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Par Dr WO le 1 Janvier 2011 à 16:04
Le jour de l’an, le jour le plus mélancolique…
Une année de perdue, une année de retrouvée…
Edgard Degas « Mélancolie »
UNE ANNEE
C’est l’hiver
Le ciel est blanc, il fait froid
Une année a été mise en terre
Les gens nauséeux pressent le pas
Bientôt le printemps
Les arbres enfin verts coifferont squares et avenues
Leurs fleurs fragiles ne resteront pas longtemps
Leurs fins pétales pointilleront les trottoirs des rues
Puis viendra l’été
La chaleur dénudera les jeunes femmes de la cité
Leur corps sous les tissus fins sera à peine voilé
Elles s’ensoleilleront aux terrasses des cafés
Et s'allumera le bûcher de l’automne
Les feuillages s’embraseront de leur éclat agonique
Les feuilles que les arbres dénudés abandonnent
Donneront aux rues de la ville des teintes magiques
Paul Obraska
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Par Dr WO le 20 Septembre 2010 à 17:48
Gustav Klimt « Mort et Vie »
MORT ET VIE
Dans un coin, la Mort attend,
Patiente et têtue.
Elle a le temps.
Son squelette cliquetant revêtu
D’une longue robe chamarrée
D’une sombre étoffe crucifère.
Elle contemple, le crâne penché,
Les futurs habitants du cimetière
Sans cacher sa concupiscence.
Les humains se tiennent serrés,
Comme pour assurer leur défense,
Pyramide de corps enchevêtrés.
Leurs paupières sont déjà fermées.
Sont-ils morts ou toujours vivants ?
Les femmes ont le visage attendri,
Serrées contre le corps de l’enfant,
Qu’elles aimeraient protéger de la nuit.
Et l’amant enveloppe son amante.
Seront-ils plus forts les corps confondus ?
Protection aussi dérisoire qu’émouvante
Contre la Mort se tenant à l’affût.
Paul Obraska
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Par Dr WO le 23 Avril 2010 à 16:44
Egon Schiele « Femme renversée »
A L’ENVERS
La tête en arrière
Le monde renversé
Renverser le temps
Les yeux bien ouverts
Revivre à l’envers
Effacer le présent
Remonter le passé
Tout recommencer
La main sur ce cœur à prendre
Dans ce corps trop pris
Des mots à entendre
Dans le désordre du lit
Les pensées chavirent
Dans la tête renversée
Mais la femme soupire
Il est temps de se lever
De reprendre la vie
Où elle l’a laissée
Fini de rêver
Paul Obraska
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Par Dr WO le 23 Décembre 2009 à 17:58
Chagall « La mariée à l’éventail »NOCES D’OR
Nous avons, ma belle mariée
Survécus aux peines et aux fous
Nous avons traversé ensemble les années
Comme les années nous ont traversés
Roule le temps, roule la roue
Malgré le temps, malgré tout
Nous nous aimons encore
Etonnés, craintifs, émus
En ce jour imprévu
De nos noces d’or
Paul Obraska
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Par Dr WO le 18 Août 2009 à 18:33
Oscar Kokoschka : « La mariée du vent »SOLITUDE
C’est dans le silence de la nuit
Lorsqu’on entend le bois craquer
Lorsque dans le sommeil tu es partie
Que je reste seul, comme je l’avais été
Le vent des rêves t’a emportée dans la nuit
Loin de moi dans un immobile voyage
Tu suis ses méandres en restant à sa merci
En me laissant seul abandonné sur le rivage
C’est dans la solitude de la nuit
Lorsque le monde s’efface dans le noir
Lorsque près de moi tu restes endormie
Que je guette ta respiration sans te voir
C’est dans la pensée de la nuit
Lorsqu’on éprouve l’amère finitude
Lorsque la crainte vient réveiller l’insomnie
Que je ressens l’absolue solitude
C’est dans le crépuscule de la nuit
Lorsque le gris du jour se lève
Lorsque tu te réveilles encore endormie
Que la solitude s’enfuit comme un rêve
Paul Obraska24 commentaires
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Par Dr WO le 16 Juin 2009 à 18:16
Albrecht Dürer : "Le Christ au milieu des docteurs" (détail)
JEUX DE MAINSIl y a la main qui écrit
La main qui pétrit
La main qui peint
La main qui pétrit le pain
Il y a la main complice
Qui donne une caresse
A l’être que l’on aime
Au chien qui vous aime
Ou aux fesses tentatrices
Il y a les mains réunies
Une menotte dans une grosse
Une large sur une fine
Les doigts entrelacés
De petites mains unies
Dans une ronde enfantine
Et celles jointes en prière
Ou menottées de fer
pour avoir la paix
Il y a les mains qui parlent
De ceux qui parlent trop
Ou de celui qui se tait
Parce qu’il est muet
Il y a ceux qui tendent la main
Pour connaître leur destin
Ceux qui l’ont dans leurs mains
Le disent mais n’en savent rien
Il y a celui qui tend la main
Le dos au mur
Parce qu’il n’a rien
Avec plus de soif que de faim
