• 291. Bien nommer les choses

    291. Bien nommer les choses

    Image du film de Woody Allen « Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe... sans jamais oser le demander ! » : l'attente des spermatozoïdes.
    Un de mes confrères (que je ne connais pas) du nom de Grégoire Moutel a affirmé dans une interview au Point que « le désir d’enfanter est un droit fondamental ». Cette formulation, pour le moins absurde, résume assez bien l’état d’esprit de nos contemporains, du moins sous nos climats, le désir est devenu un droit et ce droit est même fondamental aux yeux de certains : « Puisque j’ai envie de ça, on doit me le donner », « si l’autre a droit à quelque chose, la collectivité se doit de me l’offrir par souci d’égalité ». Par cette affirmation, le Dr Moutel est partisan du droit à l’enfant, et l’enfant devient ainsi un objet de consommation à disposition. Le désir transformable en droit suscite la naissance d'associations d'individus éprouvant le même désir afin de peser sur l'Etat pour que son objet leur soit procuré.

    La « procréation médicalement assistée » (PMA) est une dénomination qui n’a plus de sens. Technique biomédicale introduite pour pallier les infertilités pathologiques d’un couple hétérosexuel, elle est devenue une technique utilisée en dehors de la pathologie, à moins de considérer l’impossibilité féminine de faire un enfant sans mâle ou sans sperme comme une pathologie, ou l’homosexualité comme une maladie, en l’occurrence une phobie sexuelle de l'autre sexe plutôt qu'une attirance pour le même avec la constitution de couples infertiles d'individus fertiles.

    Le « médicalement » dans la PMA est assez irritant car il ne s’agit plus de médecine. Le terme d’AMP que certains préfèrent utiliser est encore plus signifiant, car dans « assistance médicale à la procréation », le premier terme est « assistance », et peut-on refuser à quelqu’un une assistance, de surcroît médicale ? On est quasiment dans la compassion.

    L’insémination artificielle d’une femme permet à celle-ci d’obtenir du sperme anonyme en rejetant son producteur que l'on préfère en général maintenir dans les limbes en tant que fantôme paternel impuissant (le comble). Nous ne sommes plus dans le soin mais dans l’utilisation d’une technique identique à celle des vétérinaires pour satisfaire un désir et une convenance, alors que les intéressées sont normalement fécondes mais rejette le rapport hétérosexuel (ce qui est parfaitement leur droit).

    De ce fait PMA ou AMP ne permet pas de bien nommer les choses, et si l’on ne veut pas employer la dénomination « insémination artificielle » qui sent un peu trop l’étable, pourquoi ne pas parler de PHS : « procréation hors sexe » (« hors copulation » ou « hors coït » manque d’élégance  et « sans rapport » manque de précision), cela permettrait d’évacuer la médecine de cette affaire où elle s'est un peu fourvoyée.

    Texte tiré de la chronique médicale n°219 :

    Pour ma part, je serais partisan de permettre la PMA pour celles qui désirent y recourir mais à condition que la société ne la prenne en charge qu’à titre thérapeutique comme le veut la loi actuelle.

    Celles qui recourent à la PMA à l’étranger le font à leur frais, il serait plus simple pour elles de la faire en France de la même façon, la situation législative en serait plus claire et les garanties médicales plus sûres.

    J’entends d’ici la vague de protestation des vierges effarouchées :

    Comment ! On sépare les femmes en deux catégories : les lesbiennes et les hétérosexuelles ! Discrimination intolérable ! Homophobie ! Et pourquoi pas, racisme ! Seulement :

    1 Avoir un enfant n’est pas un droit, mais une faculté que l’on possède ou pas, que l’on désire utiliser ou pas.

    2 Les lesbiennes peuvent avoir des enfants par un rapport hétérosexuel mais qu’elles refusent par convenance personnelle en manifestant de facto une sorte de discrimination à l’égard de l’homme. Il me semble inconvenant de demander à la société d'assurer leur fécondation.

