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    Le 3 avril 2015, l'amendement n°1289 à la loi de santé a été adopté : « Nul ne peut être exclu du don de sang en raison de son orientation sexuelle ». Levée de l’interdiction qui empêchait jusqu’à présent (depuis 1983) les homosexuels masculins de donner leur sang. Ce n’est pas l’orientation sexuelle qui importe mais les comportements qui peuvent en découler.[1] C'est tout de même un peu jouer sur les mots.

    On se demande d’abord pourquoi une telle décision n’a pas été prise par les banques de sang plutôt que par les députés. Il est vrai que le lobby des homosexuels est plus puissant à l’Assemblée nationale que dans le milieu médical.

    On nage en pleine confusion. Il s’agit de prendre des mesures concernant une maladie infectieuse et pas de promouvoir une égalité ou de lutter contre une discrimination.

    La question est aussi de savoir si les homosexuels sont prêts à transmettre aux autres le virus dont ils sont éventuellement porteurs. Si cela se produisait, la population se retournerait contre eux. La sérologie ne devient positive qu’avec retard, le virus, bien que présent dans le sang prélevé, peut ne pas être décelé au contrôle lors d’une contamination récente.

    Ce n’est pas la première fois que la politique vient polluer la médecine. Dans les années 80, « L'affaire » du sang contaminé par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) responsable du sida s'était révélée en France médicalement incorrect et politiquement correct. Elle avait illustré avec éclat, l'exception française et les avantages du service public : le taux cumulé de sida d'origine transfusionnelle (hémophiles et transfusés) par nombre d'habitants en 1998 a été en France près de cinq fois supérieur à celui de l'Italie, près de dix fois celui de l'Allemagne et plus de treize fois celui du Royaume-Uni..Ce record avait été établi grâce à la préservation revendiquée de la vie privée des donneurs de sang pour ne pas écarter, par des questions insidieuses, ceux qui avaient le plus de risque d'être atteints par le virus : homosexuels, toxicomanes, et délinquants emprisonnés, permettant ainsi de le transmettre aux futures victimes dont la vie a paru moins respectable que le politiquement correct. Le droit avait été donné à un futur opéré ou un malade de refuser la vérification de son « statut viral », c'est à dire la révélation d'une éventuelle atteinte par une hépatite ou le sida alors que son sang pouvait contaminer le personnel soignant. L'intérêt industriel national a permis de prendre trois mois de retard par rapport aux autres pays développés pour appliquer le test de dépistage français, et près d'un an pour éliminer le virus des produits sanguins, pour éviter d'importer les méthodes déjà mises au point aux USA, alors que d'autres pays n'avaient pas  hésité à le faire. Quant aux produits en stock et en circulation dont le virus n'avait pas été éliminé, ils ont été laissés à la disposition du public pour des raisons économiques. Les laboratoires privés dans les pays voisins s'étaient empressés de les retirer du commerce pour éviter d'éventuels procès, ce que le service public en France n'a pas fait, pensant être à l'abri de ce type de désagréments. Pour ce triste record nos politiques ont admis être responsables mais pas coupables et les médecins intéressés se sont avérés irresponsables et coupables.

    Aujourd’hui la trithérapie a bouleversé la donne et l’infection au VIH est devenue chronique. Par contre, nombre d’homosexuels masculins n’ont guère modifié leurs comportements tout en abandonnant le préservatif. L’épidémie ne régresse pas parmi eux. Leurs comportements à risque ont augmenté de 32% en 2004 à 38% en 2011, et l’incidence (nouveaux cas) de l’infection à VIH est chez eux 200 fois plus élevée que chez les hétérosexuels. La prévalence (nombre de cas dans la population) est 65 fois plus élevée. 19% des transgenres seraient séropositifs (Lancet 2012) 

    D’après le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) qui consacrait son numéro du 23 octobre 2012 à la sécurité des produits sanguins, si tous les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) s’abstiennent de donner leur sang le risque de transmettre le virus du sida serait de 1 sur 5700000 dons. Entre 2008 et 2010, 28 séroconversions sont survenues chez les donneurs réguliers, 23 étaient de hommes et 12 d’entre eux ont admis a posteriori leurs rapports sexuels réguliers avec des hommes, de ce fait, le risque actuel est estimé a 1 sur 2900000. En excluant du don de sang que les homosexuels multipartenaires au cours des 12 derniers mois (ce qui est envisagé), le risque pourrait s’élever au pire à 1 sur 700000, soit 4 fois plus élevé qu’aujourd’hui. Mais que ne ferait-on pas pour que les homosexuels ne se sentent pas discriminés.  