Il y a ceux qui ferment la main
En colère
Pour en frapper le voisin
Ou le tenir en l’air
Il y a les mains habiles
qui trichent ou dérobent
Et font un tour de passe-passe
Devant des messieurs en robe
Pour tomber dans la nasse
Comme des poissons morts
Il y a les mains assassines
Qui serrent le cou un peu fort
Meurtre ou accident
Au hasard du jugement
Il y a les hommes souriants
Qui se serrent la main par devant
Pour la photo
Et qui se passent la main
Dans le dos
Pour se trahir demain
Il y a ceux qui se salissent les mains
Dans les moyens justifiés par la fin
Ou dans le sang de la guerre
Et en sont fiers
Il y a ceux qui s’en lavent les mains
Et même s’ils se donnent du mal
Leurs mains restent sales
Il y a sur le dos de la main
Cette terrible crasse sénile
Ces petites taches brunes
Qui petit à petit se touchent
Et tirent un voile brun
Sur le destin de chacun
Paul Obraska
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Par Dr WO le 10 Juin 2009 à 18:32
FILComme une mouche prisonnière
Agitée en vain de soubresauts
Dans une toile vomie des filières
Nous filons sur un fil au tombeau
Le temps tisse sa toile patiemment
Un fil pour le passé, un fil pour l’avenir
Il n’y a guère de place pour le présent
Juste un nœud pour se souvenir
Equilibristes, nous marchons sur un fil
A pas hésitants entre terre et ciel
Plus on avance plus croît le péril
Que le fil se rompe la chute est mortelle
Il n’y a pas de filet tissé sous les fils
Une chute en terre, jamais vers le ciel
Paul Obraska
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Par Dr WO le 2 Juin 2009 à 17:28
Magritte : "La méditation"
Avec le temps, l’espace se rétrécit et ce qui n’arrange rien, le temps s’accélère.Lorsqu’on retourne vers un lieu de son enfance longtemps après l’avoir quitté,
Chacun est surpris en évoquant ses souvenirs devant la réalité :
Le chemin est devenu sentier, la montagne est devenue colline,
le lac est devenu étang, le château est devenu chaumière
et la longue marche de jadis est franchie en peu de pas.A l’âge adulte, le temps file en s'accélérant et l’espace continue à se rétrécir :
Mer et montagne sont à portée de roues, les pays lointains, à portée d’ailes,
L’astre des poètes d’une pâleur mortelle avale en grimaçant
des capsules projetées par les terriens impudents.Quadt on devient vieux, l’espace se rétrécit encore, clos entre quatre murs,
Quatre murs blancs qui se rapprochent sournoisement.
Et un peu plus tard, il arrive une chose inouïe,
Sans aucun témoin pour en faire le récit :
L’espace et le temps disparaissentEt c’est la fin du monde.
Mais en attendant, si on allait prendre l’apéro ?
Paul Obraska11 commentaires
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Par Dr WO le 16 Mai 2009 à 11:19
Dali : Le cabinet anthropomorphiqueTIROIRS
Dali imagina sur sa toile brune un meuble humain,
Le tronc en tiroirs, un signe sans espoir de la main.
De son regard brûlant il rendit les montres molles,
Montres de gousset coulant lentement vers le sol.
En les voyant couler, chacun aimerait les retenir,
Mais du temps n’est retenu que le souvenir.
Ah ! Ranger les traces laissées dans la mémoire
En les conservant chacune dans un tiroir,
Comme des photos rangées dans un coffret,
Et regarder du passé ce que l’on choisirait.
Mais les boîtes à souvenirs restent ouvertes,
Les plus beaux s’enfuient et on regrette leur perte,
D’autres nous suivent comme l’ombre de nos pensées,
Et s’infiltrent dans les rêves de nos nuits agitées.
Paul Obraska
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Par Dr WO le 22 Avril 2009 à 17:48
Vincent Van Gogh " Terrasse du café sur la place du forum"
BIERE AMERE
Il marchait depuis le matin
mais il hésitait à s'asseoir
Il ne lui restait presque rien
mais il avait besoin de boire
attiré par cette flaque de lumière
au milieu de la nuit étoilée
Il avait erré la journée entière
sans trouver à s'embaucherIl ne souhaitait plus qu’une bière
Assis il regarda les gens passer
Des gens qui se promenaient
en gouttant la douceur du soir
Ils avaient travaillé la journée
et savaient à quoi ils servaient
Lui n'avait plus grand espoir
à nouveau de travaillerIl resta longtemps à la terrasse du café
en buvant lentement la bière amère
Il n’avait pas assez pour régler
De ce jour il entrait dans la misère
Encore solide il était bon à jeter
Alors il se jeta le reste de bière
et puisqu'en marge de la société
il sortit de la flaque de lumière
et entra dans la nuit sans payerPaul Obraska
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