    3 Elles désirent préférentiellement se procurer du sperme anonyme pour créer des enfants d’emblée orphelins de père (l’auto-insémination avec le sperme d’un ami volontaire ne pose aucune difficulté réelle).

    4 L’homosexualité n’étant pas une maladie, le recours à l’Assurance maladie n’a pas lieu d’être.*

    5 Il est logique que la PMA pour convenance personnelle soit payante comme l’est la chirurgie esthétique pour convenance personnelle (bien différente de la chirurgie réparatrice qui, elle, est prise en charge). Il existe aussi une inégalité entre celles ou ceux qui ont les moyens financiers d’embellir leur apparence et celles ou ceux qui ne les ont pas. Celles qui sont laides sans pouvoir s’embellir souffrent probablement plus qu’une lesbienne sans enfant, car celle-ci sait qu’elle pourrait en définitive s’en procurer un d’une façon ou d’une autre, ce qui exclut toute inégalité réelle et définitive.

    Axel Kahn, qui est partisan de la PMA pour les lesbiennes, considère (dans Le Point du 13/07/17) que ce "droit" est la conséquence du mariage homosexuel et que l'on peut ranger dans la pathologie "l'infertilité" d'un couple dont les deux membres sont fertiles mais pas ensemble (ce qui peut exister pour un couple hétérosexuel). Raisonnement un peu tordu qui, de toute façon, ne peut pas s'appliquer aux femmes seules et qui donne au passage un caractère pathologique à l'homosexualité.

    Voir aussi : « 158. Les 343 fraudeuses »,« 210. La médecine au service du désir » et # Ne balance pas ton sperme

    « Un bon rapport risque/bénéficeDes chaussures qui nous font marcher »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 14 Juin 2019 à 16:36
    Pangloss

    Le désir d'enfant serait un droit? Pourquoi donc un désir peut-il être un droit? Si je désire être riche (désir bien légitime) ai-je le droit d'exiger de la société qu'on me donne de quoi l'être au nom de l'égalité?

      • Vendredi 14 Juin 2019 à 16:39

        Je regrette qu'un de mes confrères puisse sortir une telle ânerie.

    2
    Souris donc
    Vendredi 14 Juin 2019 à 17:47

    Le matin, j'écoute le journal de Dmitri Pavlenko. Radio Classique octroie une plage publicitaire à Anny Duperey, pour son action en faveur de SOS Villages d'Enfants. Parole donnée à une célébrité qui appuie cette œuvre.

    Suggestion : soutenir financièrement cette mission. Ou adopter un orphelin.

    Plutôt que ces droits à l'enfant, méthode vétérinaire.

      • Vendredi 14 Juin 2019 à 18:10

        Néanmoins l'insémination artificielle avec donneur permet d'avoir un enfant qui reste le vôtre, même s'il est de père inconnu. L'adoption devrait être une solution pour les homos mâles plutôt que la GPA, mais elle est déjà difficile pour les couples hétéros.

    3
    Vendredi 14 Juin 2019 à 19:28

    Malheureusement ce n'est pas le seul de vos confrères qui déconne! On va dans le mur allègrement avec la bénédiction de la médecine! Hourra!

      • Vendredi 14 Juin 2019 à 19:47

        Il était fatal qu'en touchant à la procréation on entrait dans un domaine aux ramifications imprévues et dangereuses.

    4
    Souris donc
    Samedi 15 Juin 2019 à 07:02

    PMA, GPA, y a qu'en France que les lobbys LGBT agitent ce "problème de société".

    Je suis abonnée au Spiegel. Le seul article qui s'en approcherait (de loin), c'est la condamnation de deux gynécologues, pour avoir fait sur leur blog de la pub en faveur de...l'IVG.

      • Samedi 15 Juin 2019 à 08:36

        Comme vous le savez il existe une grande diversité dans le traitement de ces problèmes de société à  travers le monde et même en l'Europe. Il me semble qu'en France c'est la prise en charge par la collectivité des convenances personnelles qui vient également compliquer les choses. 

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