    Le don du sang n’est pas un droit mais une offre généreuse, et seul le corps médical devrait pouvoir juger de son opportunité. N’est-il pas ahurissant que les politiques et les groupes de pression ne cessent de s’en mêler ? L’interdiction était largement étayée par les constatations actuelles et ne cherchait aucunement à nuire aux personnes visées.

    Il s’agit avant tout d’un problème médical : protéger la population contre une infection. Isoler un malade contagieux n’est pas une discrimination du malade en tant qu’être humain, mais une protection des autres. Un navire que l’on met en quarantaine n’est pas une discrimination des passagers, mais un isolement des porteurs possibles d’une maladie contagieuse, parmi ces passagers certains ne sont pas atteints mais ils risquent de l’être ou de transmettre la maladie, d’où leur isolement obligatoire. La situation est semblable pour les homosexuels masculins, environ 60% d’entre eux n’ont pas ou n’ont plus de comportements à risque, mais la difficulté est d’en être certain, et la prudence aurait du s’imposer.[2]

     

    [1] Position du gouvernement : « [Il s'agit de] lever les discriminations relatives à l'orientation sexuelle, et de leur substituer un critère de comportement sexuel s'appliquant à l'ensemble des donneurs potentiels. »

    [2] Dans un avis rendu le 31 mars 2015, le CCNE (comité consultatif national d’éthique) avait estimé que l'exclusion permanente des homosexuels du don du sang devait être maintenue, dans l'attente d'une réflexion collective et de nouvelles recherches
     

     


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    172. Sidaction négativeCe matin, sur une radio périphérique, le présentateur a interrogé une  femme séropositive au virus du SIDA depuis 20 ans. Traitée par la trithérapie antirétrovirale, elle a déclaré mener, et c’est heureux, une vie normale, elle paraissait pétulante, et disait péter la forme. Tant mieux.

    Les médecins et les biologistes ont réussi à transformer une maladie constamment mortelle en une maladie chronique, à condition d’être dans un pays qui dispose de ces traitements miraculeux, et avec la possibilité de prendre les malades totalement en charge.

    L’optimisme qui se dégageait de cette interview m’a mis mal à l’aise.

    L’épidémie au VIH ne cesse d’augmenter en France (environ 6000 nouveaux cas de contamination chaque année). Un tel optimisme aussi sympathique et encourageant soit-il peut jeter un doute sur la nécessité de la prévention par le préservatif, moyen de plus en plus abandonné, notamment par les homosexuels, pourtant les plus menacés en raison du comportement sexuel de nombre d’entre eux. Cet abandon pouvant expliquer l’extension de l’épidémie.

    L’efficacité de la trithérapie permet une vie normale, et c’est tant mieux. En outre, ce traitement est peut-être en passe de devenir un moyen de prévention permettant de donner libre cours à la prise de risques (voir ICI). Les séropositifs eux-mêmes pourraient peut-être avoir des rapports non protégés avec des séronégatifs si la charge virale dans leur sang est suffisamment abaissée (ce qui reste à prouver pour les homosexuels masculins, les rapports anaux étant plus traumatisants et plus contaminants).

    Optimisme un peu excessif lorsque l’on sait que la trithérapie prise de longues années, puisque l’on ne guérit pas pour l’instant de l’infection, peut avoir des effets secondaires non négligeables, en particulier cardio-vasculaires, et exige un suivi contraignant.

    Optimisme un peu gênant lorsque l’on sait que la trithérapie coûte actuellement à la société de 1000 à 1500 € chaque mois pour chaque contaminé, et il faut y ajouter le prix du suivi médical, et celui des examens biologiques réguliers pour la surveillance.

