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AINSI VA LA VIE I
Klimt " La vierge"
ÊTRE LE PREMIER
Les hommes se donnent bien du mal
Pour être le premier
Et inscrire leur nom dans les annales
Des noms pour la plupart oubliés
Le premier à découvrir une terreDéjà habitée
Pour y planter son drapeau
Et commencer une guerre
Le premier à grimper sur un pic
Pour redescendre aussitôt
Le premier à courir aussi vite
Avant d’être dépassé
Le premier à traverser les mers
Vent debout, vent arrière
A l’endroit, à l’envers
Avant d’être repêché
Il y a ceux qui ne seront jamais premiers
Ni sur terre
Ni sur les mers
Ni dans les cieux
Mais qui exigent de l’être au moins une fois
Pour ces prétentieux
Qui ne tentent aucun exploit
Il y a la vierge à déflorer
On est le premier que l’on peut
Paul Obraska
Joan Miro "La naissance du monde"
BALLONIl arrivera qu’un jour ou une nuit
Je ne sais où, je ne sais comment
Je serai banni de cette vie
Pour retourner au néant
Et le monde ne sera plus
Le monde est fragile, il tient dans le creux de ma main
Je l’aurai retenu comme j’ai pu
En vain
Lorsque ma main s’ouvrira comme une fleur fanée
Le monde s’échappera d’un coup dans le néant
Libéré
Comme le ballon lâché par l’enfant
Mais lui le voit lentement s’éloigner
Il a le temps.
Paul Obraska
Van Gogh "La nuit étoilée, Saint-Rémy"PARTICULES
Quelqu’un regarde-t-il Par les grandes fenêtres étoilées Le sort imbécile Des particules condamnées ? Agitées par un mouvement brownien Maintenues en vie par leur agitation Petites particules au destin incertain Des paires de particules que le hasard mêle Provoquent entre elles de petites collisions D’où naissent des particules nouvelles Attirées de temps en temps par un aimant Elles s’apprêtent aux grandes explosions Et se heurtent en de fols embrasements Laissant derrière elles une fugace lueur Les particules disparaissent dans le néant Par les grandes fenêtres étoilées Quelqu’un aime-t-il voir la douleur Des particules condamnées ?
Paul Obraska
COQUILLAGEC’est un coquillage aux murs nacrés
Spirale de douces courbes érotiques
Comme un pas de vis pour entrer
Dans les profondeurs prolifiques
C’est un coquillage couleur chair
Serti dans un fourreau de dentelle
Pour séduire les futurs locataires
La coquille exposée se fait belle
Et les hommes de passage
Sont invités à monter l’escalier
A ouvrir les valves du coquillage
Mais ils ne doivent pas s’attarder
Pour laisser à d’autres arrivages
Le plaisir triste de le consommer
Paul Obraska
Picabia "Idylle"IL A FALLUQu’il a fallu de miracles, qu’il a fallu de hasards
Pour que ces deux êtres se soient rencontrés
Qu’ils soient réunis, ici, dans un même regard
Qu’ils se touchent et échangent leurs baisers
Il a fallu être tirés à la loterie cellulaire
Il a fallu être nés dans le même temps
Rejetons de générations millénaires
Migrantes depuis la nuit des temps
Leurs ancêtres ont traversé pays et continents
Echappés aux massacres et aux destructions
Ils ont pu laisser une chaîne de descendants
Pour que s’attachent enfin ces deux maillons
Il a fallu que les deux puissent surmonter
Les dangers, les maladies, les accidents
Rester toujours en vie pour se rencontrer
Il a fallu de la chance pour rester vivant
Parmi la multitude sur la Terre immense
Il a fallu se croiser sous les mêmes cieux
L’un aurait pu être retardé, l’autre en avance
Ils furent là au même moment, en un même lieu
Il a fallu se voir
Il a fallu se plaire
Il a fallu oser
Il a fallu s’aimer
C’est improbable
C’est impossible
Cette idylle ne l’ont-ils pas rêvée ?
Paul Obraska
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Commentaires
1gentle13Mardi 26 Février 2008 à 21:03bonsoir superbe poèmes que je viens de lire, tu as un sacré talent et c'est un plaisir de te lire. AmicalementRépondre
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