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Par Dr WO le 21 Janvier 2012 à 16:28
ARBRE EN HIVER
Sur cet arbre en hiver qui s’était effeuillé
Les cieux pudibonds semblent avoir laissé choir
Des nuages de passage sur son corps dépouillé
Couvrant ses membres nus d’un feuillage noir
Le vent soulèvera ces habits provisoires
Laissant l’arbre en hiver aussi dépourvu
Son squelette de bois que chacun pourra voir
Ses bras se découpant sur la clarté des nues
L’arbre patiente dans son sommeil hivernal
Les feuilles naissantes de sa prochaine mue
Viendront recouvrir sa carcasse sépulcrale
Et il renaîtra poussé par sa sève dormante
Dans son habit de paillettes pour un autre bal
A nouveau grand seigneur dans sa splendeur puissante
Paul Obraska
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Par Dr WO le 14 Septembre 2011 à 10:09
GYROPHARES
Gyrophares, gyrophares
Leurs lumières valsent dans le soir
Un homme au teint blafard
Est étendu sur le trottoir
Sur le bitume il y a peu de sang
Quand on est battu à mort
On saigne plutôt en dedans
La foule regarde de loin le corps
Se presse pour mieux voir
Tente de s’approcher encore
L’homme passait là par hasard
Il rentrait chez lui par un détour
Il s’était mis un peu en retard
En prenant du pain au carrefour
C’est un noir battu par des blancs
Ou un blanc battu par des noirs
Blanc ou noir peu importe la couleur
L’essentiel est de taper à plusieurs
Les gyrophares éclairent en tournant
Les badauds massés sur le trottoir
Les flashes de lumière en dansant
Révèlent les visages avides de voir
Un peu déçus par l’absence de sang
Ce n’est finalement qu’un corps
Et sans les gyrophares bleus et blancs
On pourrait penser que l’homme dort
L’homme n’avait à offrir aux assassins
Qu’une misérable miche de pain
Alors pourquoi l’a-t-on battu à mort ?
Parce qu’il était noir, parce qu’il était blanc ?
Personne ne sait quel fut son tort
Les assassins pas plus que les passants
Paul Obraska
Edward Munch « Soir sur Karl Johan »
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Par Dr WO le 20 Décembre 2010 à 16:18
LA NUIT ECLAIREE
Du bleu de la nuit, des étoiles perdues
Ont retrouvé leur chemin dans la cité,
Et sages, se sont alignées dans les rues.
Les arbres sombres nimbés de lumière
Comme une file de fantômes dressés,
Le feuillage éclairé par les réverbères.
Des flots jaunes se déversent des vitrines,
Attirant à elles les passants émerveillés,
Ils restent là, immobiles sous la bruine.
Les enfants en extase y collent leur nez,
Un sourire de joie éclairant leur bobine,
En y laissant la trace fugace d’une buée.
Dans les cavernes lumineuses des magasins
S’agitent les poupées d’un monde féerique,
La forêt de fils leur offre une vie de pantin.
Et aux accents d’une joyeuse ritournelle,
Leur peuple pris d’une danse mécanique,
Fête sans fin la venue prochaine de Noël.