    A confronter au prix du préservatif.


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    23 euros23 euros, c’est le prix que je paie pour une coupe de cheveux, c’est celui d’un repas médiocre dans une brasserie, c’est également celui de la consultation d’un médecin généraliste.

    La majorité de la population est évidemment en faveur du tiers payant généralisé pour les honoraires dus au médecin, comme elle serait partisane d’être rasée gratis ou de manger à l’œil. Au médecin d’être payé par l’assurance maladie comme l’est l’artisan par l’assurance voiture pour un remplacement de pare-brise. A lui d’attendre qu’on le paie, à lui de contrôler que ses honoraires lui sont bien versés. Ce système n’est pour l’instant aucunement au point, mais qu’importe, il va s’imposer malgré les inconvénients prévisibles, les réticences ou les remarques des intéressés, car c’est une mesure dite de gauche.

    On ne sait pas si cette mesure sera judicieuse, efficace, économique, mais elle est de gauche, avec un petit clin d’œil vers les « frondeurs ».

    Mais est-elle vraiment de gauche ?

    Les soins des pauvres sont déjà intégralement pris en charge par la Couverture Médicale Universelle (CMU) pour les bas revenus, et par l’Assistance Médicale d’Etat (AME) pour les étrangers en situation irrégulière. La plus grande partie de la population est heureusement capable de sortir les 23 euros, mais il est vrai que la question peut se poser pour des gens peu fortunés, mais n’étant pas à la CMU, amenés à sortir plusieurs fois ces 23 euros, et dans ces cas le médecin instaure souvent lui-même le tiers payant.

    Quoi qu’il en soit, la mesure parait être de gauche car elle est égalitaire, puisque l’on accorde aux gens fortunés, pour lesquels 23 euros ne représentent que peu de chose, le même avantage qu’aux gens pauvres. Une égalité constitutionnelle que l’on pourrait aussi qualifier de droite.

    Dessin de KIRO paru dans le Canard enchaîné du 18 mars 2015


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  • La loi Leonetti-Claeys sur la fin de vie est en passe d’être adoptée. Pour l’instant l’amendement qui proposait "une assistance médicalisée active à mourir" a été rejeté à une courte majorité le 11mars, lors du débat à l'Assemblée Nationale.

    En l’état cette loi n’apporterait rien de bien nouveau sinon que le patient pourra demander dans des situations strictement encadrées par la loi à bénéficier en phase terminale d’une « sédation profonde et continue jusqu’au décès ». La nouveauté est « continue jusqu’au décès ». Autrement dit, en cas de douleurs ne pas attendre la réapparition de celles-ci pour renouveler la sédation. Le « jusqu’au décès » est évidemment ambigu, mais il s’agit de cas désespérés où l’on permet au mourant de mourir pendant son sommeil. On peut difficilement être contre.

    Reste que le cas difficile des grands handicapés réclamant la mort ne semble pas avoir été envisagé (je ne connais pas tous les détails de la loi) et le suicide assisté est pour l’instant écarté.

    Avant le débat à l’Assemblée est paru dans Le Monde du 10 mars 2015 un appel de « cinq hauts dignitaires des trois grandes religions monothéistes pour dire leur opposition à l’emploi de la sédation pour donner la mort ». Dans laquelle ils déclarent que « toute vie humaine doit être respectée spécialement au moment où elle est le plus fragilisée » que « Nous demandons que cette loi civile soit civilisatrice, c'est-à-dire qu’elle aide à vivre et à mourir, sans jamais écourter la vie, sans jamais décider de donner la mort ».

    En fait, la loi n’autorise pas la sédation pour donner la mort, celle-ci surviendra de toute façon à court terme. Ce n’est pas la sédation qui tue le malade mais sa maladie.

    La sédation peut-elle écourter la vie ? Pas la sédation elle-même (sauf doses toxiques), mais l'arrêt éventuel en parallèle de tous les traitements de survie, nutrition et hydratation. Cependant, peut-on considérer que la vie n’est pas respectée si le malade meurt quelques heures avant le délai qui lui était imparti mais en évitant une agonie douloureuse les jours précédents ?

