont l’un contre l’autre, pourtant la mer sépare leurs destins, elle permettra peut-être un jour de les réunir avant que leur vie prenne fin. Mais l’homme reviendra sur le rivage voir les vagues perler, écouter le vent, sentir les embruns, regarder l’horizon où pointe le mât des bateaux avant que le ventre lourd de leur pêche n’apparaisse sur les flots. La femme sait que la mer ne le quittera jamais et elle tourne le dos.
Paul Obraska
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Par Dr WO le 14 Octobre 2008 à 18:54
CREPUSCULEC’est l’heure où la Terre tourne son ombrelle
Où l’eau du lac retient la lumière évanouie
Où les cimes des arbres dentellent le ciel
Où la masse des bois capte la nuit
C’est l’heure où le silence bruit de bruits inconnus
Où la pénombre se peuple d’êtres fabuleux
Où le cri des oiseaux devient éperdu
Où l’on craint qu’une bête habite chaque creux
C’est l’heure où les fantômes astiquent leurs chaînes
Où ceux qui nous habitent reprennent vie
Où ceux qui sont morts réveillent nos peines
C’est l’heure où l’on presse le pas
Où l’on recherche en vain un abri
Où l’on espère qu’un autre jour se lèvera.
Paul Obraska
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Par Dr WO le 24 Septembre 2008 à 10:14
D'après une photo parue dans le Point du 2 août 2007
avec cette légende : "Bravant les courants et les serpents à sonnette, un groupe de clandestins tente la traversée de nuit de la frontière."
L'EAU DES FRONTIERESL'eau des frontières
Est hantée d'êtres humains
Ils ne sont pas tous marins
Sur les mers et les rivières
Sur des épaves marines
Bravant chaque instant le naufrage
Ou dans l'eau glacée des rivières à la nage
Un sac poubelle devant, une femme sur l'échine
Les clandestins hantent l'eau des frontières
Il y aura demain sur l'onde des corps noyés
Retrouvant les spectres partis les premiers
Sortis par la mort de la haine ou la misère
Dans le Rio Grande flottent des grappes de têtes
Consolez-vous clandestins
C'est à ce jour un Mexicain
L'un des plus riches de la planète
Dans les barques, dans les soutes des navires
Consolez-vous clandestins
Vos dirigeants ne manquent de rien
Passez l'eau des frontières sans faiblir
Paul Obraska
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Par Dr WO le 20 Août 2008 à 18:50
SAULE PLEUREURAvez-vous vu pleurer un saule pleureur ?
Il s'épanche penché sur la rivière
Et laisse tomber ses verts pleurs
En une cascade trouée de lumière
Il pleure de ses étroites larmes
Et si l'arbre courbé s'épanche
Pour ne pas rompre le charme
Il les garde pendues à ses branches
Le saule nous apprend à retenir nos pleurs
A trouver l'apaisement au bord des rivières
A laisser la lumière traverser nos malheurs
A continuer à vivre enraciné dans la terre
Paul Obraska
RICOCHETSL'enfant sans ami cherche un galet plat
Un galet rond aux bords arrondis
Pas trop gros pour qu'il ne coule pas
Et pour glisser sur l'eau, pas trop petit
Il découvre le trésor dans des gravas
A la lumière oblique du soleil écrasé
Et court vers le lac, pressé de le jeter
Il se met en position, étendant le bras
Le trésor dans sa main, l'index en crochet
Au bord du lac embrasé
Sur l'orangé de l'eau, il lance le galet
La pierre par petits bonds marche sur les eaux
Un chapelet de gerbes pour un bref instant
Dix bouquets liquides vont décrescendo
Mais personne pour voir l'exploit de l'enfant
L'événement provoque un envol d'oiseaux
Dans l'incendie fidèle du couchant
Leurs ailes aiguës glissent dans l'éther
Comme le galet rond avait glissé sur l'eau
L'enfant triste et solitaireRegarde, au-dessus du lac, les oiseaux
Faire ensemble leurs ricochets sur l'air
Paul Obraska
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Par Dr WO le 31 Mai 2008 à 10:09
John Sargent "Fontaine chantante en Espagne"
FONTAINESIl y a des pays
Où il n'y a pas de fontaines
Des pays sans eau
Des pays malheureux
Il y a des pays
Où il y a de l'eau
Mais pas de fontaines
Ce sont des pays heureux
Mais qui n'ont rien compris
Les fontaines
On les entend avant de les voir
La chanson joyeuse et familière
De l'eau clapotant dans l'eau
De l'eau éclaboussant la pierre
Un chant de promesse de bonheurs
Le bonheur d'apaiser la soif
Le bonheur de fraîcheur
Le bonheur de pureté
Bien sûr il y a les fontaines royales
Avec leurs jets d'eau domestiquée
De l'eau qui fait des ronds
De l'eau qui fait le beau
De l'eau qui fait la roue
Pour se faire bien voir
Mais elle n'est pas à boire
Les petites fontaines sont bien plus belles
Au milieu d'une place nue
Avec leur chant de chanterelle
Coulée de fraîcheur têtue
Sur la pierre douce arrondie par l'usure
Quelques herbes en houppes
Et un peu de mousse au mur
Dans ses mains en coupe
Pour exaucer une prière
On recueille l'eau claire
Que l'on boit goulûment
Sans retenue bruyamment
En serrant les doigts pour éviter les pertes
Le visage mouillé de fraîcheur
Le menton humide le sourire éclos
Sur une place déserte
Ecrasée de chaleur
Où les maisons volets clos