Paul Obraska
Illustration : Camille Pissarro « Boulevard Montmartre, la nuit »
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Par Dr WO le 17 Décembre 2010 à 16:36
12 NOCTURNES
1
La Lune livide est une enfant sage
Elle a beau se cacher la face
Derrière un voile gris de nuages
Elle est obligée de regarder en face
La grosse Terre bleutée
Sans pouvoir se retourner
Ce n’est pas un spectacle pour les enfants
Mais que voulez-vous, la Terre
C’est sa mère
Et on ne choisit pas ses parents
2
Un bout de Lune égaré est tombé
Dans une flaque ronde de lumière
Où un homme saoul s’est oublié
Les mains au cou du réverbère
3
A la pleine Lune ou un autre quartier
Dans un immense coffre-fort de béton
Où les gens avant de se coucher
Entreposent leur avoir à explosions
Un spécimen mâle de l’Humanité
Ouvre avec une lame la combinaison
D’une femme inerte avant de la violer
4
Un père à petits pas prudents
Sans faire craquer les lames du plancher
Se glisse dans le silence de l’appartement
Regarde avec amour sa fille endormie
Qu’un rayon de Lune caresse en passant
Dans la petite chambre aux murs fleuris
Et se penche sur la belle enfant offerte
La braguette ouverte
5
Dans un bois bétonné ou une rue déserte
Des files de filles aux fesses découvertes
Se penchent sur les vitres entr’ouvertes
Au clair de Lune les couples se concertent
Pour choisir entre sexe et bouche experte
6
Avant de se fermer une bouche de métro
A vomi sur le sol un paquet-cadeau
Une grande boîte entourée de papier
Avec dedans un homme marron glacé
7
Une femme crie au secours dans la nuit
La Lune écoute monter les cris de terreur
Les gens agacés tournent dans leur lit
Tout de même, il est plus de 22 heures !
8
Une femme dans une chambre à coucher
Regarde le point rouge fixe de la télé
Et les chiffres bleus des heures défiler
L’époux couché bouge à ses côtés
Son gros ventre monte et descend
Il s’étouffe parfois dans ses ronflements
Et la femme pense dans son insomnie
Qu’il est bon d’avoir de la compagnie
9
La bouffe roule vers les garde-manger
Le malade garde l’espoir d’être guéri
Le médecin de garde ne peut rien pour lui
Le gardien de la paix n’est pas apaisé
Le voleur se garde de la Lune et s’enfuit
Le gardien de nuit n’a plus rien à garder
10
Un balayeur noir a envie de pisser
Combien de corps encore à enjamber ?
Il voit en passant les lunes dénudées
Le responsable municipal de la propreté
Arrivera-t-il à temps pour se soulager ?
11
Dans les beaux quartiers de Paris
Dans un petit local noir surpeuplé
Les gens ne dorment pas, ils crient
Plus fort que le tintamarre syncopé
Ils s’agitent, ils boivent, ils suent
Mains frôleuses et sexe à l’affût
Ils fument et se croisent aux vécés
Après avoir été longtemps enfermés
Ils s’expulsent au petit matin
Nauséeux, fripés, fatigués, drogués
Ils s’embrassent et se serrent la main
Encore une fois
Comme la Lune ils vont se coucher
La belle vie, quoi
12
C’est un bel arbre comme un monument
On s’y abrite de la pluie et du vent
Au clair de la Lune effarée
Une automobile en pièces détachées
Expire son huile et fume à ses pieds
De beaux jeunes gens se sont éclatés
Paul Obraska
Illustration : Salvador Dali : « Madrid. Homme ivre »
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Par Dr WO le 13 Septembre 2010 à 10:43
George Grosz « La ville »
DANS MA VILLE
Dans ma ville
Les voitures à l’étroit frottent leurs ailes
Comme des oiseaux englués de mazout
Derrière les ramasseurs de poubelles
Remplies des rogatons de nos croûtes
Dans ma ville
Dans les profondeurs des tunnels
Roulent des gens qui s’usent peu à peu
A côté des eaux usées corporelles
Qui coulent dans les égouts bourbeux
Dans ma ville
Il y a ceux qui peinent à écrire
Mais paraphent les graffiti
Pour laisser leur souvenir
Sur l’école aux murs noircis
Dans ma ville
Circulent des drogues à mourir
Sous les porches ou dans les vécés
Dans le sang des épaves juvéniles
Qui flottent avant de sombrer
Dans ma ville