    Ces religieux ont évidemment le droit de s’exprimer, mais ils parlent en leur nom propre à partir d’une doctrine qui n’intéresse a priori que les seuls croyants. Le Parlement n’a donc pas à les écouter. En effet, si la loi est appliquée, rien n’interdit aux croyants de vouloir souffrir jusqu’au bout et de ne pas demander ou de refuser que les médecins leur délivrent une « sédation profonde et continue » au risque de hâter leur mort.

    Ce qui semble gêner ces dignitaires, qui admettent qu’il faut soulager le mourant, c’est que celui-ci n’ait plus conscience de sa mort. Le soulager, certes, mais pas trop pour voir la mort venir.

    J’avoue que ces discours, aussi sincères soient-ils, paraissent un peu « tartuffiens » venant de représentants d’idéologies qui se sont révélées, à un moment ou un autre, et pendant des siècles, particulièrement meurtrières, abrégeant la vie des autres à tour de bras au nom de leur dieu, et même lorsqu’il s’agit du même dieu au nom de la façon d’y croire.

    Par ailleurs, « La vie à tout prix » est assez contradictoire de la part d’idéologies dont le souci majeur n’est pas la vie ici-bas perturbée par leurs interdits jusqu’à demander de supporter ou de s’infliger des souffrances, mais l’Au-delà. La vie n’étant qu’une mise à l’épreuve afin d’y parvenir dans les meilleures conditions mais pas dans les meilleurs délais.


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    Lors de mes études, j’ai eu l’occasion de voir au microscope des cellules et des tissus et j’ai toujours été frappé par la beauté des formes et des couleurs créées par le vivant. Des tableaux abstraits peints par la nature joignant l’art à l’efficacité.

    La British Heart Foundation a justement annoncé fin janvier les vainqueurs de son concours Reflections in science. L'art de la science, la science de l'art que commente le Guardian puisque le but de ce concours est de populariser les images scientifiques les plus pertinentes et les plus belles, le thème étant bien sûr le coeur ou les vaisseaux sanguins.

    169. Beautés intérieures

    Ce paysage sous-marin de récif corallien proposé par Fraser Macrae, de l'université de Leeds, est en fait un détail d'un caillot sanguin qui réalise cette structure grise sur laquelle viennent s'agglutiner des cellules sanguines .

    169. Beautés intérieures

    Cette représentation dynamique des fluides a été produite par Francesco Iori, de l'Imperial College de Londres. C’est une modélisation destinée à trouver le meilleur angle pour relier la circulation sanguine à la machine de dialyse sans créer trop de perturbations dans le flux sanguin. Cette dialyse qui permet d’épurer le sang de milliers d’insuffisants rénaux et qui a contribué à sauver une multitude de malades à travers le monde depuis sa conception que l’on doit à Willem J. Kolff. Ce jeune médecin hollandais de 32 ans pensa en 1943 à utiliser la cellophane, dérivé de la cellulose et destiné à emballer les aliments, pour fabriquer les premiers reins artificiels opérationnels permettant par hémodialyse d’épurer le sang quand les reins ne peuvent plus le faire. Après la guerre, il partit aux Etats-Unis avec ses machines et ira encore participer à l’aventure du cœur artificiel. C’est à Kolff, oublié du Nobel et des dictionnaires que des milliers d’hémodialysés doivent la vie.

    169. Beautés intérieures

    C'est la naissance d'un coeur, celui d'une souris. L'image de Sara Ivins, de l'University College de Londres, montre la vascularisation d'un coeur de souris en train de se développer. Les souris possèdent la capacité enviable de régénérer leur muscle cardiaque.

    169. Beautés intérieures

    Les êtres humains n’ayant pas la capacité de régénérer leur cœur comme la souris, on cherche depuis des années à introduire des cellules neuves dans le muscle cardiaque lésé ou dont les capacités contractiles sont diminuées. Ces images sont en fait des cellules musculaires cardiaques issues de cellules souches étudiées par le docteur James Smith, de l'université de Nottingham.

