• La démocratie est-elle passée de mode ?

    La démocratie est-elle passée de mode ?

    Dans le Point du 30/08/18 est parue une interview de Yascha Mounk, professeur à Harvard, à propos de la parution de son livre : « Le peuple contre la démocratie ». Ce qui m’a intéressé ce sont les graphiques statistiques qui accompagnent cette interview, mais n’ayant pas lu l’ouvrage j’ignore la méthodologie sur laquelle elles sont basées et par conséquent la confiance que l’on peut leur accorder.

    La démocratie est-elle passée de mode ?Quoi qu’il en soit elles donnent une image des USA un peu différente que celle que l’on nous transmet volontiers et cadre mieux avec l’élection de Trump. Les médias consacrent en effet beaucoup d’articles sur ce qui passe dans les universités très politisées où la pression des minorités sexuelles ou ethniques semble exercer une véritable dictature sur la majorité et les enseignants. Or il s’avère que plus on est jeune moins on s’intéresse à la politique : 4I% seulement pour les générations nées après 1980 et plus inquiétant, pour ces mêmes jeunes, il n’y a que 29% d’entre eux qui considèrent comme essentiel de vivre en démocratie. Le corolaire est encore plus inquiétant mais logique : un quart des jeunes de 18 à 24 ans verraient d’un œil bienveillant l’instauration d’une dictature militaire ! Bien sûr les Américains ignorent totalement ce qu’est une dictature militaire, alors que la plupart des pays européens ont goûté à la chose, ce qui ne les empêche pas d’ailleurs d’être « antisystème » pour 20% de leur population et comme le « système » est en fait la démocratie elle-même avec ses défauts et ses qualités on voit
    La démocratie est-elle passée de mode ?très bien par quoi il serait éventuellement remplacé.

    La démocratie est-elle passée de mode ?

    Ces statistiques qui concernent le pays démocratique le plus puissant et un pays qui n’a connu que la démocratie montre à l’évidence que celle-ci est passée de mode dans les pays occidentaux (alors qu’il reste un rêve ailleurs) et on se demande ce qu’elle deviendra quand ces générations qui semblent avoir du goût pour les régimes autocratiques arriveront au pouvoir. Mais soulignons que trois jeunes sur quatre n'ont pas de sympathie pour une éventuelle dictature et si plus de deux jeunes sur trois trouvent par ailleurs qu'il n'est pas essentiel de vivre en démocratie, on se demande quelle est l'alternative. Cette apparente contradiction prouve bien que la majorité des jeunes Américains se désintéresse de la politique ou vit dans l'utopie d'une troisième voie entre démocratie et autocratie.

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 31 Août 2018 à 15:43
    Pangloss

    Moins la démocratie est réelle, plus elle est pervertie et moins elle a d'attraits.

    Un peuple convenablement instruit, éduqué et informé est une condition nécessaire pour le fonctionnement d'une démocratie. 

    Le suffrage universel n'est pas une condition suffisante ni même nécessaire pour le bon fonctionnement d'une démocratie.

      • Vendredi 31 Août 2018 à 16:21

        Le suffrage universel n'est qu'un pis-aller pour choisir des dirigeants qui dans une démocratie avec de multiples partis ne représentent que rarement la majorité des citoyens. Ce qui définit une démocratie est l'existence garantie et le bon fonctionnement des contre-pouvoirs.

    2
    Semaphore
    Vendredi 31 Août 2018 à 23:37
    Semaphore

    La Presse Grançaise en contre-pouvoir théorique, subventionnée comme elle l'est, n'est ni crédible ni un modèle sauf pour la dictature, justement...

    Les conneries du Pouvoir y passent comme une lettre à la Poste (métaphore d'une époque lointaine disparue que les moins de quarante ans n'ont pas pu connaître) sans la moindre critique sérieuse. Bref, nous avons un bureau de propagande...

      • Samedi 1er Septembre 2018 à 08:49

        Il me semble que votre jugement sur la démocratie française est trop pessimiste. Même si elle est imparfaite, elle n'a rien à voir avec un régime autocratique. Il apparait que l'on emprisonne plus les ministres ou les proches du pouvoir que les journalistes et en ce moment avec la presse Macron n'est pas à la fête.

    3
    Souris donc
    Samedi 1er Septembre 2018 à 08:07

    En son temps, Alexis de Tocqueville, prémonitoire (De la démocratie en Amérique) avait déjà entrevu le risque de dérives, tyrannie de la majorité au nom de l'égalité, individualisme, matérialisme, perte du lien social...

    "...il se rencontre aussi dans le cœur humain un goût dépravé pour l’égalité, qui porte les faibles à vouloir attirer les forts à leur niveau, et qui réduit les hommes à préférer l’égalité dans la servitude à l’inégalité dans la liberté."

      • Samedi 1er Septembre 2018 à 08:47

        Cette remarquable réflexion anticipe le communisme. Mais ne pensez-vous pas qu'en ce moment ce sont plutôt les minorités qui tendent à imposer leur point de vue à la majorité ?

      • Souris donc
        Samedi 1er Septembre 2018 à 20:27

        Un peu long, mais génial : Raymond Aron présente Alexis de Tocqueville

      • Samedi 1er Septembre 2018 à 23:00

        R. Aron est toujours passionnant. Avec lui, le temps passe très vite.

      • Souris donc
        Dimanche 2 Septembre 2018 à 08:17
        Souris donc

        L'incohérence des jeunes vient de leur grégarisme et de leur absence de culture historique.

