• 18. "Messieurs, ceci n'est pas une blague !"

     

    Des poulets comme cobayes au temps de Paracelse

    L'anesthésie aurait pu être découverte beaucoup plus tôt. L'éther, appelé eau blanche, était connu au XVIe siècle et Paracelse avait remarqué qu'on pouvait endormir des poulets avec. Sans suite pendant 300 ans...Paracelse était un visionnaire intempérant. Son nom, déjà, n'était pas simple : Philippus Aureolus Theophatus Bombast Von Hohenheim. Ce Suisse vécu dans la première moitié du XVIe siècle et sa vie commença mal, puisqu'il aurait été émasculé dans l'enfance par un militaire. Disgracieux, il se montra dans toute l'Europe. Il fût colporteur, magicien, astrologue, amateur d'occultisme et de grandes beuveries. Devenu chirurgien militaire à Venise, il obtint la chaire de médecine de Bâle en 1527 où pour illustrer sa leçon inaugurale, il encouragea ses étudiants à jeter au feu les « élucubrations livresques de Galien et d'Avicenne » et ne tarda pas à être chassé de la ville. Personnage paradoxal : baignant dans l'ésotérisme, il enseignait et décrivait que ce qu'il observait et non ce qu'il avait lu ; mégalomane, il se dévouait auprès de ses malades, même lors de l'épidémie de peste de 1534. Il eût la vision de la pharmacologie et mourût à 48 ans pauvre et seul.

     

    Triste fin d'un découvreur

    Le dentiste américain, Horace Wells, a été le premier en 1844 à découvrir l'effet anesthésiant  d'un gaz, le protoxyde d'azote, au cours d'une « hilarante party ». Un an plus tard il rencontra Morton et prétendra toujours lui avoir donné l'idée de l'anesthésie à l'éther. Avec le protoxyde, Wells n'obtint pas le succès espéré, abandonna la dentisterie pour faire des affaires et finir en prison, après avoir vitriolé des prostituées. Il s'est suicidé en se sectionnant une artère fémorale après s'être à demi anesthésié, les uns disent au chloroforme, les autres à l'éther, mais pas au protoxyde d'azote.

     

    Naissance de l'anesthésie et anesthésie de la naissance

    Le 17 octobre 1846 est survenu un des évènements les plus importants de l'histoire de

    l'humanité : à Boston le Pr John C. Warren fait la première opération sous anesthésie générale. Il termine en s'adressant à l'assistance médusée : «  Messieurs, ceci n'est pas une blague ! ». L'Ether Day est commémoré dans les écoles des Etats-Unis. Ce sont de simples médecins, Crawford W. Long (portrait de droite), Charles T. Jackson et un dentiste, Williams T. Morton (portrait de gauche), qui inventèrent l'anesthésie.

    Anesthésia a été le prénom donné à une petite fille née en 1848 à Edimbourg, première mise au

    monde sous anesthésie générale au chloroforme par James  Y. Simpson[1]. Aux religieux qui lui reprochaient d'aller contre l'injonction divine, il faisait remarquer que Dieu avait endormi Adam avant de lui enlever une côte pour créer Eve. Cet argument théologique a moins convaincu que l'usage du chloroforme pour l'accouchement du septième enfant de la reine Victoria.

     

    L'anesthésie n'endort pas les microbes

    L'anesthésie se répandit immédiatement des deux côtés de l'Atlantique. Paradoxe : pour les malades, ce fût  une catastrophe. Les chirurgiens qui devaient se limiter à des opérations simples et rapides en l'absence d'anesthésie, avaient mis au point sur le cadavre des opérations plus complexes. Se sentant libérés, ils les réalisèrent avec une mortalité effroyable due à l'infection. La mortalité fût si importante dans les hôpitaux parisiens à la veille de la guerre de 1870, que les chirurgiens des hôpitaux réunis décidèrent  de ne plus opérer.

     

    C'est l'antisepsie mise au point par Joseph Lister, professeur de chirurgie à Glasgow, s'inspirant des recherches de Pasteur, qui en plus de l'anesthésie permettra l'essor de la chirurgie. En 1865 il utilisa l'acide phénique avec succès, pensant que ce qui convient pour assainir les eaux usées avait toutes les chances de convenir à l'homme.

    Des techniques d'antisepsie avaient déjà été prônées dans le passé, parfois pittoresques. Les toiles d'araignée ont été longtemps utilisées pour traiter les blessures, notamment au Moyen Age. A la bataille de Crécy (1346) chaque soldat anglais en possédait dans son paquetage[2]. Et maintenant on sait que la soie d'araignée est enduite d'une sécrétion bactéricide et fongicide.


    Documentation réunie avec la collaboration de Jean Waligora


    [1] La Reine Victoria en bénéficia et devint une chaude partisane de « l'anesthésie à la Reine ».

    [2] K.Haeger, History of surgery

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