• La bêtise pour tous

    La bêtise pour tousDes jeunes gens prétendant poursuivre des études universitaires (avec une tendance à la casse de leur outil d’études) tentent de réaliser une reconstitution historique de mai 68. Ils suivent avec application le processus vieux de 50 ans et peu importe la motivation de départ :

    D’abord, une opposition contre ce qu’ils estiment être une sélection (qui existe depuis longtemps pour les professions de santé et à mon avis excessive), préférant le tirage au sort qui donne leur chance aux paresseux et aux nuls.

    Ensuite, cette opposition à un ersatz de sélection a été rapidement remplacée par une « convergence des luttes », objectif qui montre à quel point leurs agitation est plus politique que technique.

    Ce qu’il y a d’amusant (il vaut mieux en rire) est qu’en raison des perturbations qu’ils ont eux-mêmes provoquées, ils réclament la validation automatique du 2ème trimestre, avec pour Tolbiac la note qualifiée de « politique » (c’est clair) de 20/20 et à Nanterre, plus modestement, la note de 15/20 pour tous. Notons que l’expression « pour tous » connaît une belle fortune linguistique, ce qui prouve que l’égalité dans la bêtise fait des progrès.

    Les membres de la minorité agissante qui ne vote qu’entre eux lors des assemblées dites générales (j’ai eu l’occasion en mai 68 d’assister à quelques-unes de ces assemblées où le spectacle gonflé de prétention frisait le ridicule, et je suppose qu’il en est de même aujourd’hui) sont d’une parfaite cohérence en réclamant que les partiels soient automatiquement validés avec une bonne note.

    En effet, puisqu’ils demandent l’absence totale de sélection à l’entrée de l’université qui aboutit à la stagnation d’étudiants peu doués ou paresseux sur les bancs des amphis (quand ils y entrent), on ne voit pas pourquoi il existerait une sélection ultérieure par des examens, en particulier en sciences humaines, matières où de toute façon le risque de chômage à la sortie est élevé que l’on soit diplômé ou pas. Les diplômes universitaires en ces matières n’ont qu’une maigre valeur sur le marché du travail car celui-ci impose une sélection bien plus drastique que celle que l’on pourrait éventuellement instaurer à l’université à l’entrée comme à la sortie. Alors pourquoi ne pas donner les diplômes à tous, à l’image du baccalauréat ?  Diplôme pour tous et tous pour rien, sauf un encadré sur le mur de la chambre.

    Ces étudiants politisés vont finir par descendre les universités françaises (dont la valeur s’abaisse régulièrement) où l’on peut jusqu’à présent entrer à moindre coût, et la faible valeur des diplômes universitaires favorisera sans doute l’éclosion d’écoles privées qui seront réservées à ceux et celles qui en ont les moyens. Une vilaine sélection par l’argent vers laquelle risque de converger aveuglement leur lutte folklorique.

    Mais on ne sait jamais sur quoi ce folklore peut déboucher. En mai 68 les manifestations étudiantes n’avaient, en fait, aucun but précis, laissant les politiques dubitatifs et en retrait. La grève générale prit le train en marche profitant de la situation bordélique entretenue par les étudiants. Comme disait Hegel ou Marx ou les deux : les évènements historiques se répètent, la première fois en tragédie (ce ne fut pas le cas en mai 68), la seconde fois en farce. Nous y sommes peut-être, à moins que la farce tourne en tragédie.

    « Pouvoir et chocolatJe m’ingère, donc je suis. »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 13 Avril 2018 à 17:28

    "Dany" se faisant vieux, il y a une place à prendre devant les caméras...

      • Vendredi 13 Avril 2018 à 17:40

        Ce qui vient illustrer la revendication du diplôme pour tous. Le masque de carnaval est assez réussi.

    2
    Vendredi 13 Avril 2018 à 18:00

    On pourrait demander à ces ânes de méditer sur la phrase suivante...ais la comprendraient-ils ?

     

    « Dans ma vie j'ai toujours regretté d'avoir parlé, mais jamais de m'être tu. »

     

    Abba Arsène

     

     

      • Vendredi 13 Avril 2018 à 18:16

        Parler est aussi un plaisir, tout dépend du contenu du discours.