Guettant les patrouilles
Il y a des corps qui font le pied de grue
Et cherchent sur les trottoirs des rues
A happer un pénis en vadrouille
Dans ma ville
Des porte-manteaux à la file
Marchent d’un pas de robot
Des filles filiformes défilent
Une fortune tissée sur le dos
Dans ma ville
Il y a des hôtels pleins de lumière
Des tapis où s’enfoncent les vernis
Où pour dormir on paye très cher
Même en cas d’insomnie
Dans ma ville
Il y a ceux qui pour dormir ne paient rien
Ils s’allongent dans la rue
A la portée des chiens
Qui leur pissent dessus
Paul Obraska
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Par Dr WO le 26 Mars 2010 à 17:16
BAL MELANCOLIQUEFanfare joyeuse d’un bal mélancolique
Les vieux assis dans leur chaise roulante
Regardent des rescapés arthritiques
Esquisser prudemment une danse lente
Regard triste sur les visages de parchemin
Les amuseurs en costume jouent la gaîté
Brillent les éclats de métal des musiciens
Dans la verdure fraîche des arbres printaniers
Bal nostalgique de l’impossible retour
Si le printemps increvable renaît toujours
Les regrets éclosent dans ce bal indécent
Les jeunes en sursis étalent leur santé
Les notes pétaradent des instruments à vent
Et meurent sur la tristesse des gens âgés
Paul Obraska
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Par Dr WO le 4 Mars 2010 à 17:24
SUR LE PONT CAULAINCOURTLe pont Caulaincourt
Enjambe le vieux cimetière
Les poutres sous les poids lourds
Tremblent sur les défunts sous terre
Menhirs dressés gravés d’or
Pierres tombales gavées de fleurs
Dans le silence du peuple des morts
Le bruit des moteurs sur leurs demeures
Sur leur ciel grondant de métal forgé
Les promeneurs en passant sur le pont
Regardent malgré eux à travers les croisées
Certains s’arrêtent comme sur un balcon
Et contemplent les pierres lisses des tombeaux
En pensant aux disparus qu’ils rejoindront bientôt
Paul Obraska
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Par Dr WO le 31 Janvier 2010 à 10:30
ENTRE COUPOLE ET PALAISEn cet hiver froid où la lumière se fait rare
En chassant le souffle glacé du passé
Je songe à la quiétude du pont des Arts
Sa fonte brûlante sous le soleil de l’été
Passerelle des promeneurs
Jetée entre coupole et palais
Les femmes sous la chaleur
Découvrent leurs attraits
Des jeunes filles reposent sur un banc
Et se gorgent de lumière
Nonchalamment
Sous les rayons solaires
Entre coupole et palais
Je me réchauffe sur le pont des Arts
En songeant à ce moment de paix
Entre deux fureurs de l’Histoire
Paul Obraska
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Par Dr WO le 17 Décembre 2009 à 16:55
LINCEULCe matin il neige sur Paris
Les flocons s’accrochent sur les toits inclinés
Les voitures stupéfaites avancent au ralenti
Avec un chuintement d’éponge mouillée
Leurs lumières comme des boules de sapin de Noël
Celles qui stationnent sont emballées
Dans des sacs blancs venus du ciel
Les piétons avancent prudemment
Un promeneur s’accroche à son chien fidèle
La neige comme une coquille d’œuf craque en marchant
Les monuments dans le gris du ciel recouverts d’un linceul
Prennent des allures de fantômes de l’histoire
Le lit du SDF est sous la neige et on ne peut plus le voir
Peut-être que dessous repose un homme seul
Paul Obraska
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Par Dr WO le 20 Novembre 2009 à 18:32
SURPRISE DE L’AUTOMNEJe reste surpris par la beauté de l’automne
Les arbres revêtent des parures cuivre et or
Et c’est avec regret qu’ils les abandonnent
En tombant à leurs pieds en un tapis mort
Le vent léger fait bruisser les parures
Comme un discret murmure d’adieu
Le soleil s’infiltre dans les déchirures
Et ajoute ses braises aux feuillages en feu
Je reste surpris par cette mort multicolore
Par ce feu d’artifice qui revient chaque an
En espérant l’an prochain le revoir encore
Et d’assister à la renaissance du printemps
Paul Obraska
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