        A l'époque où on pouvait butiner partout en auditeur libre, je me souviens être allée écouter la fille de R. Aron, Dominique Schnapper, à l'EDHESS. Elle traitait de la Schtetl ("petite ville" en yiddish, quartier juif) à Paris, le Marais à l'époque, mais aussi d'autres quartiers à travers les âges. Passionnant.

        EnMêmeTemps on trouvait sur les stands de trottoir  vers Montparnasse des keffiehs que nous trouvions du dernier chic.

        J'espère ne pas être allée au cours de Dominique Schnapper avec autour du cou le keffieh à la Yasser Arafat. 

      • Dimanche 2 Septembre 2018 à 08:29

        L'avantage du keffieh, c'est qu'il peut toujours servir de serviette de table.

    4
    Samedi 1er Septembre 2018 à 10:12

    Deux réflexions :

    - dans une société où toutes les valeurs traditionnelles se démodent à tout va: "morale", "honneur", "respect", "bon goût", etc... avec tout ce qu'elles ont de relatif et de subjectif, pourquoi pas également la politique (au sens premier du terme), et spécialement la plus fragile : la démocratie ?

    - la démocratie est, à priori, le reflet d'une certaine majorité d'idées mais finalement reconnue et acceptée par tous; mais si certaines minorités (particulièrement ethniques ou religieuses, mais pas que) refusent cette règle du jeu, ou en abusent ou la détournent pour tenter d'imposer leurs diktats, quid de la "démocratie" ?

     

      • Samedi 1er Septembre 2018 à 10:44

        Comme l'a montré Harari dans son "Sapiens", la démocratie  est une construction mentale, une fiction qui n'a pas d'existence en soi, elle peut donc être remplacée par une autre fiction.

        Est-ce que la démocratie peut être définie par le règne de la majorité ? Je ne le pense pas car si un autocrate peut être élu par la majorité de citoyens (voir Poutine ou Erdogan), un gouvernement dans une démocratie ne représente qu'une minorité de la population si l'on tient compte des voix des autres partis et les abstentions.

        Il me semble que l'intégration (voire l'assimilation) des minorités ethniques ou religieuses est un problème différent de celui de la démocratie qui est un mode de gouvernement. La question est : une nation peut-elle être multiculturelle sans disparaître en tant que nation s'il n'y a plus de communauté de vue ?

      • Samedi 1er Septembre 2018 à 23:07

        La démocratie est un mode de gouvernement...et de rapports sociaux définis par les institutions.

    5
    Dimanche 2 Septembre 2018 à 10:08

    De même qu'il n'y a pas d'Amour mais des preuves d'amour, il n' y a pas de Démocratie idéale et éthérée mais la démocratie parlementaire représentative avec ses nombreuses composantes : séparation des pouvoirs, Etat de droit écrit, indépendance de la presse, etc...  bref un système crée par l'homme, imparfait comme lui, et que Winston Churchill définissait comme le pire des systèmes à l'exception de tous les autres. 

    Le problème c'est que beaucoup de  gens ( les jeunes notamment, c'est vrai, je vois cela avec mon fils) ne comprennent pas la cohérence de l'ensemble et pensent par inculture historique que l'on peut enlever certaines composantes sans remettre en cause le principe. Par exemple la liberté de la presse (en leur coupant les sources de financement -capitalistique ou étatique),  l'immunité parlementaire (qui parait si scandaleux mais protège les élus des excès), l'indépendance des juges, l'habeas corpus,  etc...

    Aujourd'hui, le Venezuela est un laboratoire in vivo pour étudier à quoi aboutit la remise en cause, les uns après les autres, des nombreux petits piliers de la démocratie parlementaire représentative.

    Et les USA un contre-exemple qui montre comment une démocratie reste une démocratie même en ayant à sa tête un admirateur de Poutine et de Kim Jong Un

      • Dimanche 2 Septembre 2018 à 10:31

        Je pense comme vous que la démocratie est un puzzle où les éléments sont imbriqués ou même comme un château de cartes dont elle a la fragilité : retirer une carte et tout risque de s'effondrer. C'est le peuple qui le plus souvent choisit ses despotes.

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    6
    Dimanche 2 Septembre 2018 à 10:44
    Pangloss

    La démocratie est un idéal vers lequel il faut tendre. Aucun régime n'est démocratique mais certains s'en rapprochent plus que d'autres. Quelquefois ils reculent. J'ai l'impression que c'est le cas de nombreux pays occidentaux même si aucun n'atteint le stade où en est le Venezuela si cher à Mélenchon. Des amis vénézuéliens m'avaient, quand Chavez venait d'arriver au pouvoir, déjà fait part de leur inquiétude vis-à-vis de l'évolution de leur pays quand ils entendaient les discours de leur président. Leur conclusion: Chavez est fou à lier. Ils songeaient déjà à émigrer. Je n'ai plus de nouvelles d'eux.

      • Dimanche 2 Septembre 2018 à 11:00

        Chavez est mort avant de voir le fiasco de ses idées sectaires pourtant déjà expérimentées ailleurs avec le même insuccès. On hésite entre l'inculture, l'incompétence, l'aveuglement, le goût du pouvoir ou la prétention de réussir là où les autres ont échoué sur le plan humain. Mais que vaut l'homme devant la certitude d'avoir raison ?

      • Dimanche 2 Septembre 2018 à 11:27

        En ce moment, en Europe, ce ne sont pas les populismes de gauche qui croissent mais celles de droite, cependant, ils se ressemblent sur bien des points.

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