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306. L'art contre la mort
« Pour préciser le possible lien entre art et mortalité, une équipe du Royaume Uni[1] a réalisé une étude de cohorte portant sur 6 710 personnes âgées de 50 ans et plus (53,6 % de femmes, âge moyen 65,9 ans), suivies pendant 14 ans. Les auteurs ont analysé la relation entre la participation à des activités artistiques « réceptives » (visites de musées, de galeries d’art, d’expositions, théâtre, concert, opéra) et la mortalité. » (Journal international de médecine). Cette cohorte est issue de « l’Étude anglaise longitudinale sur le vieillissement » et est donc représentative de la population générale pour la tranche d’âge étudiée. 2001 décès sont survenus pendant la période d’étude.
Et bien entendu ces chercheurs géniaux ont trouvé une relation entre les activités artistiques et la mortalité, les premières diminuant la seconde et plus ces activités sont fréquentes et plus la mortalité diminuerait, jusqu’à 31% du risque de décès si la participation est mensuelle ou plus.
Les auteurs heureux d’avoir trouvé un rapport entre la contemplation de l’art et la longévité se sont posés des questions : « Les auteurs ont suggéré que cette association pourrait en partie s’expliquer par des différences en matière de cognition, de santé mentale et d’activité physique, parmi les personnes qui participent à des activités artistiques et celles qui ne le font pas ».
Il ne leur est pas venu à l’idée que ceux qui participaient aux activités artistiques étaient justement ceux qui vivaient en moyenne le plus longtemps. Ce n’est probablement pas la participation à ces activités qui diminue le risque de mortalité de ces amateurs d’art mais les conditions socio-professionnelles qui expliquent leur attraction pour l’art et qui leur permettent d’assouvir cet attrait.
Les auteurs semblent oublier que si aller dans un musée reste abordable, le théâtre est nettement plus cher et ne parlons pas de l’opéra qui est hors de prix. Il faut donc que le salaire ou la retraite (qui lui est parallèle) soit suffisamment élevé pour pouvoir satisfaire ses goûts artistiques.
Or comme le montre le diagramme ci-dessous les professions qui sont ou qui ont été les mieux rémunérées sont aussi celles qui vivent le plus longtemps. Les cas des agriculteurs et des chefs d'entreprises mériteraient d'être discutés (vie à la campagne favorable pour les uns, stress défavorable pour les autres ?)
Enfin si l’amour de l’art peut toucher tout le monde, c’est tout de même l’éducation que l’on a reçue qui favorise cet attrait.
Comme le montre le diagramme ci-dessous ce sont les plus diplômés qui vivent le plus longtemps :
Ce diagramme un peu complexe montre également que (jusqu’à présent) la longévité augmente avec le temps, que quelles que puissent être les conditions, les femmes vivent plus longtemps que les hommes, mais j’ignore si elles vont plus souvent au théâtre qu’eux.
[1] Fancourt D et coll. : The art of life and death: 14 year follow-up analyses of associations between arts engagement and mortality in the English Longitudinal Study of Ageing. BMJ 2019;367:l6377
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Commentaires
2Souris doncJeudi 2 Janvier 2020 à 16:57Pierre Soulages vient de fêter ses cent ans. Ce qui conforte la thèse que vous exposez.
A vous, Dr Wo, à votre blog, à vos commentateurs : bonne année ! bonne santé ! De tout cœur (comme il sied à un cardiologue graphomane).
Que l'inspiration vous vienne aussi naturellement que vos trouvailles dans les publications dont nous n'aurions aucune idée sans vous, les expos, les actualités dont vous nous instruisez en nous régalant rigolant.
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Jeudi 2 Janvier 2020 à 17:17
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Une... "étude" (?) de cohorte (?) longitudinale (???) presque semblable pourrait-elle faire ressortir une même corrélation entre la longévité et la fréquentation des palaces et des restaurants étoilés ?
Ou la possession d'une Rolex ?
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Jeudi 2 Janvier 2020 à 17:50
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Prudence, Doc, car, quelquefois, les corrélateurs fous peuvent avoir raison !
Par exemple le chercheur australopithèque qui a observé une corrélation entre le petit moment de plaisir furtif au fond de la grotte et la naissance d’un bébé plusieurs mois plus tard a été moqué par ses contemporains. Et pourtant c’est lui qui avait raison !
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Jeudi 2 Janvier 2020 à 23:00
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5AristarkkeVendredi 3 Janvier 2020 à 08:08Quelle inconséquence, Doc !
Aucune illustration dans ce billet alors qu'elle eût été logique, vu son thème. Drôle de souci pour la durée de préservation de votre lectorat!-
Vendredi 3 Janvier 2020 à 09:08
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6un coeur qui batVendredi 3 Janvier 2020 à 08:19Bonjour Doc,
Je vous présente mes meilleurs et sincères vœux pour 2020.
Les auteurs de cette étude doivent avoir à l'esprit que les chercheurs sont payés pour chercher et non pas pour trouver sinon ils n'auraient plus de missions... encore qu'avec de telles trouvailles on en redemande....
Très belle année
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Vendredi 3 Janvier 2020 à 09:16
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On étudie tout et n'importe quoi pour enfoncer des portes ouvertes.
Ce n'est qu'un exemple des nombreuses études où l'on tente de trouver un rapport entre tout et n'importe quoi. Il arrive souvent que les chercheurs cherchent essentiellement ce qu'il doivent chercher.