    En France, c’est le Pr Philippe Ménasché qui a tenté depuis une vingtaine d’années de spécialiser des cellules musculaires ordinaires en cellules cardiaques et de les introduire dans les zones atteintes du cœur. Récemment il a présenté une technique utilisant un patch de cellules neuves dérivées de cellules souches embryonnaires (ce qui est maintenant permis en France) pour coloniser une zone lésée par un infarctus du myocarde.

    Une des sources : Courrier international du 7/02/15


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  • Dans mon billet : « 154. Histoire de fesses » j’avais rapporté une étude fort sérieuse de l’université d’Oxford qui tendait à montrer, en étudiant 16000 femmes, que celles qui ont le postérieur le plus rebondi seraient à la fois en meilleur santé et plus intelligentes, si tant est que l’intelligence puisse être mesurée par le QI. Du Q au QI, il fallait y penser.

    En fait, les fesses rebondies (mais avec une taille mince) seraient avant tout un indice de bonne santé chez les femmes et c’est elle qui serait à l’origine d’un QI plus élevé. Cette meilleure santé serait due à la répartition des graisses. Les graisses contenues dans les fesses, comme dans les hanches auraient tendance à stocker plus d’Oméga-3, acides gras considérés comme bénéfiques, et à relâcher moins de cytokines[1].

    Et cette étude allait même plus loin en suggérant que les enfants nés d’une mère aux hanches et aux fesses généreuses seraient plus intelligents que ceux nés d’une femme plus mince

    Et voilà que l’étude britannique vient d’être confirmée pour ce qui concerne la descendance par une très sérieuse étude américaine de l'Université de Pittsburgh qui révèle que les graisses qui font les formes généreuses des femmes sont directement acheminées vers le cerveau du bébé lors de l'allaitement et participent à sa construction !

    "La graisse des fesses est un dépôt prévu pour le développement cérébral de l'enfant", explique le Professeur Will Lassek, épidémiologiste et auteur principal de l'étude. "Il faut beaucoup de graisse pour constituer un système nerveux, et celles contenues dans les fesses et les hanches des femmes sont enrichies en DHA (acide docosahexaénoïque), un composant important du cerveau humain. C'est comme si les femmes avaient évolué de façon à accumuler ces graisses et à les conserver jusqu'à l'arrivée d'un bébé."

    Pendant l’évolution, le cerveau humain est en effet passé d'un volume de 400 ml à 1 200 ml, ce qui expliquerait le stockage de plus en plus important de graisses chez la femme.

    La raison de la présence d'autant de graisses chez la femme (30% de leur poids total contre 10% chez l'homme) a longtemps été un mystère, mais cette explication pourrait bien éclaircir les choses. "C'est un taux de graisses similaire à celui observé chez les ours lorsqu'ils hibernent ou chez les baleines qui vivent dans les eaux glaciales arctiques", ajoute le chercheur, en spécifiant que cette masse graisseuse est en partie perdue durant l'allaitement (en moyenne 500 gr par mois), puisque l'enfant en tire profit.

    Selon David Bainbridge, biologiste de la reproduction à l'Université de Cambridge, ces résultats expliqueraient aussi pourquoi les hommes se tournent souvent vers les femmes aux courbes généreuses : ils y verraient indirectement la possibilité d'une descendance viable et intelligente. [Source : Topsante.com]

    Tout ce raisonnement est intéressant (et peut-être est-il exact) mais il ressemble un peu au sketch où à chaque question il est répondu : « c’est étudié pour ». Je me permettrais de soulever prudemment quelques questions :

    Dire que les femmes qui ont les fesses rebondies sont plus intelligentes parce qu’elles sont en meilleure santé, n’est-ce pas établir une corrélation bien fragile entre la santé et l’intelligence ?

    Le cerveau humain ayant triplé pendant l’évolution peut-on en déduire que le volume des fesses féminines a également triplé pendant la même période ?

