• LE CRI

     

    LE CRI

     

     

    Au seuil du XXe siècle, c’est un cri d’horreur,

    Le petit homme de Munch entend la clameur

    Qui s’élèvera vers le ciel les cent ans à venir.

    Il sait que les hommes rivaliseront dans le pire.

     

    Des champs incisés de tranchées cimetières

    Avec plus de chair broyée que de terre.

    Les hommes effacés par les dictatures,

    Le cri obstiné des opposants sous la torture,

    Le cri étonné des peuples exterminés,

    Seulement coupables encore d’exister,

    Le cri étouffé dans les chambres à gaz,

    Le cri gémissant que les décombres écrasent.

    Les hommes devenus atomes avant d’être poussières,

    Sans avoir le temps de crier ou de faire une prière.

    Les torches humaines par le napalm incendiées.

    Les foules, déplacées, réfugiées, déportées.

    Femmes éventrées, corps décapités, corps explosés,

    Par des bourreaux rendus fous par un Dieu dévoyé.

    C’est le cri des affamés que les mouches achèvent,

    Le cri épuisé des noyés avant d’atteindre leur rêve,

    Le cri horrifié des êtres humains hachés,

    Le cri affolé des enfants qui en jouant,

    Perdent leurs pieds dans les champs…

     

    Alors, on se bouche les oreilles comme le petit homme,

    On vit, on rit, on jouit, pourquoi pas ?

    Mais le cri est toujours là,

    Tant qu’il y aura des hommes.

     

    Paul Obraska

     

    Edvard Munch « Le cri » 1893

    « La mémoire des livres122. Sommes-nous dirigés par des psychopathes ? »

  • Commentaires

    1
    Dimanche 11 Novembre 2012 à 09:50
    Magnifique texte Doc qui cadre très bien avec le Petit homme de Munch. Un poème qui a le mérite d'être édité aujourd'hui 11 novembre, mais aussi pour tous ceux qui ont perdu la vie dans ces abominations de guerres. Car si l'Europe a su celer une paix durable depuis 70 ans, les guerres sont toujours très présentes dans d'autres parties du monde.
    J'aime tout particulièrement la dernière strophe
    " Alors, on se bouche les oreilles comme le petit homme,
    On vit, on rit, on jouit, pourquoi pas ?
    Mais le cri est toujours là,
    Tant qu’il y aura des hommes."
    Bonne journée Doc
    ZAZA
    2
    Dimanche 11 Novembre 2012 à 10:02
    Mais c'est effroyablement magnifique, Paul ! Avec des accents tout en étant différent qui m'ont jeté au sein de la "retraite de Russie" ! Je ne vous flatte pas, je ne sais pas le faire, mais Victor Hugo aurait pu écrire ces vers !
    Merci
    Nettoue
    3
    Dimanche 11 Novembre 2012 à 10:03
    Tout est dit! Ce cri est assourdissant. Pourquoi refuse-t-on de l'entendre.
    Ce texte est admirable.
    4
    Dimanche 11 Novembre 2012 à 10:26
    Déchirant et magnifique !
    5
    Dimanche 11 Novembre 2012 à 18:00
    Pour une fois, je ne peux répondre à chacun d'entre vous, car que dire ? J'ai tenté par ce texte de traduire la révolte qui gronde en nous devant la monstruosité et l'absurdite de la violence qui déchire l'humanité depuis des millénaires et qui a atteint son sommet (pour l'instant) au XXème siècle. Ce qui sépare le plus l'homme de la bête, ce n'est pas le rire, ce n'est pas la conscience, ni même la pensée,c'est la violence de masse et sans raison. Oui, on peux devenir misanthrope, et pourtant l'homme a réalisé de si belles choses que nous sommes comme des amants trompés.
    Dr WO
    6
    Dimanche 11 Novembre 2012 à 18:22

    La seule chose que je peux dire est que je vous remercie d'avoir été sensibles à ce texte qui en peu de mots a tenté de résumer les atrocités du passé récent, mais qui n'empêcheront pas celles à venir.

    7
    Lundi 12 Novembre 2012 à 10:37
    bonjour,
    pour un jamais plus l'horreur quoi de plus representatif que ce cri!!!
    et ces mots...
    loin de la guerre et de ces horreurs nous oublions facilement...
    bises babeth
    8
    Lundi 12 Novembre 2012 à 17:04

    L'oubli permet de vivre

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    9
    Lundi 12 Novembre 2012 à 20:02
    Terrible, puissant mais beau poème. Bravo ! Oui, le cri reste en dessous et nous nous efforçons de ne plus l'entendre en le cachant sous les rires et la course folle contre le temps.Comment faire autrement ?
    10
    Mardi 13 Novembre 2012 à 10:52

    On ne peut pas faire autrement, sinon se suicider comme l'a fait Stephan Zweig.

    11
    Mercredi 28 Novembre 2012 à 14:05
    Impossible de dire que votre poème est beau, ce serait admettre qu'il existe une esthétique de l'horreur. Disons qu'il voit juste même si les massacres ont existé bien avant le 20ème siècle. L'histoire humaine en est pleine, hélas ! C'est peut-être le symptôme d'une psychopathologie de l'espèce.
    12
    Mercredi 28 Novembre 2012 à 16:59

    Vous avez raison. L'espèce humaine est une des rares espèces qui pratique la violence pour la violence (je crois qu'il existe au moins un poisson qui a cette fâcheuse habitude).

    13
    G.Mevennais
    Lundi 7 Janvier 2013 à 15:53
    Votre texte est remarquable, "criant" (c'est la cas de le dire) de vérité. Dites-moi, Doc, comment peut-on ne pas devenir misanthrope !
    Amitiés. Gilles.
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