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LA NUIT DE LA DEPORTATION
LE RETOUR DE LA NUIT
Branlant sur leurs membres décharnés
Les morts étonnés revinrent à la vie
Sortis du monde de l’obscurité
Leurs yeux de taupe furent éblouis
Par les lumières qu’ils avaient oubliées
Alors ils fermèrent les yeux
Il n’y avait pas de mots pour traduire leur nuit
Et ils restèrent silencieux
Et quand les mots venaient à leur esprit
Ils mourraient sur leurs langues figées
Ils couvraient l’encre bleue de leur bras
Comme s’ils avaient honte d’avoir été torturés
Ils craignaient que les autres ne les croient pas
Ils restèrent longtemps silencieux
Puis ceux qui trouvèrent les mots pour le dire
Témoignèrent pour les taiseux
Pour ceux qui enterraient leurs souvenirs
Et les revivaient dans l’insomnie
Et d’autres se suicidèrent
Après leur retour à la vie
Brûlant le lambeau de lumière
Qu’ils avaient arraché à la nuit
Paul Obraska
George Grosz « Heureux d’être de retour » 1943
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Commentaires
Superbe... J'ai lu beaucoup de témoignages. Notamment celui d'une femme dont la soeur ne put survivre à sa libération : il lui fallut manger. La nourriture la tua. Terrible...
Bonne soirée Paul.
Et dire que nous sommes bien indulgents envers ceux qui, au nom de leur religion, proclament les mêmes idées que celles qui ont bâti les camps!
C'est magnifique!
Merci pour ce poème très fort, accompagné de ce tableau qui parle de ce temps où l'on tuait sans bruit en toute confidentialité, des millions d'hommes qui avaient eut la mauvaise idée de naître, en même temps qu'un monstre...!
CARLUS. En mémoire, avant que l'histoire soit atteinte de la maladie d'Alzheimer comme elle semble avoir atteinte très précocement l'histoire turque.
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Eh bien dites donc, bravo, là vous vous surpassez, c'est très beau et très fort.
Tous mes compliments, docteur.
Amitiés.