• La métaphysique des toiles

    La métaphysique des toilesA la Fondation Louis-Vuitton, deux peintres sont exposés côte à côte : Egon Schiele ("Autoportrait debout" ci-contre) et Jean-Michel Basquiat. Deux peintres que l’on peut rapprocher par leur mort prématurée – avant 30 ans -  fauchés par la grippe dite espagnole pour le Viennois (en même temps que sa femme enceinte) et par la drogue pour le New-Yorkais. On peut également les rapprocher par le désespoir qui se dégage de leurs œuvres et par leur parti pris à exposer la laideur, notre laideur.

    J’aurais peut- être l’occasion d’aller voir cette double exposition, mais il se trouve que la même année, en 2010, j’ai eu l’opportunité de voir beaucoup de tableaux de Schiele à Vienne et beaucoup de tableaux de Basquiat à l’exposition qui lui a été consacré au musée d’Art Moderne à Paris.

    J’avoue que je n’apprécie pas Basquiat (ci-dessous) qui me laisse froid : voir « Basquiat est-il un génie ? », alors que, malgré sa dureté et sans doute à cause d’elle, je suis impressionné par la peinture La métaphysique des toilesde Schiele au point que j’ai éprouvé le besoin d’écrire des textes à propos de certains de ses tableaux : voir « Le lutteur », « Embrasser », « Arbres en automne », « Le danseur », « Agonie », « Femme renversée », « La famille ».

    J’ai toujours été fasciné par les commentaires des connaisseurs en art pictural et les motivations attribuées au peintre par les critiques qui atteignent parfois une profondeur métaphysique insoupçonnée par l’artiste lui-même lorsqu’il est vivant (mais qu’il accepte volontiers) et qu’il ne peut guère contester une fois mort.

    Marc Lambron (de l’Académie française) a fait très fort dans ses commentaires parus dans le Point du 4/10/18 sur la double exposition Schiele-Basquiat. En voici quelques petits extraits :

    « D’une façon générale, on suit la traversée d’un double séisme mental ou transparait la spiritualité secrète de peintres hantés par l’appel et le deuil du sacré »

    « La peinture de Schiele, tressée de nerfs, revisite les écorchés minéraux des gisants médiévaux en les aquarellant avec la translucidité d’une aile de phasme »

    A propos de Basquiat « son art semble musicalement animé par la pulsion vrombissante d’une basse funky. Comme revenu à l’aube de la couleur, sa touche rupestre et sidérale multiplie les idoles dentelées à la Wilfredo Lam, les graffitis pulvérisés en supernovas cosmiques.

    Au fil d’un temps compté, le dénuement franciscain du trait signe silencieusement chez Basquiat le chagrin d’un dieu perdu. Comme chez Egon Schiele, il saturait par des formes grêles la béance d’une sacralité effondrée »

    J’ai probablement raté quelque chose. Curieuse cette manie de mettre Dieu partout, même lorsqu’il est absent.

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  • Commentaires

    1
    Samedi 6 Octobre 2018 à 19:04
    Pangloss

    Un peintre s'exprime par la peinture. S'il avait quelque chose à dire, il l'écrirait.

    Egon Schiele me touche. Ce qu'il a peint est tout simplement Beau. Majuscule de rigueur.

      • Samedi 6 Octobre 2018 à 19:12

        La beauté de la laideur lorsqu'il s'agit de lui-même.

    2
    Sémaphore
    Samedi 6 Octobre 2018 à 19:47
    Sémaphore

    Egon Schiele rentrera, lui, à l'Académie des Beaux Arts de Vienne... sans guère y rester par suite de son rejet de l'académisme en vogue juste avant le mouvement de la Sezession viennoise et le Jugendstil.

    Il évitera une carrière politique mais fera très souvent scandale par de nombreuses productions érotiques et autres toiles audacieuses, au moins considérées comme telles à cette époque (Le  Cardinal et la Nonne).

    Style très reconnaissable comme celui de Klimt, qui fut une sorte de mentor.

