• 163. Les firmes se penchent sur les berceaux

    163. Les firmes se penchent sur les berceaux

    La conservation de convenance pour une femme de ses propres ovocytes est interdite en France mais autorisée dans plusieurs pays. Ainsi, aux Etats-Unis, 5 000 enfants seraient nés après congélation par leur mère de leurs ovocytes. Le prélèvement des ovocytes nécessite une stimulation ovarienne et une petite intervention le plus souvent sous anesthésie locale. Mais le coût de la technique de congélation s’élève à 10 000 dollars par tentative (7 900 euros) auxquels s’ajoutent les 500 dollars par an pour assurer le stockage (environ 400 euros). Les femmes sont donc parfois amenées à sacrifier leurs ambitions professionnelles pour avoir un enfant tant qu’il est encore temps, car cette période correspond à celle où leur carrière commence à se dessiner.

    Apple envisage et Facebook propose déjà d’offrir dans leur couverture santé la prise en charge des frais liés à la conservation d’ovocytes et ce jusqu’à 20 000 euros. Cette initiative soulève une polémique.

    Quel est l’intérêt pour la femme ?

    Choisir le moment de sa grossesse, sachant que les ovules conservés sont des ovules jeunes avec un meilleur potentiel que les ovules libérés à un âge plus avancé, quand ils ne sont pas absents, mais une grossesse tardive n’est pas anodine.

    Choisir ce moment en fonction du plan de carrière et éventuellement de la rencontre du compagnon espéré. Ce qui est admettre que dans les conditions habituelles, il est parfois difficile de concilier sa progression professionnelle et une vie de famille, contrairement à un homme.

    Quel est l’intérêt pour l’entreprise ?

    Elle peut passer pour généreuse et favoriser la féminisation de ses employés, car actuellement on y compte deux hommes pour une femme, et permettre aux talents féminins de s’exprimer. Elle peut aussi se targuer de promouvoir l’égalité, ne serait-ce que donner aux femmes la possibilité de conserver leurs ovocytes comme les hommes ont celle de conserver leur sperme.

    Mais ne cherche-t-elle pas également à ne pas perturber la bonne marche de l’entreprise par la survenue de grossesses intempestives ? Ce qui serait un peu considérer la femme comme une valeur marchande.

    La proposition de ces entreprises est une intervention manifeste dans la vie intime de son personnel féminin, et sous couvert de générosité, il n’est pas exclu qu’elles puissent exercer ultérieurement des pressions pour inciter les femmes à choisir le moment de leur grossesse en fonction de l’intérêt de la firme. « Chère amie si vous pouviez sortir votre ovule du placard dans un an, cela nous arrangerait ».

    D’une façon plus générale

    Cette initiative montre à quel point le fossé se creuse entre l’acte sexuel et la procréation en opposition avec les religions monothéistes qui conçoivent l’acte sexuel comme visant essentiellement à la procréation, le plaisir que l’on peut en retirer étant en quelque sorte un « mal » nécessaire. Mais la distinction vécue entre sexualité et procréation ont été marquées ces dernières années par leur séparation physique, les gamètes n’ont plus besoin des corps pour s’accoupler mais ont encore besoin de celui de la femme pour se développer. Avec l’insémination artificielle et la fécondation in vitro, le corps de l’homme lui-même peut maintenant être exclu de la procréation.

    Berthe Morisot « Le berceau »

    « Le baiser qui tuePolémique autour d’une bulle »

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  • Commentaires

    1
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 10:09

    Un processus que je réprouve totalement... L'effet est perverse à tous points de vues. Nous devenons des machine Doc, les hommes autant que les femmes....! Bon dimanche.

    2
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 10:23

    Les êtres humains deviennent peu à peu (mais trop vite encore à mon goût) des "animaux dénaturés" pour reprendre le titre du roman de Vercors.

    La volonté de préserver la carrière professionnelle amènera -en toute bonne logique- les femmes à concevoir une fois leur carrière terminée, c'est à dire au moment de la retraite. Ce qui est une aberration. Les grossesses tardives peuvent présenter un risque pour les femmes, certes. Mais mesure-t-on le risque pour les enfants qui ont des chances (!) d'être orphelins à l'adolescence ou (autre "chance"!), celle d'avoir une mère octogénaire quand ils auront quinze ans?

    Cette histoire de "carrière" me semble beaucoup plus au bénéfice de l'entreprise que des salariées.

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    3
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 10:26

    ZAZA. Il est incontestable que tout cela manque de poésie et de romantisme.

    4
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 10:34

    PANGLOSS. Enfanter proche de la ménopause ou même après est une aberration. Les entreprises ne sont pas des philanthropes et elles doivent bien attendre un retour sur investissement. "Animaux dénaturés" convient bien, nous perdons notre nature et n'est-ce pas là une des raisons du renouveau des religions ?

    5
    Kristen Chaman
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 15:36

    Ce qui sera une vraie révolution pour les femmes : l'arrivée de l'utérus artificiel in vitro. Et les femmes qui n'auront plus à subir les accouchements et ses risques liés le plébisciteront. Cette vision est certes futuriste, mais réaliste si on tient compte des avancées de la science et des attentes même inconscientes du genre humain.

     

    A savoir que les mères porteuses en sont déjà un dérivé.

    6
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 16:51

    Je pense comme vous que c'est une possibilité qui n'a rien de farfelue. La difficulté me semble être le cordon ombilical placentaire, le fœtus étant programmé pour le recevoir dans sa chair avec une fonction cardiaque inversée.

    7
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 18:02

    Oui je suis moi aussi gêné par  le fait que l'initiative vienne d'Apple et de Facebook car elle a certainement pour objet de mieux planifier les congés maternité. 

    On pourrait leur proposer le modèle français. La méthode dite "Rachida" consiste à travailler jusqu'à la perte des eaux et à réintégrer  le bureau sitôt les effets de la péridurale dissipés. smile

    8
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 18:26

    Certaines femmes mènent crânement leur grossesse jusqu'au bout tout en travaillant. Dati remonte dans mon estime.

    PS On ne peut plus faire de commentaires sur vos articles ? Les deux derniers sont plutôt intéressants.

    9
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 18:47

    C'est vrai, à ce train là (si j'ose ainsi m'exprimer) les femmes n'auront bientôt plus besoin d'hommes. Quelques donneurs de sperme judicieusement sélectionnés suffiront à leur bonheur! Décidément, le progrès c'est quelque chose de fabuleux!

    Amitiés.

    10
    Dimanche 19 Octobre 2014 à 19:12

    Espérons que le plaisir restera.

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