    Peut-on vraiment affirmer que les enfants élevés au biberon et qui ne disposent pas des graisses fessières de leur mère sont plus bêtes que ceux élevés au sein ?

    Les femmes qui allaitent ont-elles les fesses qui deviennent plus plates que celles qui n’allaitent pas ?

    Qu’adviendra-t-il de l’humanité si la mode actuelle de la minceur se perpétue au point de remplacer les fesses féminines en forme de double ballon de football en un postérieur en double balle de tennis ?

    154. bis Histoire de fesses

    Gustave Courbet : « La source »

     

    [1] Secrétées par les cellules lorsqu’elles sont stimulées. Elles sont impliquées dans la régulation des fonctions immunitaires.


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    Touche pas à mon YCe billet est surtout destiné aux hommes et à ceux qui veulent ne plus l'être. Ils sont en effet porteurs du petit chromosome Y, cet ersatz d’ADN (quelques dizaines de gènes), qui détermine le sexe masculin. Les femmes, elles, sont porteuses de deux chromosomes – XX - dont la symétrie est plus seyante que le couple XY bancal retrouvé chez les hommes.

    Le comble est que les hommes peuvent perdre ou rétrécir leur chromosome Y, ce qui fait désordre, mais n’entraîne pas la perte du sexe.

    Une étude suédoise portant sur 6000 hommes et publiée dans la revue Science (article également rapporté par Science et vie), s’est intéressée au rapport entre le tabagisme et le devenir du chromosome Y dans les cellules sanguines. Ces chercheurs ont ainsi constaté que les fumeurs ont trois fois plus de risque de perdre leur Y que les non fumeurs.

    Un chromosome qui part en fumée, ce n’est pas banal.

    Bien sûr, les transsexuels pourraient, en fumant, se débarrasser de cet Y encombrant en ne conservant que le X manifestement plus féminin. Mais cela nécessiterait un tabagisme suffisant, car il semble que cet Y est d’autant plus mal en point que le tabagisme est important.

    Mais un Y riquiqui ou qui se serait fait la malle ne serait pas de bon augure. Les chercheurs ont en effet trouvé un rapport entre sa disparition et l’apparition des cancers non sanguins, sans savoir si la détérioration de l’Y favoriserait directement le cancer ou si elle n’est simplement qu’un marqueur des dégâts provoqués par le tabagisme.

    Ce qui me parait plus surprenant dans cette histoire est que le chromosome Y serait de retour si le tabagisme est arrêté ! Un Y fantôme qui réapparaitrait une fois la fumée dissipée.


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  • Voir une personne écrire de la main gauche laisse tout le monde indifférent, et écrire soi-même de la main gauche ne vous donne évidemment aucun sentiment d'infériorité par rapport aux droitiers. Mais ce ne fut pas toujours le cas. 

    Le côté gauche a toujours eu mauvaise réputation, depuis la senestre des augures latins et la gauche du Seigneur où  sont placés les méchants avant d'être envoyés au Diable.  Les gauchers ont longtemps constitué une anomalie à l'ordre social, et à partir du XVIe siècle, ils ont subi une véritable répression. D'abord considérés comme des déviants : « Ce sont des gens à l'envers dont on se demande même s'il s'agit vraiment de gens »,[1] ils deviennent des malades pour des savants du XIXème qui parlent de dégénérescence ou d'hérédité morbide et affirment la plus grande fréquence des gauchers chez les délinquants, les dévoyés, les malades mentaux et dans des « races inférieures ». De grands noms comme celui du chirurgien Odilon-Marie Lannelongue participe à cette discrimination au début du XXe siècle.

    Les parents et les médecins, avec l'aval de la science, vont donc lutter jusqu'à une époque récente contre cette pseudo tare honteuse par tous les moyens dont quelques petits instruments de torture : sangle pour emprisonner la main gauche, anneaux métalliques portant la plume pour la main droite. Ces traitements radicaux ne manquèrent pas d'entraîner des séquelles chez les gauchers contrariés, faisant basculer des sujets sains dans la pathologie.

    Cette discrimination a heureusement cessé, mais seulement après la Deuxième Guerre mondiale pour la France. Pour se venger les gauchers posent parfois des problèmes aux droitiers lors des compétitions sportives.