    3
    Vendredi 13 Avril 2018 à 19:22

    C'est le principe du plus petit commun dénominateur: "Quand des imbéciles se mettent à crier des slogans, ils s'alignent sur quelque chose à la portée du plus bête".

      • Vendredi 13 Avril 2018 à 19:24

        C'est en quelque sorte le slogan par la base.

    4
    Souris donc
    Vendredi 13 Avril 2018 à 19:41

    Eclosion d'école privées de prépas aux meilleurs universités (médecine, pharmacie, chimie, Dauphine, Assas), sélection en fin de première année, puis par le marché du travail. Ou les concours administratifs. Souris donc : 25e/100. Puis détachée aux Affaires Etrangères. La belle vie.

    Classement Shanghai : pas de quoi s'enorgueillir.

      • Vendredi 13 Avril 2018 à 22:01

        Qu'on le veuille ou non, la sélection est partout. La seule question cruciale est comment sélectionner pour ne pas laisser des talents hors du circuit. Les autres sont des amateurs.

    5
    Vendredi 13 Avril 2018 à 20:21

    Ils osent tout (je les ai reconnus)...

     

     

    ...après "la commune libre de Tolbiac", ils revendiquent maintenant "un Califat queer autogéré"...

      • Vendredi 13 Avril 2018 à 22:02

        Nous ne sommes plus le 1er avril...

      • Vendredi 13 Avril 2018 à 22:30
      • Samedi 14 Avril 2018 à 08:32

        Il n'y a plus qu'à tirer la chasse d'eau.

      • Souris donc
        Samedi 14 Avril 2018 à 09:30

        Le califat queer autogéré. Tu crois rêver. Comme :

        Fac off !*

        [...] Planning d'une journée récente (Tolbiac) :

        10h30-11h30 : débat autour de l'historique de la destruction de l'université.

        11h30-12h30 : comob (= comité de mobilisation )

        12h30-13h30 : atelier déplacement collectif

        13h30-14h : point exilé-es

        14h-15h : atelier prise de parole en non-mixité (sans mecs)

        15h30-16h30 : formation streetmedic

        16h30-18h : qu'est-ce que la démocratie ?

        19h-21h : ciné-débat sur le Venezuela et la lutte.

        *A quoi Nicolas Ungemuth,  rubrique du Figaro "Nous vivons une époque formidable", ajoute : ils auraient pu grouper les deux derniers débats sous l'intitulé "Qu'est-ce que la démocratie au Venezuela ?)

      • Samedi 14 Avril 2018 à 09:40

        Ce qui permet de poser la question de leur santé mentale. Nous assistons à une phase délirante, le déni de la réalité

      • Souris donc
        Samedi 14 Avril 2018 à 15:30

        Vidéo de revendication détournée sur un compte twitter parodique du chien des bloqueurs de Tolbiac.

        Adrien s'est fait choper dans la chaufferie en train de réviser ses partiels. Le tribunal révolutionnaire a tranché : il doit se coller un post-it avec écrit "Finkielkraut" sur le front pendant 96 heures.

      • Samedi 14 Avril 2018 à 15:55

        Merci de m'avoir transmis ces précieux documents historiques. On hésite entre un canular et une mascarade involontaire. Dans ce dernier cas, on est triste de voir cette jeunesse nantie cherchant à jouer dans un spectacle révolutionnaire, contre une oppression inexistante dans une démocratie, à l'égal des insoumis dont on cherche toujours à quoi ils sont insoumis. On a l'impression de boxeurs frappant dans le vide ou de joueurs de guitare sans guitare. Il est triste aussi de voir quelques intellectuels cautionner gravement cette mascarade, ce qui montre que de grandes intelligences, comme Sartre à son époque, n'échappent pas à l'idiotie.

    6
    Halleyjc
    Samedi 14 Avril 2018 à 04:57
    Bravo au rédacteur et aux commentateurs !
      • Samedi 14 Avril 2018 à 08:36

        Vous avez raison de rendre hommage aux commentateurs.

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