Abritent les dormeurs
Paul Obraska
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Par Dr WO le 11 Mai 2008 à 09:18
REFLETSUn château s'est jeté de son haut
Dans les douves, tête première
Son corps spectral flotte sur l'eau
Ballotté par les jeux de lumière
Narcisse aux traits de pierres
Au bord de son image liquide
Reflet opalin de sa face altière
Que la brise couvre de rides
Plus de reines, plus de rois
Plus de carrosses, plus de chevaux
Un hélicoptère pour rupins tournoie
Le présent n'est plus aux fastes royaux
L'hôtel accueille ses clients fortunés
Nostalgique, un château s'est noyé
Paul Obraska
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Par Dr WO le 7 Mai 2008 à 22:32
LE SILENCE DE LA PROIELac rond suspendu dans les cimes
Comme un œil froid au milieu des monts
Miracle horizontal au bord des abîmes
Aux reflets changeants de caméléon
Lumières glaciales glissant sur l'eau
Ciel sans nuage, roc et neiges mêlés
Au-dessus, le vol prédateur d'un oiseau
Dans le silence des cimes enneigées
Un homme cherche une proie dans l'eau
Sorti du lac transparent, un poisson palpite
La bouche sans cri accroché à l'hameçon
Sous la ligne courbée, la victime s'agite
Le poisson se noie dans l'air pur des monts
Les fentes béantes des vaines branchies
Ne peuvent rien contre la lente agonie
Proie aphone, elle nous épargne ses cris
Paul Obraska
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Par Dr WO le 10 Avril 2008 à 18:27
TORRENTTorrent tu sautes de pierres en pierres
Impatient comme tout jouvenceau
Ne te presse pas trop de rejoindre la rivière
Tes eaux ont la couleur de lait du berceau
Celui des neiges vierges des hauteurs
Celui où l'air bleu a encore sa pureté
Où les monts ont gardé leur fraîcheur
Que l'homme n'a pas encore souillée
Rivière ne te presse pas trop vers le fleuve
Tu serpentes dans les bois et les prés
Tes eaux claires sont déjà à l'épreuve
Avec les ventres blancs des poissons crevés
Fleuve ne te presse pas trop d'aller à la mer
Tes eaux brunes ont déjà triste allure
Là-bas t'attendent soutes et containers
Qui verseront les noirs hydrocarbures
Eau du torrent tu ne peux pas remonter le courant
Tu ne peux pas remonter de la mer à l'embouchure,
Du fleuve à la rivière et de la rivière au torrent
Chacun coule dans un sens avec ses souillures
Paul Obraska
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Par Dr WO le 10 Avril 2008 à 17:24
INCENDIE
Là-bas l’incendie déverse sa lumière
Eclate en cernant d’un fard doré
Le soleil épanoui en fleur ombellifère
Le feu étale un fond de teint orangéSouligne les ombres noires des toits
Comme un décor sur le doigt de mer
Là-haut le ciel a sauvé son bleu roiBalafré de deux traits de lumière
Que deux avions de proie ont laissés
Fuyant le feu un couple de bateauxChevauche la surface argentée
En creusant deux rides sur l’eau
Paul ObraskaArnold Böcklin "L'île de la Mort"
L'ÎLE DESOLEEUne silhouette habillée d'un linceul
Se dresse, rigide, à l'avant de la barque.
Le passeur à sa tâche rame seul,
Guidé par le murmure des Parques.
L'île désolée est abordée doucement,
Un roc abrupt dans la noirceur de l'eau,
Hérissé de cyprès, seuls êtres vivants,
Au milieu des murs clairs des caveaux.
Il fait toujours nuit sur ce roc de froideur.
Le Soleil est occupé à donner la vie,
Les morts n'ont nul besoin de chaleur.
Pour eux : le blanc, le noir et le silence de la nuit.
Les hommes inconsolables rêvent d'un ailleurs,
Qu'il s'agisse d'une île, de l'Enfer ou du Paradis.
Paul Obraska
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Par Dr WO le 18 Mars 2008 à 15:00
Mary Cassat "Deux enfants sur la plage"SABLE La main en sablier presse les grains fuyants, Le sable entre les doigts écartés Coule dans un doux chuintement, Aussi fluide que l’eau qui l’a créé. Avec le sable les enfants bâtissent des châteaux Où leurs rêves deviennent réalité, Jusqu’à la montée prochaine des eaux Où ils seront détruits par la marée. Dans le minéral pulvérisé par le temps, Les enfants connaissent la sagesse amère De voir leurs rêves ne durer qu’un instant. Avec la même foi, ils recommenceront demain. Les adultes font comme les enfants,
Ils ne se lassent pas de construire en vain.
Paul Obraska
Félix Vallotton "Sur la plage"SUR LA PLAGE Solitaires sur la plage glacée Sous un soleil froid Trois ombres sont assises habillées Elles ne se baignent pas Elles ne pourront plus se baigner Elles regardent la mer couleur de boue La larme à l’œil Et la mer les regarde de ses bulles irisées La vague à l’âme L’écume froufroute sur le rivage En rejetant par hoquets Des bouteilles gondolées sans message Des boulettes noires par paquets Des sacs gonflés en plastique Des consommables consommés Des préservatifs pathétiques De tristes oiseaux mazoutés De petits poissons ventre à l’air Et des ratons laveurs débordés Echappés d’un recueil de Prévert Jeté à la mer
Sans pitié
Paul Obraska
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