    [1] Francisco de Quevedo, humoriste espagnol du XVIIe siècle, cité par Pierre-Michel Bertrand, l'Histoire n° 276 bis, Mai 2003


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    Le paradoxe du pouvoir médical. Si le médecin n'avait pas de pouvoir, on se demande pourquoi on irait le consulter. Le pouvoir du médecin est redouté, critiqué,  honni mais nécessaire et recherché. Ne pas l'exercer constitue une faute professionnelle, à la limite condamnable : c'est la paradoxe du pouvoir médical.

    Sur la société la médecine exerce une dictature. Comme toute dictature, elle est basée sur la terreur, celle de la maladie et de la mort. Comme toutes les dictatures, elle prétend s'exercer pour le bonheur de la population et trace les limites du bien et du mal

    Il est mal de fumer. C'est en tous cas s'exposer aux multiples façons de mourir par le tabac. Longtemps symbole de virilité, il peut conduire à l'impuissance en rétrécissant les artères. Devenu symbole d'indépendance et d'égalité chez la femme, il lui permet d'avoir des cancers de l'homme qu'elle n'avait que rarement auparavant et de succomber plus tôt, comme lui, aux maladies cardio-vasculaires. « Juste après le coït on entend rire le diable » (Schopenhauer). C'est sûrement parce que c'est le moment où l'on fume une cigarette.                                                                           

    Il est mal d'être gros. L'épidémie d'obésité des pays développés est à la limite indécente mais contrebalance la perte de poids des dénutris  des pays pauvres, permettant ainsi la stabilité pondérale de la biosphère. La calorie, unité de quantité de chaleur et de valeur énergétique des aliments, est omniprésente dans les conversations des dîners en ville où les convives transmutent simultanément la chaleur en poids et l'énergie en masse. L'amaigrissement est l'objectif déclaré d'une industrie alimentaire pléthorique qui fait de la prévention et de la santé ses arguments publicitaires principaux. A cet égard, les idées médicales ont un impact économique pour lequel les médecins devraient réclamer des droits d'auteurs.

    Mais rien n'est simple : si le surpoids favorise les maladies cardiovasculaires, en cas d'accident cardiaque l'évolution semble plus favorable chez les gros que chez les maigres.                                                                            

    Il est mal de manger ceci ou cela. On s'alimentait pour vivre en y prenant si possible du plaisir. La médecine a heureusement modifié les choses : on mange pour ne pas être malade, suivre l'ANR (apport nutritionnel recommandé)   et devenir assez vieux pour ne plus avoir de dents pour manger « car l'important n'est plus de vivre pleinement le temps qui nous est alloué mais de tenir le plus tard possible : à la notion d'étapes de la vie succède celle de longévité » (Pascal Bruckner)[1]. « Alicament » est une trouvaille néologique qui sert à vendre un aliment auquel le fabriquant attribue des vertus thérapeutiques.                                                                           

    Il est mal d'être sédentaire. Pourtant «  Les exercices corporels, eux, ne servent pas à grand chose »  (St Paul)[2]. C'était également l'avis bien connu de Churchill qui attribuait sa longévité à son mépris du sport :« never sport ». A notre époque le sport a cependant bonne presse, surtout pour les articulations qui s'usent et les disques qui s'écrasent. Bouger, certes, mais pourquoi s'épuiser ?

    Pour votre bien soyez inquiet. Le mode de vie conseillé par les médecins s'applique à toute la population, ceux qui ne rentrent pas dans le cadre vertueux  sont marginalisés et montrés du doigt. S'éloigner de la moyenne statistique devient un péché mortel. Et en plus, les médecins ont raison !

    Toute la population est soumise par tous les moyens : radio, télévision, journaux, internet, à des messages l'informant de toutes les maladies dont elle peut être atteinte. Diffusion insidieuse, permanente de notre fragilité. Il est confirmé à celui ou celle encore en bonne santé que cette état n'est que transitoire et qu'il n'est pas raisonnable de jouir de cette félicité. Les gens qui se sentaient bien finissent par se sentir mal à l'annonce qu'ils ont tel ou tel risque d'avoir telle ou telle maladie et ceci de façon répétée. Crainte diffuse et diffusée que les annonceurs utilisent pour recueillir des fonds. Mais obtenir de l'argent sous la menace n'est-ce pas du chantage ?