    Basquiat est trop sinistre dans ses oeuvres quoique très reconnaissable, lui aussi.

      • Samedi 6 Octobre 2018 à 20:45

        Je ne pense pas que l'on puisse mettre sur le même plan Schiele et Bastiat. L'un était un grand peintre, l'autre était, pour moi, un gribouilleur considéré par beaucoup comme un génie sans doute parce que ses toiles se vendent cher. 

    3
    Souris donc
    Dimanche 7 Octobre 2018 à 09:01

    La béance d'une sacralité effondrée : Marc Lambron ferait bien d'être un peu moins grandiloquent, en s'en tenant aux catégories plastiques. Jean-Michel Basquiat restitue la multiplicité des influences dans lesquelles il baigne, du pop art de ses années avec Wharhol, aux graffeurs, en passant par ses origines haïtiennes. Sa force à manier trait et couleur dans des fresques narratives qui nous sautent à la figure fait sa singularité plastique.

      • Dimanche 7 Octobre 2018 à 09:31

        Je vois que vous appréciez Basquiat. Être sensible à un artiste est toujours un avantage car c'est un enrichissement (que je ne peux pas acquérir pour celui-ci). Quand il s'agit d'une oeuvre plastique, purement visuelle, doit-on la considérer en elle-même ou doit-on y ajouter l'histoire personnelle  de l'artiste pour la juger ? 

      • Souris donc
        Dimanche 7 Octobre 2018 à 17:00

        Les conservateurs des musées aiment exposer des artistes qui s'entrechoquent. Une mode ? La Fondation Beyeler, en mai, a présenté Bacon-Giacometti. La rondeur contre la maigreur ?

        Je me permets.

      • Dimanche 7 Octobre 2018 à 17:13

        Je ne connais pas cette fondation. Il est toujours possible de rapprocher des peintres. Ils ont tous un point commun : la peinture.

      • Souris donc
        Dimanche 7 Octobre 2018 à 17:35

        Je ne connais pas cette Fondation. La honte, Dr Wo.

        Architecte : Renzo Piano, celui du Centre Pompidou. Particularité : éclairage zénithal particulier, si bien que les visiteurs n'ont pas d'ombre.

      • Dimanche 7 Octobre 2018 à 18:13

        "Je ne connais pas"...dans le sens où je n'y jamais allé.

    4
    Dimanche 7 Octobre 2018 à 16:41

    Je ne pensais pas commenter cet article, manquant totalement de références culturelles pour porter un jugement sur ces œuvres sauf à balbutier: "Egon Schiele... impressionnant. (terrifiant ?) (morbide ?)" et "Jean-Michel Basquiat... euh? oui, voila-voila... chacun ses gouts et ses couleurs, hein ???".

    Je constate avec un certain étonnement blasé que les... tableaux (?) d'un "graffeur stellaire décédé d'une overdose à 28 ans tel un Rimbaud habité et afro-américain" trouvent apparemment facilement acquéreur à plus de 110 millions de dollars !

    (c'est un article sur V.A. qui m'a donné envie d'apporter mon grain de sable et une goutte d'eau à l'édifice que vous avez mis en chantier... excusez-les: ils n'y sont pour rien.)

      • Dimanche 7 Octobre 2018 à 17:07

        Que l'on puisse comparer Basquiat à Picasso me laisse pantois (mis à part les prix commerciaux atteints par ses oeuvres)

    5
    Sémaphore
    Lundi 8 Octobre 2018 à 23:10
    Sémaphore

    Apparition dans l'en-tête de votre blog, Doc, d'un extrait de tableau pointilliste.

    De qui est cette oeuvre ?

    Seurat, peut-être le plus célèbre?

    Je ne l'identifie pas car il me semble que ce peintre restait généralement dans des tonalités plus claires

      • Lundi 8 Octobre 2018 à 23:29

        Signac. C'est la partie inférieure du tableau "La place des lices" à St Tropez.

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