• 134. Les gènes ont leur brevet

     

    « Washington, le mardi 16 avril 2013 – Dans les années   90, une société de biotechnologie américaine, Myriad Genetics a identifié   deux gènes dont certaines mutations sont associées à des prédispositions aux   cancers de l’ovaire et du sein. L’entreprise a décidé de déposer neuf brevets sur ces gènes, afin   notamment de pouvoir mettre au point des tests de dépistage

    « Plusieurs associations de chercheurs américains s’opposent   à l’idée que l’ADN humain puisse être l’objet d’un brevet. L’Association de   pathologie moléculaire a notamment déposé un recours devant la Cour suprême   des Etats-Unis afin qu’elle examine cette question. » (Journal International de Médecine du 21/04/13)

    Les juges seraient bien embarrassés. Il y aurait aujourd’hui 20% des gènes humains qui font l’objet d’un brevet, motivation de nombreuses sociétés de biotechnologie aux USA. Cette course à « l’appropriation » de morceaux d’ADN humain ne semble pas toucher l’Europe où l’on ne peut pas obtenir pour l’instant un brevet pour avoir simplement isolé de l’ADN.

    Plusieurs questions se posent :

    - A qui appartient l’ADN humain ?

    Pour les croyants, l’ADN appartient à Dieu. Il faut cependant souligner que le Créateur n’a déposé aucun brevet pour sa création, qu’Il est le plus souvent absent (et pour beaucoup, totalement), bien qu’Il soit sans cesse invoqué et sollicité, et que, de surcroît, son adresse est inconnue. Le propriétaire ne se manifestant pas en personne et étant non joignable, on peut considérer que, par défaut, chacun est possesseur de son ADN, mais, aux détails individuels près, c’est l’ADN de tout le monde, ce qui fait de lui une possession humaine collective, telle une copropriété, sans syndic.

    - L’ADN est – il un produit naturel ?

    Sans conteste, s’il n’est pas l’objet de manipulations (qui, elles, sont brevetables). C’est un produit naturel ouvert à tous. Si l’on extrait de l’or, on peut breveter le mode d’extraction, mais pas l’or en tant que tel qui peut être exploité en un autre lieu. D’un autre côté, les découvreurs de terres prenaient possession d’un fragment de la nature en interdisant son accès aux autres, mais ils en prenaient possession par la force, en évinçant le plus souvent les propriétaires légitimes déjà sur les lieux.

    - Le gène existe-t-il en tant que tel ?

    C’est en fait une séquence de nucléotides constituant un code pour la fabrication des protéines. Les tenants du brevetage estiment que les gènes ne sont pas des produits naturels mais des « constructions humaines intellectuelles ». Ce qui est un point de vue discutable : donner une signification à un produit trouvé dans la nature ne lui retire pas son caractère naturel en l’absence de transformation.

    - Quelles sont les conséquences du brevetage ? Si certains gènes peuvent exposer à un risque de maladie, la découverte d’un dépistage et éventuellement d’un traitement peut s’avérer rentable. C’est ce qui pousse les sociétés de biotechnologie à faire des découvertes. Mais inversement, interdire aux autres de travailler sur ces mêmes gènes freine le progrès en ce domaine.

    On ne peut conclure que par l’exemple de l’allemand Röntgen  qui découvrit les rayons X, et en fût récompensé par le premier prix Nobel de physique en 1901. Il offrit le montant du prix à son université, refusa l’utilisation de son nom et ne déposa aucun brevet, laissant sa découverte à la disposition de tous, exemple peu suivi de son temps et pas du tout du nôtre. Il répondit  à la firme AEG très intéressée par sa découverte : « Dans la bonne tradition des professeurs d’université allemands, je suis d’avis que les découvertes et inventions appartiennent à l’Humanité. Leur diffusion ne doit en aucun cas être entravée par des brevets, des licences ou des contrats et aucun groupe de personnes ne doit en avoir le monopole ».

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