    [1] L'Euphorie perpétuelle, éd Grasset et Fasquelle, 2000

    [2] 1ère épître à Timothée 4/8


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    La loi de santé 2014, comme toutes celles qui furent pondues par les différents gouvernements, insiste sur la prévention. La prévention est en effet « la tarte à la crème » préférée des gouvernants dépassés par les évènements et qu’ils lancent périodiquement à la tête de la population.

    Le postulat est le suivant : si l’on dépense suffisamment d’argent pour prévenir les maladies, elles n’apparaitront pas et nous n’auront plus à dépenser de l’argent pour les soigner. Mais ce postulat n’est vrai (voir l’article « 160. La prévention est-elle source d’économies ? » que dans domaines où la prévention permettrait d’éviter définitivement la survenue de maladies : les infections par les vaccinations (ce qui est fait), le diabète lorsqu’il est induit par une surcharge pondérale, les maladies provoquées par des intoxications volontaires comme l’alcool, le tabac ou les drogues, et il faut y ajouter les comportements sexuels à risques.

    Puisque tous les gouvernements successifs n’ont cessé de prendre des mesures dans ces domaines, quant est-il des résultats de leurs efforts pour cette prévention qui pourrait être efficace de façon radicale ?

    - La consommation d’alcool a certes diminué régulièrement en France mais la proportion de consommateurs excessifs reste stable à environ 10% de la population adulte, avec 20% des patients hospitalisés, et environ 30000 décès par an directement attribuable à l’alcool.

    - La proportion des fumeurs en France est passée de 31,4% en 2005 à 34% en 2012 avec 200 morts par jour.

    - Les jeunes français sont en tête des consommateurs de cannabis en Europe et la consommation des autres drogues ne fait qu’augmenter.

    - En 2012, 64000 personnes ont découvert leur séropositivité au VIH. Entre 2011 et 2012, la découverte de l’infection à VIH chez les gays a augmenté de 14%.

    On ne peut que constater l’échec de l’Etat, mais ce n’est aucunement spécifique à la France.

    Quelles sont les mesures prévues en matière de prévention par le gouvernement actuel ? « Prévention du tabagisme : instauration d'un paquet neutre et encadrement de l'usage de la cigarette électronique dans les lieux publics.

    Prévention de l'alcoolisme chez les jeunes. La vente de certains produits favorisant la consommation d’alcool et notamment le « binge drinking » (ou alcoolisation accélérée) chez les jeunes devrait être interdite.

    Accès à la contraception d'urgence garanti pour les jeunes femmes mineures sans condition auprès de l'infirmière scolaire.

    Définition d'un cadre pour l'expérimentation de salles de consommation à moindre risque, dites « salles de shoot ». (Le Monde du 15/10/14).

    Il faut y ajouter le code couleur pour les aliments.

    Ce sont de louables intentions mais si ces mesures sont adoptées, je crains qu’elles ne changeront guère la situation (sauf pour la contraception). Mais il faut avouer que les solutions ne sont pas évidentes, que l’on se heurte à des comportements individuels où le choix peut alterner entre soins, culpabilisation et répression. A noter qu’une opposition à la cigarette électronique est assez paradoxale puisque la consommation de tabac a baissé pour la première fois depuis son introduction. Quant aux salles de shoot, elles ne diminueront sûrement pas la consommation de drogues.

    Le chapeau de la loi de santé est le suivant :

    "Notre système de santé est performant mais inéquitable, c'est pourquoi il est indispensable de le refonder. La loi de santé s'articule autour de trois axes : prévenir avant d’avoir à guérir, faciliter la santé au quotidien et innover pour consolider l'excellence de notre système de santé."

    J’ai toujours une certaine reticence devant les slogans publicitaires.


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