• Etiquettes

    A propos du programme d'Emmanuel Macron, la journaliste du Monde Audrey Tonnelier s'est appliquée, le 24/02/17, à répondre aux lecteurs, et la première question posée fut la suivante :

    Sylvain : Bonjour. Faut-il qualifier le programme économique de Macron de social-libéral ou de droite modérée ? Se trouve-t-il à mi-chemin entre la gauche sociodémocrate et la droite humaniste ? Merci.

    Cette question est très révélatrice de l'importance accordée en France aux étiquettes. les choses doivent être classées et nommées. L'emballage est plus important que le contenu. 

    En septembre 2014 j'avais déjà publié un article ("Le verbe"), également à propos de Macron, que je reproduis ci-dessous :

    Quand on lit les articles des journalistes étrangers et notamment ceux des pays européens ou lorsqu’on les écoute à propos de la vie politique française, ce qui semble les frapper le plus est l’importance donnée dans les débats à l’idéologie. Ils s’étonnent que le débat serve plus à s’affronter en restant sur des positions dogmatiques et inconciliables qu’à trouver des points d’accord permettant d’avancer et de sortir des situations difficiles.

    Dans l’esprit des idéologues, le pragmatisme est un gros mot. Au lieu de tenter de sortir de la merde, beaucoup préfèrent y patauger pour rester dans la chaleur des idées toutes faites, ce qu’ils appellent des convictions, et peu importe si celles-ci sont inapplicables. L’idéologie peut même pousser l’idéologue à refuser de parler à l’autre, d’emblée considéré comme un ennemi puisqu’il n’a pas les mêmes idées que vous.

    De ce fait, étiqueter devient plus important qu’agir. Dans une récente émission télévisée /en 2014/, Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du Parti socialiste a affirmé que « le Parti socialiste ne sera pas social-libéral ! » et a estimé que son parti avait "un problème de doctrine" et devait "inventer un nouveau progressisme". Donc apparemment, pour cet homme politique le problème essentiel n’est pas de réduire le chômage, de permettre de vivre décemment de son travail et en sécurité, mais de définir une idéologie et de porter une étiquette, clefs fondamentales des solutions.

    De la même façon, l’étiquette appliquée à une personne est une marque indélébile qui peut la rendre d’emblée suspecte, et même condamnable, avant de pouvoir juger de ses actions. Le cas exemplaire est celui d’Emmanuel Macron, récemment nommé ministre de l’Economie dans le gouvernement socialiste, et considéré d’emblée comme un « social-traître » parce qu’il a travaillé dans une banque, et donc collaboré avec l’ennemi. On pourrait aussi logiquement penser que pour s’occuper d’économie, il est préférable de connaître la finance, et qu’un ancien cadre d’une banque (que l’on traite avec mépris de banquier comme si la banque lui appartenait) est probablement plus compétent que ces politiques dont la seule profession qu’ils connaissent est de faire de la politique, et qui, pour la plupart, n’ont jamais mis un pied dans une entreprise alors qu’ils prétendent réglementer son fonctionnement.

    Si tout a commencé avec le verbe, en cas d’abus, tout risque également de finir avec lui.

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 2 Mars 2017 à 12:48

    Macron ne s'est-il pas plié à la règle que vous édictez? En commençant par dire qu'il n'est ni de droite ni de gauche et en affirmant maintenant qu'il est et de droite et de gauche n'a-t-il pas privilégié les étiquettes au dépens d'un programme qu'il ne nous communique qu'aujourd'hui?

    2
    Jeudi 2 Mars 2017 à 14:17

    Avoir toutes les étiquettes, c'est en avoir aucune.

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    3
    Jeudi 2 Mars 2017 à 15:24

    Il en est de même de ceux qui affirment être à la "gauche de la gauche". Une position philosophiquement ridicule puisqu'elle est à la fois relative (elle varie en fonction de "la gauche") et totalement irréconciliable puisque, aussi loin qu'ira la gauche, ils semblent vouloir se situer encore plus à gauche ! 

    Leur problème est que la terre est ronde ! smile

      • Jeudi 2 Mars 2017 à 16:22

        Et à force de reculer vers la gauche, on finit par rejoindre l'extrême droite.

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